Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...
La paille fraîchement répandue dans l’enclos forme un îlot doré qui lui au soleil du matin, elle exhale une odeur douceâtre, celle du corps étendu sur ce pan de jaune d’or est plus lourde, pénétrante. Corps de la mère, tout de roseur soyeuse et d’une splendide énormité, voluptueux de tiédeur.
J'ai découvert Sylvie Germain il y a des années de cela lors de la parution de son roman "Jours de colère" qui a obtenu le prix Femina en 1989, puis en lisant "La pleurante des rues de Prague" paru en 1991, et enfin "Magnus" prix Goncourt des lycéens en 2005, des romans qu'il faudra qu'un jour prochain je relise pour pouvoir en parler sur ce blog.
J'ai beaucoup aimé aussi "Petites scènes capitales" que je vous ai présenté sur ce blog et "L'inaperçu" paru en 2008 aux Editions Albin Michel (puis en poche en 2010), dans lequel elle raconte l'histoire des Bérynx, une famille ordinaire à qui la vie n'a pas fait de cadeaux et qui tente de se reconstruire après un terrible deuil.
Tout ceci explique que j'étais très contente de pouvoir emprunter et lire "A la table des hommes" lorsque je l'ai croisé à la médiathèque.
Même si j'ai retrouvé avec plaisir la plume de l'auteur, et la poésie de son écriture, ce dernier roman, sorti en 2016 est surprenant à plus d'un titre...
Il oscille entre la réalité et le fantastique et devient poésie, fable ou conte philosophique au fil des pages...
Il sait s’orienter, se protéger des dangers, trouver où et comment se dissimuler au moindre bruit suspect, surtout s’il s’agit de voix ou de pas d’hommes. Il se méfie bien davantage de ceux-ci que des animaux sauvages, car les humains fouinent partout, et certains portent un fusil à l’épaule, prêtes à tirer sur toute bête comestible, et aussi, par mégarde, par excitation ou par jubilation, sur tout ce qui bouge, comme si la vie des autres vivants leur était un défi, un obstacle à abattre, la promesse d’une bouffée d’ivresse sanguine.
Il a reçu sa part de fraternité, des destructeurs la lui ont arrachée, mais sous la douleur de ce rapt, il conserve la joie d’avoir un jour reçu cette part d’amour et d’amitié, et cette joie, personne ne pourra la lui retirer.
En pleine guerre civile, alors qu'une bombe éclate au-dessus d'un village, seuls une femme et un porcelet sont miraculeusement épargnés. Elle vient de perdre son nourrisson et va finalement nourrir le petit animal...
Mais il se retrouve bientôt tout seul et il est bien obligé de se débrouiller pour survivre.
Un jour en pleine forêt, le jeune porcelet, par une surprenante et magique mutation devient... Babel, un jeune homme plein de charme, mais naïf car il ne sait rien de notre monde.
Le lecteur assiste alors à l'éveil de cet adolescent charismatique, à sa découverte du monde et des hommes.
Il va apprendre à parler et à comprendre les hommes, mais gardera toute sa vie un lien très fort avec la nature et les animaux, avec qui il communique sans problème, comme il le fait avec cette mystérieuse corneille qui le suit depuis sa naissance.
Mon avis...
Le roman, très prenant au départ, tombe très vite dans l'abstraction.
L'auteur s'interroge...
Quels sont les points communs entre les animaux et les hommes ?
Qui de l'homme ou de l'animal, apparaît comme le plus sauvage ?
Qu'est ce qui nous distingue des animaux ? Est-ce le langage ? les croyances ? les sentiments ? l'amour ?
Elle aborde donc des thèmes très intéressants et d'actualité.
Mais, j'ai trouvé ce roman trop déroutant !
J'ai bien compris que l'auteur a voulu parler de la cruauté de notre monde, de la guerre, des croyances et de la violence qu'elles engendrent.
Elle a voulu opposer à ce mal, l'innocence, la candeur, la fragilité et la sensibilité d'un être né au cœur de la nature, pur et incapable de faire du mal, lui seul capable d'ailleurs de la préserver et de l'aimer.
C'est en effet le sujet principal du livre que, vous aurez compris, il faut interpréter à un autre niveau que celui de l'histoire.
Je sais qu'il est de bon ton de faire des chroniques élogieuses d'un auteur connu, mais j'ai terminé ce roman sous la contrainte, et je suis restée en dehors, ou plutôt, non j'ai décroché, après un démarrage qui m'avait plutôt intéressé et interpellé.
On retrouve cependant dans ce roman-fable-conte, la plume très poétique de l'auteur, ses merveilleuses descriptions de la nature, ses mots qui nous embarquent dans un voyage imaginaire et, si l'histoire nous apparaît incroyable (et elle l'est !), la réflexion philosophique sur la nature humaine, qui l'accompagne, reste tout à fait intéressante.
A lire donc, si vous aimez l'auteur, pour vous faire votre propre opinion sur ce roman...mais ne commencez-pas par celui-ci, si vous n'avez jamais rien lu d'elle. Elle mérite vraiment d'être découverte et ce serait dommage !
Zazy ne partage pas mon avis...et donc cela peut vous aider de lire le sien.
Sylvie Germain - A la table des hommes - ZAZY - mon blogue de lecture
A la table des hommes Sylvie Germain Editions Albin Michel janvier 2016 272 pages ISBN : 9782226322739 4ème de couverture : Son obscure naissance au cœur d'une forêt en pleine guerre civile a fa...