Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...
Et comme le dit justement Almah, en citant Salomé Ureña qui lui est devenue une sorte de maître à penser pour sa liberté de vues et son engagement : "C'est en continuant à nous battre pour créer le pays dont nous rêvons que nous ferons une patrie de la terre qui est sous nos pieds".
Je vous présente aujourd'hui le dernier opus de la saga commencée ICI avec "les déracinées", puis ICI avec "l'Américaine" et ICI avec "Et la vie reprit son cours".
Je suis contente de ne pas avoir eu à attendre pour les lire tous les quatre durant les vacances, ou presque puisque j'ai terminé le dernier il y a à peine 3 semaines. Ne vous en étonnez pas, j'attends toujours pour rédiger mes chroniques afin de prendre un peu de recul.
Nous suivons la famille Rosenheck-Soteras des années 80 à l'année 2013. Ruth qui ne regrette pas d'être revenue vivre en République Dominicaine, va au cours de ces années voir ses enfants grandir et se disperser pour suivre chacun leur chemin.
Le roman débute alors que Gaya fête ses 15 ans, un événement qui réunit tous les proches et qui est très important pour la famille.
Gaya étant l''aînée, va être la première à quitter la famille pour poursuivre ses études aux États-Unis, sous la protection de Georges son grand-père qui n'a plus qu'elle à présent et compte bien profiter de cette petite-fille découverte sur le tard.
Elle se passionne pour la biologie et en particulier, les baleines ce qui va la mener bien loin de son île. Gaya a un caractère très fort qui ne manque pas de nous rappeler celui de sa grand-mère et elle fait la fierté de sa famille. Mais son départ est une véritable souffrance pour Ruth qui se révèle être devenue, une vraie "maman juive", fragilisée par le départ de sa "nichée". Mais heureusement il lui reste ses deux fils, David qui va lui aussi bientôt prendre son envol, et le petit Tomas qui vient de naître.
Ruth continue à faire vivre la mémoire des pionniers de Sosúa, avec l'aide d'Almah et de Markus. Elle va s'engager de plus en plus pour son pays et se sentir de jour en jour davantage dominicaine.
Elle continue néanmoins à rêver de partir un jour en Europe avec sa mère, pour visiter Vienne, et marcher dans les pas de ses parents. Mais Almah a tourné la page, elle veut rester avec ses souvenirs, n'accepte aucun dédommagement pour ce qu'elle a vécu ou pour ce que les nazis lui ont pris, même quand il s'agit des tableaux de son père qu'elle aimait tant.
Arturo et Nathan vont vivre un drame mais ils sauront rebondir pour mettre à exécution leurs rêves. Bientôt Nathan à défaut de pouvoir danser lui-même, va être porté aux nues grâce à son ballet "Terre promise", dans lequel il retrace l'histoire et l'exil de la famille.
Almah quant à elle, malgré son âge avancé, reste toujours le pilier de la famille, celle qui sait panser les plaies, donner espoir d'un avenir meilleur et avancer contre vents et marées.
Comme toujours, en parallèle de leur vie de famille, des drames et des petits bonheurs de leur quotidien, de leur engagement pour diverses causes importantes, la grande Histoire les rattrape. Les tours jumelles s'effondrent alors que David, y travaille depuis peu, un terrible séisme dévaste Haïti et Ruth va s'y rendre avec Domingo pour aider les sinistrés...et la République dominicaine voit se soulever de terribles émeutes.
A son regard, je savais que c'était mon père qui l'avait photographiée. C'est à ça que ressemblait l'amour entre Wil et Almah, à cette photographie. Comme un bonbon qu'on fait fondre lentement dans sa bouche, j'avais savouré cette idée de mes parents transis d'amour dans un monde qui basculait, n'ayant cure ni de leur entourage, ni des dangers qui les guettaient.
Au-delà de notre famille, c'est peut-être ça notre lien le plus fort, ce refus de nous soumettre aux diktats des puissants et de l'argent, de nous conformer à ce que la société attendait de nous. Cette nécessité vitale d'apporter notre pierre au développement de notre pays.
