Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...
J'avais déjà lu ce roman lors de sa sortie littéraire, et j'avais le souvenir d'un roman qui m'avait beaucoup touchée, car écrit avec beaucoup de sensibilité, par petites touches, comme on peindrait un tableau.
La lecture récente de Rouge argile du même auteur, m'a donnée envie de l'emprunter à nouveau à la bibliothèque, et de replonger dans cette lecture encore une fois et...
Je n'ai pas été déçue ! J'ai même découvert que je pouvais faire lire ce roman aux ados...ce que je n'avais pas réalisé lors de ma première lecture.
L'histoire
A la fin de la première guerre mondiale, Claire, jeune novice vivant à Annecy, travaille depuis 4 ans comme infirmière dans le service du professeur Tournier, un éminent psychiatre qui cherche à guérir les "gueules cassées" de leurs nombreux traumatismes.
Elle se dévoue à ses patients sans se départir de la joie et de l'énergie liées à sa jeunesse. Sa vocation religieuse est pleine de doutes mais la mère supérieure lui laisse le temps de la réflexion, tout en exigeant beaucoup d'elle (la plus indisciplinée de ses novices !).
C'est alors qu'elle doute de son propre avenir, que le professeur lui confie tout particulièrement un jeune soldat inconnu, que tout le monde croit mort, mais qui est simplement muet, recroquevillé dans sa douleur, et qui semble ne jamais vouloir se réveiller à la vie.
Par une méthode bien à elle, qu'elle découvre elle-même en suivant son intuition, et redessine chaque nouveau jour (le massage de son corps et les paroles douces), Claire va peu à peu le ramener à la vie.
Le lecteur découvre fasciné, la parole de ce jeune soldat inconnu et ses souvenirs de guerre, de vie et d'amour qui affluent au fur et à mesure que son corps, en parallèle, se délasse sous les massages. Chaque souvenir est en rapport direct avec la partie du corps massé.
En parallèle, Claire se confie dans de longs monologues qu'elle adresse au soldat de sa voix douce : le lecteur découvre son enfance solitaire, petite orpheline élevée par une tante aimante mais vouée dès le départ à un destin qui n'est pas le sien.
En le ramenant peu à peu à la vie, en lui laissant prendre de plus en plus de place dans sa vie, et parce qu'elle est envahit par le trouble, c'est son propre désir de vivre que Claire découvre ce qui l'amènera à un changement profond et radical.
Les personnages sont très attachants : le professeur, blindé par la douleur d'avoir perdu sa fille, prend Claire en affection non dissimilée et l'amène en douceur à suivre son destin ; Janet, l'éminent psychiatre venu en renfort, qui joue un rôle non négligeable dans l'évolution de Claire...
L'ambiance très particulière tient au fait que le lecteur enchaine, les souvenirs intimistes, les rencontres entre les personnages, tous aussi uniques en leur genre, les récits et descriptions de scènes de guerre, les doutes des médecins, les débuts de l'hypnose, les tâtonnements des débuts de la psychiatrie, les prémisses de la libération des femmes, et la vie quotidienne à Annecy durant le rude hiver 1918...
C'est par les hommes qu'on découvre l'histoire et, c'est ce qui fait la force de ce roman qui peut être lu dès l'âge de 14 ans, car cette jeune femme qui se cherche est encore à quelque part une adolescente : au milieu de l'horreur, elle garde une certaine candeur, une sensibilité à fleur de peau, la faculté de se révolter, un espoir sans faille ou presque, et elle rit...
Beaucoup de critiques l'ont comparé à d'autres romans sur la même période. Qu'importe !
pour moi, chaque roman est unique !