Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...
Je sais aujourd'hui qu'il faut se méfier de l'euphorie. Elle nous transporte loin des monstres qui nous hantent, loin des dangers qui guettent, si loin qu'on ne revient jamais plus les affronter. On se croit tiré d'affaire, passé à autre chose. On décrète les dossiers classés alors qu'ils nous consument lentement.
A dix ans, comment aurais-je pu savoir qu'il y a toujours quelqu'un assis plus haut que vous pour vous regarder avec dédain ? Comment aurais-je pu savoir que la seule façon d'y échapper n'est pas de continuer à grimper, mais de se moquer de ce regard-là ?
Un après-midi d'été, alors qu'il était censé réviser ses cours d'histoire avec Marguerite, sa jeune tante âgée de 28 ans, Milo fait avec elle une course à vélo sur une petite route de campagne. Il chute et se retrouve grièvement blessé. A l'hôpital, les médecins diagnostiquent aussitôt un très grave traumatisme crânien. Pour Marguerite qui l'adore et se sent tout de suite coupable, pour Céleste et Lino ses parents qui ont déjà perdu un enfant dans le passé, et pour Jeanne sa grand-mère, le monde s'écroule.
Très vite, alors que le petit garçon sort du coma et recommence à parler, chacun va chercher un coupable pour expliquer les raisons de ce stupide accident.
Marguerite est toute désignée pour être la principale responsable. Que faisait Milo sur cette route au lieu de réviser ses cours ? Mais très vite, les personnages se dévoilent, les petits et grands secrets enfouis depuis des années ressurgissent, et le lecteur découvre qu'ils ont tous quelque chose à cacher et que tous ces petits arrangements avec la réalité, tous ces non-dits, tous ces mensonges, ont empoisonné peu à peu les relations familiales jusqu'à en arriver-là...
Toute la famille, d'un commun accord, interdit à Marguerite de s'approcher du petit garçon. Après avoir passé des jours à attendre, assise sur un banc, en espérant le voir, elle s'éloigne discrètement.
C'est alors qu'après avoir un temps progressé, Milo lâche prise et déprime, ne trouvant plus de raison de vivre. Ce qu'il veut, lui... c'est revoir Marguerite !
Quand le jeune médecin du centre implore la famille de l'autoriser à venir voir le petit garçon, cette dernière reste introuvable.
Par un phénomène étrange, les compliments restent coincés quelque part entre mon cœur et mes lèvres. Comme si t'applaudir trop fort ou afficher mes sentiments risquaient de t'affaiblir.
Dans ce roman choral divisé en cinq parties (le temps de la colère, de la haine, de la vengeance, de l'amertume et du pardon), l'auteur analyse avec doigté les relations familiales et l'effet d'un drame sur chacun des membres de la famille. Ils vont s'exprimer tour à tour, accusant les autres, jusqu'à réaliser en quoi leur propre comportement passé a pu induire le cours des événements.
Les déceptions, les rivalités, les rancœurs, les regrets et les échecs sont analysés avec beaucoup de finesse. L'auteur montre à quel point il est difficile de trouver sa place dans une fratrie, dans une famille et dans la société elle-même, en fonction des blessures de l'enfance, de l'éducation que l'on a reçue, du vécu familial.
Malgré le cadre (l'hôpital puis le centre de rééducation), l'accident et le trop plein de secrets enfouis, cachés par chacun, je n'ai pas trouvé que c'était une histoire triste. Elle est émouvante mais emplie de tendresse, d'espoir et d'humanité et les propos et dialogues, sonnent juste.
L'auteur ne porte aucun jugement, expose simplement les faits, met à nue ces vies meurtries et nous laisse seul juge de trouver ou pas un responsable...et bien entendu vous vous en doutez, nous n'aurons aucune envie d'en trouver un !
Mais ce n'est pas parce que personne n'est responsable de l'accident que tous les comportements des personnages sont pardonnables, non, vous le verrez en lisant ce roman, certains ne le sont pas.
Nous nous questionnerons nous-même sur le pardon, et ce que nous sommes prêts ou pas à pardonner à ceux que nous aimons. Et personnellement malgré la fin, je ne pardonne pas certains des comportements évoqués dans ce roman entre autres en ce qui concerne le père et la grand-mère...mais je ne vous en dirais pas plus.
C'est un roman qui se lit d'une traite, bien écrit, judicieusement mené, le lecteur voulant en savoir davantage à la fois sur la suite des événements et sur les différents personnages, leur ressenti et leur passé.
Je ne me suis pourtant attachée à aucun d'eux en particulier, à part Milo, si adorable, qui entretient avec sa tante une relation magnifique, faite de confiance totale et d'amour. Il comprend les adultes qui l'entourent et sait garder leurs secrets, pour les empêcher de s'entre-déchirer, ce qu'aucun enfant ne devrait jamais avoir à vivre...
Voilà un roman que je voulais lire depuis sa sortie et que j'envisageais d'acheter en poche, quand miracle, il m'attendait sur les rayons de la médiathèque ! Il était temps car il est sortie en 2014. Quand on aime lire, le temps ne compte pas, en fait. Un bon livre le sera encore des années après.
J'ai découvert l'auteur il y a quatre ans en lisant "Par amour", présenté ICI. Puis plus récemment, j'ai aimé lire "L'Atelier des miracles".
C'est grâce à Brigitte (Ecureuil bleu) que j'avais noté cet auteur dans mon carnet, et puis petit à petit je continue mes découvertes. Vous pouvez aller lire sa chronique ICI.
Bonne lecture et bonne semaine à tous !
Ce qui est bien, disait Milo en collant son nez dans mon cou, c'est de savoir que quelqu'un sera là, pour toi quoi qu'il arrive, qu'au moins une personne au monde ne cessera jamais d'avoir confiance en toi.
Ce qui est bien répondais-je c'est de savoir qu'une personne au monde, rien qu'une seule, tient à toi pour toujours. Quoi qu'il arrive.