Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...
La FOS-IMMO avait repeint les façades des immeubles l'été dernier, mais il faut croire qu'ils n'avaient plus assez de peinture pour les cages d'escalier. Ou bien, pensa-t-elle en observant les coeurs, les têtes de mort, les sexes tagués sur les murs, la municipalité avait créé une commission pour discuter de la sauvegarde des graffitis, témoignage du patrimoine artistique urbain en ce début de siècle. De quoi se plaignait-elle ? Dans des millénaires, on viendrait visiter son palier comme on visite aujourd'hui les grottes de Lascaux.
Leyli adorait positiver !
Voilà un certain temps que je n'avais pas lu de roman de Michel Bussi.
J'ai particulièrement apprécié la lecture de "Gravé dans le sable", mais j'ai lu aussi avec grand plaisir, "Un avion sans elle", "Ne lâche pas ma main", Maman a tort, "N'oublier jamais", et je n'ai encore jamais lu "Nymphéas noirs"...
C'est celui que je cherchais en médiathèque lorsque j'ai vu son dernier titre, posé sur la table des nouveautés. Je ne pouvais pas le laisser là, d'autant plus que la médiathèque allait fermer pour le week-end et que le temps s'annonçait plutôt maussade.
En plus, le titre me rappelait vaguement quelque chose. A vous aussi je pense...Non ?
Il s'agit de la chanson de Pierre Perret, "Lily", que beaucoup d'entre vous connaissent et qui a été écrite depuis fort longtemps et malheureusement, le problème des migrants n'a pas réellement évolué depuis...
Me voilà donc embarquée bien malgré moi, dans une nouvelle histoire riche en rebondissements, dans laquelle j'ai été tenue en haleine jusqu'au bout.
Quand on aime Bussi, on lit tous ses romans et on aime retrouver son style inimitable, sa façon de nous faire entrer dans l'action sans en avoir l'air et surtout cette empathie qui nous fait finalement considérer le criminel (ici une femme) comme une victime.
Le lecteur trouve en effet toujours des circonstances atténuantes et en tous les cas, au moins une bonne raison, de pardonner à celui ou à celle qui au premier abord est le méchant.
Les vrais méchants eux n'ont pas l'air d'en être au début, et nous les découvrons au fur et à mesure de l'avancée du roman...c'est bien sûr eux qu'il nous faut punir.
L'histoire
Leyli Maal est une mère célibataire d'origine africaine. Elle a fui le Mali et la pauvreté depuis des années.
Voilà qu'elle vient enfin de trouver un nouvel emploi dans un des hôtels de la ville, et cette fois il ne s'agit plus d'un petit job mais d'un véritable CDI et bien qu'il complique un peu plus son rôle de mère, elle est ravie. Mais Leyli n'est pas heureuse pour autant car elle cache un lourd secret qui plombe son moral.
Pour décompresser, elle raconte sa vie à son voisin, le gentil Guy et parfois aussi à son nouveau patron qui est d'une extrême gentillesse et très humain, vous verrez pourquoi...
Le lecteur apprend ainsi que Leyli a contracté très jeune, une grave maladie qui l'a rendu aveugle durant des années avant de pouvoir subir une intervention salvatrice. Même si elle doit toujours se protéger du soleil, elle a maintenant la joie de voir le paysage qui l'entoure et de regarder les gens dans les yeux.
Il apprend aussi que la vie de Leyli n'a pas toujours été facile et que certaines personnes ont bien abusé de son handicap.
Voilà que François Valioni, qui travaille pour Vogelzug, une association d'aide aux migrants, est retrouvé assassiné. Dans sa poche ne sont retrouvés que des coquillages (des cauris qui servaient de monnaie) et un bracelet de couleur.
Puis un second meurtre a lieu qui semble, point par point, identique au premier...Même procédé, même approche de la victime, même coupable présumée_une jeune femme métisse qui montre en partie son visage aux caméras de surveillance_mais il y a quelques détails qui ne collent pas du tout pour les enquêteurs mis sur l'affaire.
Julo Flores, le jeune lieutenant de police mis sur l'affaire, sent tout de suite que Petar Valika, son commandant, lui cache quelque chose d'important et, alors que tout accuse la magnifique "Bamby", lui ne la croit pas coupable. Il va chercher à en savoir davantage sur Vogelzug, cette association qui semble impliquée dans l'affaire, non seulement pour les besoins de l'enquête, mais aussi pour confirmer son intuition.
Mais voilà que la jeune femme, soupçonnée des meurtres, s'avère être la fille de Leyli.
Le lecteur n'est pas au bout de ses surprises...
La loi des séries ? Comme les emmerdes ? Comme si les amoureux devaient se pointer tous en même temps, sans prendre un ticket, sans attendre leur tour. Il fallait toujours que la vie fasse dans la démesure, refile le bonheur comme le malheur en une seule livraison, en vrac dans un carton, et nous laisse déballer le tout.
Encore une fois Michel Bussi sait nous surprendre et joue avec nous. D'abord l'intrigue nous accroche, puis ensuite nous nous perdons dans des fausses pistes avant de vivre un formidable retournement de situation à la fin...
Je me fais avoir à chacune de mes lectures et désormais, je l'avoue, je me laisse balader avec plaisir car je sais que de toute façon je vais partir sur de fausses pistes.
C'est ça le secret de Bussi et cela explique sans doute que la lecture de ses romans nous offre toujours un mélange revigorant de détente et de plaisir. De plus, son écriture est fluide et facile. C'est juste parfait pour moi en ce moment de l'année.
Pourtant le sujet est complexe et grave puisqu'il est ici question de migrants, de leurs conditions de vie chez eux mais aussi en exil, de violences sexuelles, d'abus de confiance...
Au passage Michel Bussi nous montre ceux qui profitent du malheur des autres et qui sont prêts à les sacrifier pour gagner plus d'argent.
C'est d'une actualité brûlante de réalisme et cela rend le lecteur encore plus vulnérable quand en plus comme moi, il connaît la région, car j'ai oublié de vous dire que l'histoire se déroule en partie en Provence et même pour être plus précise à Port-de Bouc, une commune de bord de mer de mon département.
Au passage, l'auteur nous en apprend même sur les dernières découvertes en matière de recherche de paternité, l'usage qui était fait en Afrique et en Océanie, des cauris, ces coquillages utilisés pendant longtemps en tant que monnaie.
A noter : les objets jouent un rôle très important dans l'histoire...
Enfin l'auteur nous trompe encore davantage grâce à l'uniformisation des lieux où se passent les différents événements (comme par exemple cette firme d'hôtels de luxe où tous les décors sont identiques dans le monde entier). Le lecteur ne sait plus du tout par moment où il se trouve...
C'est subtil et s'ajoute au suspense.
Tout le monde possède des rêves Bamby. Et ce qui compte, ce n'est pas de les réaliser, c'est juste de pouvoir y croire.