Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...
Toute jeune, quand les gosses de ma classe me demandaient où était mon père, j'inventais une histoire. C'était un espion. Le Président l'avait envoyé en mission en Amérique du Sud. Ou bien il faisait partie d'une petite équipe de Scientifiques sélectionnés pour passer les cinq années suivantes dans un abri en plein désert, à réaliser des expériences pour le bien de l'humanité.
(...)
Plus tard encore, au lycée, je me présentais simplement comme une orpheline, seule survivante de l'accident d'avion où avaient péri mes parents.
La raison de ces inventions était simple. Même tragiques, mes histoires étaient bien meilleures (...) que celle de mes véritables origines...
Helen McCabe est photographe mais n'obtient pour l'instant que de tous petits boulots aussi, est-elle obligée de compléter son maigre salaire en faisant des extras de serveuse. Elle se sent très seule depuis son divorce. Il faut dire aussi que son mari a mis en avant le problème qu'elle avait avec l'alcool, pour lui enlever la garde de leur fils Ollie (Oliver) âgé de huit ans. De plus, elle s'est endettée pour payer son avocat. Alors elle a la sensation de ne plus pouvoir sortir la tête hors de l'eau.
En semaine, entre deux réunions aux alcooliques anonymes et son travail, elle tente de se distraire en sortant avec son amie Alice tout en attendant avec impatience les deux créneaux de six heures par mois où elle est autorisée à voir son fils. Mais Oliver lui cause du souci car depuis qu'il vit chez son père et sa nouvelle femme, il la rejette, et leur relation n'est plus ce qu'elle était auparavant.
Pour tenter de retrouver une vie normale, Helen s'est inscrite sur un site de rencontres et a commencé à sortir avec Elliott, un homme très gentil qui la rassure et la réconforte.
Mais, lors d'une prestation qu'elle effectue dans le cadre d'une exposition, elle rencontre Ana qui, suite à un accident, est clouée dans un fauteuil roulant. Son mari, Swift, est un homme très plaisant et avenant. Très vite, le couple Havilland la prend sous son aile et Helen se sent pour la première fois entourée et aimée. Ils sont très amoureux l'un de l'autre et tout le monde les envie car en plus ils sont fortunés. Ils ont une magnifique maison avec piscine, ils organisent des soirées grandioses et sont absolument fans de chiens.
Leur vie est très éloignée de celle d'Helen mais elle va tout accepter venant d'eux, répondre au moindre de leur caprice, les laissant même la critiquer sur sa vie privée et l'éloigner de ses propres amis. Peu à peu, sans qu'elle s'en rende compte, ils la manipulent à leur guise. Ils sont généreux et lui confient l'élaboration d'un catalogue de leurs œuvres d'art, puis d'un livret souvenir pour l'anniversaire de Swift. En échange, elle sort avec eux au restaurant et se retrouve couverte de cadeaux alors qu'elle n'a rien demandé. Tout le monde serait tombé dans le piège...car sous une apparente bienveillance perpétuelle, leur relation devient toxique.
C'est alors qu'Helen décide de leur présenter Oliver. Le petit garçon va s'attacher au couple tant il est admiratif de Swift et accepter de venir voir plus souvent sa mère. Il demandera même à passer des jours de vacances chez elle... le charme du couple opère aussi sur l'enfant, sans que sa mère ne semble s'en apercevoir. Elle ce qu'elle veut avant tout, c'est voir son fils le plus possible et même récupérer sa garde...
Jusqu'où Helen ira-t-elle avant de s'apercevoir qu'elle n'est plus du tout maître de sa vie et qu'elle est totalement sous influence ? Connaissons nous vraiment nos amis ?
Très tôt, je m'étais interdit tout espoir démesuré, j'avais pris l'habitude de me laisser guider par quiconque semblait plus expérimenté que moi. Il suffisait qu'un homme de belle allure, chaleureux et apparemment équilibré s'intéresse à moi pour que je le trouve intéressant.
C'est par mon fils que j'ai eu la révélation de ce que signifie aimer vraiment. J'ai compris que je n'étais pas tombée amoureuse d'un homme, mon mari, mais de l'image de la vie que je pourrais avoir grâce à lui, ce qui me rendait responsable autant que lui de l'échec de notre mariage. En fait, nous n'avions rien en commun. J'étais juste bonne à prendre des photos. La vie à travers le viseur de mon appareil.
Le lendemain, j’ai raccompagné Ollie chez son père. Il n’a pas pleuré quand je l’ai déposé devant la maison, et je savais qu’il ne le ferait pas ensuite. L’expérience m’avait appris que c’est ainsi que les enfants de parents divorcés se protègent: en se barricadant contre les émotions suscitées par le passage du monde de l’un à celui de l’autre.
J'ai beaucoup aimé ce roman de Joyce Maynard qui nous fait entrer tout en douceur dans cette histoire particulière.
Les dialogues sonnent justes et les événements s'enchainent sans jamais lasser le lecteur. L'autrice sait très bien nous décrire la façon dont Helen tombe dans les filets de ce couple machiavélique dont rien de l'extérieur ne laissait présager le fonctionnement.
Helen est pourtant une femme indépendante mais qui manque cruellement d'assurance. Elle veut tellement être aimée qu'elle ne se rend même pas compte de sa propre vulnérabilité. Elle est flattée de leur attention car elle se sent enfin exister, et est prête à tout pour être acceptée et les satisfaire.
Les personnages et les relations qui se tissent entre eux sont analysés avec une grande finesse psychologique en particulier la manière dont le couple profite de la faiblesse d'Helen, puis peu à peu l'incite à s'éloigner de tous ceux qu'elle aime, en particulier de son amie Alice, puis d'Elliott qui est très amoureux d'elle, et enfin de son propre travail.
L'autrice nous offre un roman surprenant et addictif sur la solitude féminine, le besoin d'être aimé, l'amitié, l'amour maternel et la trahison.
De cette autrice sur le blog, je vous ai déjà présenté :
- L'homme de la montagne présenté ICI qui m'avait permis de découvrir la plume de l'auteur.
À l’époque où pas un jour ne se passait sans que j’entende sa voix, quasiment tout ce que je faisais m’était directement inspiré par ce qu’elle me disait, ou n’avait même pas besoin de dire, parce que je connaissais son opinion, et que cette opinion était aussi la mienne.
Puis vint un temps, long et sombre : elle m’avait chassée de son monde, et la dure réalité de cette trahison se révéla l’élément déterminant de ma vie – excepté d’avoir perdu la garde de mon fils. Privée de l’amitié d’Ava, je restais incapable de me rappeler ce que j’avais pu être sans elle.