Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...
Comme d'autres, Nila s'est avancée dans l'eau jusqu'à la taille. Avec des gestes lents et doux, elle accompagne les coupelles de fleurs qui éclaireront le voyage des âmes dans la nuit de la mort. Elle parle aux disparus dans la langue ancienne des textes sacrés. "Ne vous retournez pas, dit son puissant murmure de femme veuve, ne vous retournez pas pour écouter ceux qui vous pleurent en appelant votre nom. Trouvez la paix pour vous, et laissez la vie s'occuper de vos vivants."
Quelque part sur l'île de la Réunion...
Kô a seize ans et il n'aime pas l'océan depuis que son père est parti pêché et n'est jamais revenu. Depuis il a abandonné le lycée pour travailler sur la plage. Avec ses collègues, il ramasse tous les objets que la mer leur apporte et le plus souvent, arrive à les vendre ce qui permet à Kô d'aider Nila sa mère, et Sindhu sa petite soeur, qui ainsi peut continuer à aller à l'école.
Parfois il conserve des objets comme il l'a fait lorsqu'une des rames de son père a été retrouvée. Mais tous les jours, il attend, persuadé que son père est toujours en vie. C'est ainsi qu'un jour il trouve un bijou en forme de libellule et comme par hasard son père l'emmenait souvent les observer. Aussitôt, il y voit un signe venant de son père et l'offre à Sindhu pour ses treize ans.
Quand il trouve une petite valise bleue et un gilet de sauvetage déchiré, il y voit un autre signe et les cache car le bleu était la couleur préférée de son père. Il les ramène dans le cabanon de pêche où il a à présent élu domicile, ne retrouvant sa famille que de temps en temps autour d'un repas. La valise contient des vêtements d'enfant et une peluche...
Mais quelques jours après, sa certitude et ses espoirs s'effondent quand le débris d'une aile d'avion est retrouvé au même endroit par son meilleur ami. Il ne veut pas croire à l'impossible et pourtant, un avion a bien du se perdre en mer quelque part au large de l'île.
Aussitôt les médias et les experts s'en mêlent et les parents des personnes disparus commencent à affluer dans le village...et avec eux un dénommé Darpan qui va un temps être accueilli dans la famille.
Kô regarde les rondes de l'hélicoptère au-dessus de l'océan. Il ne se souvient pas en avoir vu quand son père a disparu. Il avait pourtant attendu sur la plage du retour pendant sept jours avec sa mère et sa soeur. Au début, les gens restaient avec eux. On leur apportait des fruits, des noix de coco, des galettes de pain. Et puis ils ont veillé seuls, sa soeur et lui, de chaque côté de leur mère. Personne n'avait remué ciel et terre pour le pêcheur perdu en mer...
Voici un court roman choral pour adolescents qui nous parle du deuil, de la perte et de la difficulté de se reconstruire, tout en délicatesse et en pudeur. Il est tout simplement magnifique et très poétique. Il est conseillé par l'éditeur à partir de 15 ans.
Le lecteur entre dans l'intimité de cette famille et est ému par cet adolescent rebelle qui n'accepte pas la mort de son père et en veut à sa mère de porter le deuil (le sari blanc) depuis déjà trois longues années et à sa jeune soeur de profiter de sa vie d'adolescente avec insouciance. Lui ce qu'il veut c'est qu'on ne lui retire ni ses rêves, ni ses espoirs car ce sont ces seuls repères.
L'océan est omniprésent et constitue un personnage à part entière. La vie sur l'île est décrite avec beaucoup de réalisme ainsi que les traditions des autochtones.
L'auteur s'est inspirée pour écrire cette histoire de la découverte en 2015 sur une des plages de la côte Est de l'île de la Réunion, d'une aile d'avion provenant d'un crash.
Ce livre a reçu la mention spéciale du Prix Vendredi en 2021.
Merci à Babelio et à l'éditeur pour leur envoi dans le cadre de la dernière Masse Critique.