Ce quatrième opus termine la saga en beauté et m'a permis de renouer avec tout ce que j'avais aimé dans le premier. L'émotion est bien au rendez-vous dans ce dernier tome.
Il est normal que selon notre propre sensibilité chaque lecteur ait davantage aimé telle ou telle partie de l'histoire, mais dans chacun j'ai aimé l'écriture toute en finesse et délicatesse de l'auteur.
J'ai aimé aussi la manière dont elle restitue la grande Histoire en l'intégrant dans le vécu de ses personnages.
Dans celui-ci ce sont les pages où Ruth découvre les carnets de son père, les photos de famille, les souvenirs que j'ai trouvé les plus émouvantes. J'ai été également très touchée par les dialogues entre Almah et son petit-fils David, traumatisé par ce qu'il a vécu à New York.
Dans ce tome encore une fois, la famille n'est pas épargnée. Elle va vivre des drames, des remises en question, des séparations mais chacun doit suivre son propre chemin et laisser la place aux nouvelles générations.
Ceux qui vieillissent s'interrogent sur ce qui restera après eux de tout ce qu'ils ont créé, ce dont les nouvelles générations se souviendront d'heureux ou de moins heureux les concernant.
Ils se questionnent aussi sur l'emprise du tourisme sur leur île, un tourisme qui permet aux uns de s'enrichir et au pays de survivre économiquement, mais un projet dans lequel la nature sauvage paradisiaque n'a pas de place ou sera détruite à jamais.
En terminant la série je me suis dit que j'avais beaucoup de regrets de quitter cette famille, de dire adieu à ceux qui ne sont plus et que j'aurais encore aimer savoir ce que les plus jeunes allaient devenir à leur tour.
C'est donc un livre un peu nostalgique, qui voit partir certains des personnages qui ont marqué la famille, comme Almah qui restera cependant jusqu'au bout une figure forte et tellement présente pour tous.
J'ai beaucoup aimé cette saga car l'auteur a la faculté de nous décrire avec beaucoup de réalisme des personnages profondément humains.
J'ai aimé en particulier...
- Les portraits de femmes fortes ou fragiles, indépendantes ou profondément attachées à leur famille (l'un n'empêchant pas l'autre d'ailleurs).
- L'importance de l'amitié et de l'amour dans leur vie.
- La sincérité des relations humaines, l'entraide, la générosité dont ont fait preuve ces colons de la première heure après toutes les souffrances vécues.
J'ai aimé aussi les dialogues magnifiques entre Almah et les personnes qu'elle aime, amis, enfants, petits-enfants : elle trouve toujours les mots justes et émouvants pour les réconforter.
J'ai appris beaucoup de choses que j'ignorais sur l'histoire de la République dominicaine, et sur l'exil de ces autrichiens juifs qui ont créé cette petite communauté de Sosúa qui je le rappelle a réellement existé. Les principaux événements qui ont marqué le 20e siècle sont bien mis en avant et parfaitement documentés. L'auteur a fait des recherches considérables pour les retracer avec beaucoup de minutie et de patience. On sent qu'elle aime profondément ce pays.
Tout cela fait de cette saga, une lecture passionnante à ne pas rater car à la fois historique, romantique, instructive et terriblement émouvante.
Un seul conseil lisez-là dans l'ordre chronologique.
Je me suis coulée dans le moule brut de ce monde si peu sophistiqué. Notre terre promise, elle était là, sous mes pieds. J'ai refusé d'être une femme entre deux mondes. Quand on est en exil, la patrie, c'est la famille.
Ne cherchez pas à savoir où est la réalité et où est la fiction. Car dans cette histoire tout est vrai.
Pour en savoir plus, n'hésitez pas à aller lire la présentation de l'auteur en cliquant sur le lien ci-dessous...
Catherine Bardon vous raconte : La Saga Les Déracinés
" La saga des Déracinés est née d'une double rencontre, qui remonte à une trentaine d'années et qui a bouleversé ma vie. Il est des rencontres qui bouleversent une vie. Parfois, insidieusemen...
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