Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...
Les animaux sont nos cousins, et pourtant, nous, les humains, nous distinguons d’eux tous, se disait-elle. Chez les mammouths, les bisons, les cerfs ou les rennes, les femelles vivent en groupe pour mieux protéger leurs petits ; les mâles sont solitaires, sauf à la saison des accouplements où ils s’affrontent, parfois jusqu’à la mort. Mais nous, les humains, n’avons pas de longs poils de laine qui poussent sur notre dos ; l’herbe ne suffit pas à nous nourrir ; nos petits restent fragiles et dépendants très longtemps.
Pour survivre, nous devons nous entraider tout au long de l’année. Les hommes ne s’opposent pas en de terribles combats avant que le vainqueur ne s’accouple brièvement avec toutes les femmes ; chacun a sa compagne attitrée, avec qui il s’accorde tant bien que mal. Parmi nous, si les querelles sont fréquentes – et pas seulement entre les mâles – les meurtres sont rarissimes. Là, réside la noblesse de notre espèce.
Il y a 15 000 ans, alors que le nord de l’Europe est recouvert de glaciers, le sud-ouest de la France bénéficie d’un climat plus froid qu’aujourd’hui, mais sec et ensoleillé.
Là, dans une vallée du Périgord vivent de petits groupes nomades de chasseurs-cueilleurs. Ils appartiennent tous au clan des Grandes-mains blanches. Ils se rassemblent dès l'automne et organisent une grande chasse qui leur permettra d'assurer leur subsistance durant les longs mois d'hiver. La vallée est riche en gibier, en bois pour se chauffer et en abris sous roche pour s'installer loin des intempéries.
Durant la belle saison, les différentes familles du clan se séparent pour aller vers un ailleurs propice à leur chasse et à la rencontre d'autres peuples.
C'est la raison pour laquelle les "Quatre-encoches" sont partis loin de leur territoire et font route vers l'océan qu'ils n'ont jamais vu. Le père compte rapporter de ce voyage de quoi honorer la dot de sa fille aînée.
Mais durant la nuit, Iranie la sœur cadette se noie et on la retrouve au matin sur la plage. Elle venait d'être officiellement choisie pour succéder à Puissance-de-Licorne, leur chamane, et devait donc commencer sans tarder sa formation.
Très vite, la chamane découvre qu'Iranie a été frappée à la tête, et elle devine que le meurtre est lié à une affaire personnelle, sans doute une jalousie interne au clan.
Cet événement, très rare à cette époque, risque de mettre en danger la cohésion du clan, donc sa survie. La chamane décide de mener une enquête discrète, aidée par les Esprits, si ceux-ci ne la lâchent pas, car bien entendu, sa puissance est contestée depuis la mort de la jeune fille. La chamane est une personne d'une grande sagesse qui a une personnalité très attachante. Fine psychologue, proche des membres de son clan, elle va deviner comment découvrir la vérité, tout en ménageant le ressenti de chacun.
Le temps passe, elle observe le groupe et peu à peu, des tensions apparaissent entre les différents membres. La nature s'en mêle et ne leur fera pas de cadeau.
De nombreux rebondissements vont compliquer l'enquête, mais la chamane qui refuse d'entrer dans la spirale de la vengeance et de la violence, trouve le courage et la sagesse d'attendre le bon moment pour refaire ses preuves. Il en va de la solidarité du groupe !
Je ne vous en dirai pas davantage pour vous laisser découvrir cette enquête prenante et dépaysante au cœur de la préhistoire.
Pendant que les chasseurs descendaient à l'intérieur des fosses pour dépecer les cadavres, les chefs se concertèrent. Les neuf taïgas, les cinq rhinocéros et les trois bisons ne permettraient pas à la centaine d'humains du clan de se nourrir jusqu'à la fin de l'hiver. Les éclaireurs n'avaient pas repéré de harde retardataire, susceptible de traverser encore la vallée des Saumons-Bondissants. Il ne restait dans les environs qu'un seul gibier disponible en quantité : les chevaux de la vallée des Fuites-au-Galop
Vous vous en doutez, ce n'est pas l'intrigue en elle-même qui fait le sel de l'histoire mais son contexte et le fait qu'elle se passe à la préhistoire. En effet, le lecteur sait tout de suite que le meurtrier se trouve dans le groupe qui ne comprend que dix personnes.
Le cadre est magnifique puisqu'il nous donne immédiatement envie de partir dans la vallée de la Vézère, près des Eyzies.
Les hommes ont une vie rude mais hommes et femmes vivent ensemble en harmonie, et la nourriture est abondante. Les hommes ont découvert l'art et peignent sur les parois, sculptent l'ivoire, les os, les bois de rennes et la roche.
Le sujet principal du roman est celui des rapports sociaux. L'accent est mis sur la jalousie et le désir de pouvoir mais aussi sur l'égalité homme-femme ce qui je pense, ne tracassait pas vraiment les êtres humains du Paléolithique mais ne manque pas d'intérêt, car c'est en effet une question qu'on peut se poser.
Ce qui est particulièrement intéressant c'est que l'auteur décrit la vie quotidienne des hommes, les pratiques de chasse, les rites, en fonction de l'état des connaissances des années 2010. Elle part des travaux effectués par les scientifiques et préhistoriens, et utilise leurs conclusions dans ses propos. Elle s'est énormément documentée avant d'écrire ce roman afin de tenir des propos crédibles et d'intégrer les connaissances à sa fiction ce qui rend le roman très plaisant à découvrir.
Le roman se lit facilement et le lecteur entre sans difficulté dans l'ambiance. Les paysages sont magnifiques, les descriptions réalistes et les propos plausibles bien qu'un peu trop proche de notre psychologie d'aujourd'hui. Au départ, il faut s'accrocher pour se rappeler des noms des différents personnages mais une page nous aide à le faire, car elle retrace la généalogie de chacune des familles du clan, et résume les liens qui les unissent.
Merci à DocBird de m'avoir permis de connaître cet auteur. Comme elle me l'a très gentiment rappelé dans son commentaire ce matin, ce roman que je vous présente aujourd'hui vient d'être réédité sous un autre titre "La chamane de Lascaux" qu'elle a présenté ICI sur son blog. Voilà pourquoi l'histoire me disait quelque chose !
Elle a également présenté sur son blog du même auteur, "Le choc de Carnac" qui a obtenu le "Prix France Bleu-L'histoire en polar"en 2021, et Les lionnes de Chauvet, ICI. N'hésitez pas à aller découvrir ses chroniques.
Un auteur à découvrir absolument si vous aimez la préhistoire. Dans ma médiathèque seul l'ancienne version était disponible. La nouvelle est augmentée d'une préface écrite par Jean Clottes.
La chamane reprit le récit du commencement dans sa version d'origine. Ils furent rassérénés d'entendre sans variante cette histoire que leurs parents, et les parents de leurs parents, et leurs ancêtres les plus lointains, avaient écoutée avant eux...beaucoup furent émus de recevoir de nouveau le message des Esprits.
Le criminel ne peut plus appartenir au groupe dont il a perdu la confiance, mais personne n'est chargé de le tuer. En prenant la vie de quelqu'un, quelle qu'en soit la raison, un humain crée en lui une faille...