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A côté de la petite chapelle Saint-Michel que je vous ai montré ICI, qui se situe au cœur du cimetière de la ville de Lambesc, se trouve le tombeau d'un personnage célèbre dont j'avais entendu parler pour la première fois lors d'une exposition locale organisée lors des Journées du Patrimoine en 2018 : c'est le tombeau de la famille Dury, restauré en 2010 par l'Association des Amis du Vieux Lambesc.
J'ai bien entendu cherché à en savoir plus sur ce personnage célèbre.
Il y a 200 ans, en mai 1822 exactement naissait en Provence, Léon Dury, une personnalité très importante pour le Japon, mais quasiment inconnue en France sauf dans la petite ville de Lambesc, berceau de sa famille, qui comptait environ 3800 habitants en ce temps-là.
Un peu d'histoire s'impose (toutes les informations citées ci-dessous proviennent du site du Consulat Général du Japon à Marseille ; du site de la Mairie de Lambesc ; et des panneaux informatifs photographiés par mes soins, lors de l'exposition Léon Dury qui a eu lieu en 2018).
Diplômé de médecine, il commence par faire ses preuves lors de la terrible épidémie de choléra qui sévit dans tout le bassin méditerranéen, gagne la ville de Marseille par le port maritime, et fait 145 000 victimes en totalité.
Ensuite, la Guerre de Crimée éclate et Léon Dury se porte volontaire. Vous pouvez lire les détails sur l'extrait ci-dessous.
Il part donc en Crimée comme chirurgien de 1853 à 1856 et sera décoré de la Légion d’honneur par les autorités françaises.
Il retourne au Japon pour devenir directeur de l'hôpital de Hakodate, mais apprend à son arrivée que la construction de l'édifice est annulée. Il devient alors Consul de France à Nagasaki et en plus de ses missions, il décide de commencer à enseigner le français aux Japonais et crée, en 1865, à Kyoto, une école privée de langue française à laquelle il va se consacrer pleinement après la fermeture du Consulat.
Léon Dury et ses élèves japonais
Photo (C) RMN-Grand Palais (MNAAG, Paris) / Thierry Ollivier
Paris, musée Guimet - musée national des Arts asiatiques
http://www.guimet.fr/fr/
[https://art.rmngp.fr/fr/library/artworks/leon-dury-et-ses-eleves-japonais]
En 1874, il est nommé professeur de langue et de littérature française à l’Université de Tokyo.
Aujourd'hui, Léon Dury est reconnu car il a contribué à la modernisation du Japon au milieu du XIXe siècle et à son ouverture sur le monde et sur l'Europe, au début de l'ère meiji. Il a organisé des échanges entre les deux pays, en proposant à des tisserands japonais de venir jusqu'en France pour se perfectionner à Lyon pendant un an, à la technique de tissage de la soie qui deviendra plus tard célèbre à Kyoto et largement diffusée (Nishi-jin, tissu vieux de plus de 1000 ans). Ils parviennent à ramener au Japon une vingtaine de métiers à tisser Jacquard...leur permettant d'enseigner dans tout le Japon leur usage et modernisant ainsi les techniques ancestrales de tissage. Le Jacquard va peu à peu remplacer le métier à tire qui était utilisé.
Il permet aussi à de jeunes étudiants de venir s'initier aux technologies et aux sciences françaises, en avance par rapport au Japon à cette époque. Vous pouvez lire les détails de l'accord ci-dessous. Pendant leurs vacances, les jeunes étudiants étaient accueillis dans la maison de Léon Dury à Lambesc.
Le gouverneur choisit huit domaines, la teinture, le textile, le filage du lin et le travail de la soie, la porcelaine, la machinerie, l'industrie minière, la peinture et le dessin comme sujets d’études. Le préfet de Kyoto ayant une confiance absolue en Léon Dury, il lui confia tout ce qui concernait cette mission, le choix des domaines d’études, la sécurité, la garde et les fonds des huit étudiants. Dury et huit étudiants arrivèrent d’abord à Marseille. Là, les huit jeunes de Kyoto étudièrent d’abord le français dans un établissement scolaire, qui est actuellement le Lycée Thiers, puis se dispersèrent pour étudier leurs domaines de spécialité. Cette période d’études dura entre trois et quatre ans.
En 1877, Léon Dury quitte définitivement le Japon. Il est récompensé de l'Ordre du Soleil Levant en 1885 et est nommé Consul honoraire du Japon à Marseille où il restera de 1888 jusqu’à sa mort en 1891.
Sur le fronton de sa tombe, sur un écusson en bas-relief, on peut lire : "Les Japonais reconnaissants".
La porte est encadrée par deux colonnettes ornées de chapiteaux sculptés. Elle est surmontée d'une rosace.
Autres détails...
Et voici, l'intérieur photographié à travers la grille.
A noter que dans le tombeau est inhumé Utahara Jusaburo, un des étudiants japonais venu étudier en France et qui tomba malade et mourût en 1882 alors qu'il était élève à l'Ecole des Mines de Saint-Etienne.
Photo internet /(https://www.marseille.fr.emb-japan.go.jp/itpr_fr/relations_00001.html)
Une biographie sur ce grand personnage, intitulée "Il aima le Japon et le fit aimer, Léon Dury (1822-1891)", vient de paraître, à l'occasion du bicentenaire de sa naissance. Elle est écrite par une jeune historienne lambescaine passionnante, Sandrine Chabre que j'ai eu l'occasion d'écouter lors de conférences dans la région. Elle s'intéresse particulièrement aux personnages célèbres "oubliés" et bien entendu à l'Histoire de sa région. Vous pouvez en savoir plus ICI.
Pour terminer, pour les curieux, qu'ils soient japonisants ou provençaux, je vous invite à consulter le site ci-dessous.
Léon DURY, bienfaiteur du Japon ? - Meiji 150ème anniversaire
Parmi tous ces Français bien plus connus au Japon que dans leur propre pays (nous en voulons pour preuve objective qu'ils ont une page Wikipédia à leur nom en japonais mais pas en français...) ...
Voilà mon article du jour est terminé ! J'espère que je n'ai pas été trop longue. Je vous dis donc comme prévu à vendredi...