Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...
Concrètement, ça sert à quoi la sémiologie ?
C'est une discipline qui applique les procédés de la critique littéraire à des objets non littéraires...
Voici aujourd'hui une adaptation originale en BD du roman de Laurent Binet, "La septième fonction du langage", un roman que j'avais présenté ICI sur mon blog.
Le 25 février 1980, Roland Barthes, le célèbre philosophe et sémiologue est renversé par une camionnette rouge. Il sortait d'un dîner avec François Mitterrand. Il va être transporté à l'Hôpital de la Pitié-Salpêtrière où il décèdera un mois plus tard.
S'agit-il d'un simple accident ou d'un meurtre ?
L'enquêteur Jacques Bayard, flic bourru assez caricatural se plonge dans les écrits de la victime, mais il ne comprend rien à ses propos ni à ce milieu d'intellectuels. Il va donc aller chercher le jeune Simon Herzog, sémiologue et enseignant à l'Université pour l'aider à le décrypter.
L'enquête de routine va devenir très vite compliquée et tous deux ne seront pas au bout de leur surprise et le lecteur avec eux...
Ils vont devoir visiter les milieux fréquentés par la victime, renouer les fils de l'histoire pour retrouver les dernières personnes à avoir vu Roland Barthes vivant. Ils vont partir sur la piste d'un mystérieux manuscrit contenant des informations top secrètes. Cela les mènera jusqu'en Italie et dans un club un peu spécial où les joutes oratoires ne se terminent pas forcément très bien pour les perdants (heureusement nous sommes dans une fiction).
Et si la cause de la mort était ailleurs ? S'il s'agissait d'une fonction aux pouvoirs magiques capable de changer le monde, "la septième fonction du langage", une fonction à ne pas mettre entre toutes les mains, car capable de "convaincre n'importe qui de faire n'importe quoi dans n'importe quelle situation", une fonction très intéressante donc pour nos hommes politiques...qui permettrait de manipuler les populations facilement, de séduire le public, de l'amener à voter pour telle ou telle personne. Effrayant non ?!
Ce polar en BD ne manque pas d'originalité, ce que j'avais également trouvé pour le roman. Il ne faut pas croire qu'il se lise facilement car les notions de sémiologie restent ardues, mais si on se concentre un peu, on apprend plein de choses que j'avais oublié depuis ma lecture du roman, je l'avoue. Le polar utilise en effet des armes redoutables qui ne sont pas de réelles armes mais des joutes verbales qui peuvent dérouter plus d'un lecteur.
C'est cependant, malgré ce bémol, une bande dessinée captivante et distrayante et un bon polar qui nous fait voyager dans le monde des intellectuels de l'époque, et de certains hommes politiques, avec beaucoup d'humour, des situations décalées et du suspense.
Il faut savoir que Roland Barthes a réellement défini six fonctions du langage qui sont expliquées en détails dans la BD page 48 (et dans le roman bien entendu). La septième sur fond de complot, est totalement fictive, je vous rassure !
Ce qui fait le régal de cette BD, c'est le fait que les personnages sont aisément reconnaissables, superbement croqués avec humour, même si un peu caricaturaux. Les intellectuels et les hommes politiques des années 80 ne nous apparaissent pas forcément sous leurs meilleurs jours, mais ils sont en action, tels que nous les connaissons. Le dessin d'Olivier Perret est plein de vivacité, de finesse et de réalisme et ses personnages aux mines patibulaires sont à la fois drôles et bien campés.
J'ai aimé aussi que les auteurs apparaissent dans certaines vignettes, en voix off...pour nous prendre à témoins.
Une lecture que j'ai apprécié. Il n'est pas nécessaire de lire le roman pour découvrir cette BD, mais peut-être en aurez-vous envie ensuite ?
Merci encore une fois cette semaine à l'éditeur, à Babelio et à sa Masse Critique exceptionnelle pour cet envoi.