Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...
Afin de se blinder contre le genre de conneries que les équipes indiennes doivent subir quand le match est serré, Denorah essaie de s’inoculer toutes les saloperies que scandera la moitié du gymnase.
"C’est un jour idéal pour mourir.
Je ne me battrai plus éternellement.
Un bon Indien est un Indien mort.
Tuez l’Indien, sauvez l’homme.
Enterrez la hache de guerre.
Tous dans les réserves.
Rentrez chez vous.
Interdit aux Indiens et aux chiens."
Sa sœur a entendu tout ça à son époque, elle l’a lu sur des banderoles, illustrées généralement. Tracé au cirage sur les vitres des cars. Le slogan le plus courant était : "Massacrez les Indiens !"
Les caribous sont juste des caribous, c'est aussi simple que ça. Si les animaux revenaient hanter ceux qui les ont tués, les camps des anciens Blackfeet auraient été envahis de fantômes de bisons, au point de ne plus pouvoir aller et venir, sans doute.
"Oui, mais ils les tuaient à la loyale" entend Lewis...
Voilà un livre dont j'avais entendu parler en bien moi qui aime beaucoup les thrillers et le thème des indiens. Je n'avais pas compris qu'il s'agissait à la fois d'un thriller psychologique et d'un roman d'horreur tout à fait glaçant.
Le titre reprend la célèbre phrase qui a été attribuée au Général Sheridan, bien que les historiens ne soient pas d'accord à ce sujet. Bien entendu, il ne s'agit pas de la prendre au premier degré, vous vous en doutez.
Voici l'histoire...
Ils sont quatre amis, tous amérindiens qui ont grandi dans une réserve du Montana. Dix ans auparavant, ils ont enfreint les règles du groupe en se rendant dans une zone interdite pour y chasser le caribou. Ils étaient jeunes et savaient qu'ils allaient se faire prendre, mais c'était le dernier jour de chasse autorisé, juste une semaine avant Thanksgiving.
Ils ont fait un véritable massacre dans le troupeau. Année après année en prenant de l'âge, ils vont repenser de plus en plus souvent à leurs gestes et en particulier à la mort d'une jeune femelle caribou qui était gestante, ce qui les avait beaucoup impressionné, jusqu'à ce que cela devienne pour eux une véritable obsession.
Lewis en particulier avait tenu à conserver la viande de la jeune femelle pour nourrir les familles et les anciens de la réserve, et la viande avait été distribuée et mise dans les congélateurs pour passer l'hiver. Rien n'a été perdu, comme il en avait fait la promesse à la jeune femelle en la dépeçant.
Voilà qu'à présent des années après, les quatre amis sont victimes d'étranges pulsions, d'une rare violence, et d'hallucinations qui les déstabilisent et pourrissent leur vie quotidienne. Ils réalisent que le fantôme de la femelle caribou est venu les hanter parce qu'elle cherche à venger la mort de son petit. Ils comprennent alors qu'elle va les traquer jusqu'à ce que mort s'en suive...
Pour contrer cette emprise, dont ils ne peuvent se défaire, ils tentent alors de pratiquer une cérémonie traditionnelle pour honorer les disparus, mais rien ne se passera comme prévu...
Pour protéger ton petit, tu donnes des grands coups de sabots. C'est ce que ta mère a fait pour toi, là-haut dans les montagnes, lors de ton premier hiver...mais les sabots ne suffisent pas toujours. S'il le faut, tu peux mordre et déchirer avec tes dents. Et tu peux courir plus lentement que tu en es capable...
L'histoire mêle la tradition, les coutumes et légendes indiennes, à la vie quotidienne des différents protagonistes que nous retrouvons tous dans leur vie d'adulte d'aujourd'hui, en couple ou pas, vivant toujours dans la réserve ou pas. Une forte amitié les lie les uns aux autres même s'ils se sont un peu perdus de vue, ainsi que la culpabilité qu'ils partagent par rapport à ce qu'ils ont fait alors qu'ils étaient tous jeunes.
Le début du livre m'a plu sans pour autant que je ne m'attache aux différents personnages et puis, petit à petit, le lecteur bascule dans l'horreur. Ce fantôme caribou ne leur fait pas de cadeaux en détruisant leur vie, les gens qu'ils aiment et quand ce n'est pas lui qui agit... c'est sous son emprise qu'eux-mêmes deviennent les propres acteurs de leur perte. Tandis qu'ils luttent pour se défendre, leurs pulsions meurtrières atteignent des sommets.
Ce roman est donc à la fois une histoire d'amitié et de secrets partagés, et un véritable roman d'horreur d'une intensité rare, avec de l'hémoglobine, des sueurs froides, des pas qui se font entendre dans la nuit, des larmes.
Je l'avoue j'ai eu du mal à finir ce roman, je l'ai lu, reposé, puis repris. Mon avis est donc mitigé. Je n'avais pas lu de livre d'horreur depuis des années et je pense que cela ne se présentera pas d'un bon moment car même si le lecteur sait parfaitement que tout cela est pure fiction, ce roman est particulièrement violent et ce n'était pas du tout le bon moment pour moi d'aborder cette lecture durant l'été.
L'auteur est un écrivain et un universitaire originaire de la tribu des Pikunis (les Blackfeet). Il est professeur à l'université de Boulder au Colorado. Il a écrit une vingtaine de romans et de nouvelles. Ce roman qui est aussi un portrait de la jeunesse amérindienne aujourd'hui, a reçu plusieurs prix littéraires.