Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...

Lettres d'Ogura / Hubert Delahaye

L'Asiathèque, 2017

L'Asiathèque, 2017

Juste après six heures, le soleil est passé par-dessus la montagne et la lumière est entrée dans la vallée.
Les grenouilles se sont tues un moment, attentives, et le milan noir s'est envolé pour en attraper une ou deux. Il a une nichée à nourrir. Son cri a donné le signal aux oiseaux, aux insectes et aux plantes, et la vie du jour a commencé. Les fleurs ont appelé les abeilles, les rossignols ont repris leurs gammes et les premières cigales des pins leur chanson...

Ainsi commence ce roman...

Le lecteur est immédiatement transporté dans une vallée, en pleine nature, non loin de Kyoto. Là, il existe un village perdu, un peu hors du temps, où les habitants vieillissent dans la solitude : c'est Ogura. Subsistent les membres de quelques familles, quatre exactement, autrefois nombreuses.

Les vieilles femmes sont courbées à force d'avoir travaillé inlassablement, au fil des saisons, dans les rizières. La nature resplendit et prend une place considérable dans la vie des anciens qui remplissent leur quotidien de tâches humbles, mais nécessaires, tout en respectant les traditions d'autrefois, des traditions dont les jeunes, partis vivre en ville, n'ont plus le temps de s'encombrer : vénérer les ancêtres en priant devant l'autel tous les jours, laisser sa porte close une fois la nuit tombée, mais non fermée à clé, parler du temps qu'il fait et de la mousson avec ses voisins, n'entrer chez les autres que si la personne visitée le demande, veiller les uns sur les autres sans en avoir l'air.

Pas besoin d'horloge, la vie est rythmée par les annonces du haut-parleur qui informe la population, des risques à venir...

Le lecteur découvre cette vie quotidienne paisible, à travers le regard et les ressentis d'une vieille femme d'une grande sagesse. L'auteur nous parle de son quotidien avec beaucoup de tendresse et d'humour. Son mari a fait la guerre et ses filles sont parties à la ville. Elle profite avec sérénité des derniers jours de sa vie, chez elle, sans angoisse, sans se plaindre, sans reprocher à ses proches sa solitude. C'est elle qui en vient à rassurer ses filles, inquiètes et culpabilisées de s'être autant éloignées d'elle, lorsque une d'entre elle l'appelle au téléphone, ou vient lui rendre visite. 

J'ai aimé la douceur qui se dégage de ces pages poétiques. Il ne s'agit pas de "lettres" à proprement parlé mais de tableaux successifs, dépaysants pour nous occidentaux, mais qui décrivent à merveille, la vie dans les campagnes, au Japon.

L'écriture, tout en finesse est épurée. L'essentiel est dit en peu de mots qui suffisent à créer une ambiance particulièrement agréable et légère. La traduction de certains mots, le rappel de certaines traditions, comparées à celles du monde occidental, la découverte des petits secrets du village, l'humour qui transparait à travers certains passages, font de ce court roman, un magnifique instant de lecture, zen et passionnant. 

 

Vous trouverez sur ce blog, du même auteur.

- "Histoires de mers" présenté ICI ;

- De thé et d'amour, présenté en juin dernier ICI

Bonne lecture !

Au Japon, les mentalités sont marquées par une capacité phénoménale à oublier le passé. Le passé, c'est vieux et ce qui est vieux, on le jette.

Une présence n'est jamais innocente, même celle d'un chat. Comme dans tout être, une puissance invisible en émane qu'on ne perçoit pas forcément mais qui est bien là.

Retour à l'accueil
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article