Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...
Elle [Madeleine] se consolait en constatant que la maison avait repris une vie à peu près normale, du moins, autant que pouvait l’être un lieu qui voyait cohabiter un enfant à demi paralysé, une nurse qui ne parlait pas un mot de français, un journaliste appointé pour ne rien faire, une dame de compagnie qui avait tapé dans la caisse plus de quinze mille francs et l’héritière d’une banque familiale qui n’avait aucune idée de ce qu’étaient un seuil de cession ou une valeur nominale de créance.
Couleurs de l'incendie est le second volet de la trilogie de Pierre Lemaitre, intitulée : "Les enfants du désastre". L'auteur avait obtenu le Prix Goncourt en 2013, pour le premier tome "Au revoir là-haut" que je vous ai présenté ICI.
La Grande Guerre est terminée. Nous sommes en février 1927, Marcel Péricourt est mort et le Tout-Paris, y compris le président de la République de l'époque, Gaston Doumergue, s'apprêtent à assister à ses obsèques. Sa fille Madeleine est à présent la seule héritière de son empire financier, la banque Péricourt depuis que son frère Edouard, héros de l'opus précédent, s'est suicidé. Elle n'y connait rien en affaire et se retrouve désemparée.
Le jour de l'enterrement alors que la cérémonie va commencer, son fils Paul, pour une raison inconnue que le lecteur découvrira bien plus tard, se jette du second étage et tombe sur le cercueil de son grand-père. Il restera paralysé. Madeleine qui déjà ne comprenait rien aux affaires, ne va plus se consacrer qu'à son petit garçon, espérant le voir reprendre des forces et accepter sa nouvelle vie en fauteuil roulant. Elle n'a pas compris son geste et il ne veut rien lui dire de plus. Pour l'aider elle se décidera à employer une nurse d'origine polonaise, emplie d'énergie, qui n'apprendra jamais un mot de français.
Aidée par sa jeune "amie" (qui s'avèrera plus tard faire partie du "complot"), elle se détache peu à peu des contingences matérielles et va lâcher du lest en faisant confiance à ceux qui l'entourent, en particulier à Gustave Joubert, une erreur qui causera sa ruine car elle est entourée d'escrocs en tous genres, dont son oncle, Charles Péricourt.
Déclassée et désormais bien seule, elle va tout faire pour se reprendre et surtout se venger de ceux qui ont causé sa perte, ce qui ne sera pas facile dans une Europe en crise et en proie à la montée du nazisme. Pour cela, dans une société entièrement dominée par les hommes, elle va devoir déployer des trésors d'intelligence, dont son père, s'il était encore en vie ne l'aurait jamais cru capable...
Charles avait parfaitement rempli sa mission vis-à-vis de Madeleine, il avait utilisé tous les arguments que Gustave lui avait fournis, il avait ébranlé la citadelle Péricourt. Grâce à lui, Madeleine n'avait plus confiance en Gustave et s'apprêtait à commettre un acte dramatique pour elle, mais qui allait les enrichir au-delà de toute espérance...
Certes, elle avait été mal conseillée, mais elle avait suivi les recommandations sans s'interroger suffisamment, tout cela était sa faute. Elle avait hérité d'une fortune qu'elle avait été incapable de conserver, voilà la vérité...
Elle avait reçu une éducation de femme. Son père même s'il l'avait beaucoup aimée, l'avait élevée dans l'idée que pour les grandes choses, elle ne serait jamais à la hauteur. Perdre la fortune qu'il lui avait léguée confirmait son jugement.
J'avais été marquée par le précédent opus, encensé par les critiques et que moi j'avais trouvé choquant même si je sais bien qu'il nous présentait la réalité de l'époque, il me touchait de trop près.
J'hésitais du coup à lire celui-ci...mais j'ai été agréablement surprise.
Pourtant il commence aussi par une scène choc. Mais ensuite le lecteur a le temps de faire connaissance avec tous les personnages qui vont peu à peu entrer en scène. Chacun d'eux va trouver sa place dans un grand puzzle qui débouche sur le complot machiavélique qui va amener Madeleine à la ruine, puis peu à peu, le lecteur la voit se relever et à son tour, mettre en place sa terrible vengeance. Personne ne sera oublié !
La crise des années 30, je ne la connaissais qu'à travers mes cours d'histoire. Là, l'auteur nous plonge dans une ambiance très parisienne qui n'est pas celle des petites gens de nos provinces. J'ai beaucoup aimé la façon dont l'auteur nous décrit la presse de l'époque, les journalistes exploités et déjà en quête de liberté. Mais bien évidemment, on assiste aussi à la montée du nazisme, glaçante quand on sait ce qui arrivera ensuite.
L'auteur s'amuse beaucoup et le lecteur le sent.
Peut-être me suis-je habituée à son humour cynique et ravageur, qui se retrouve à chaque page ?
En tous les cas, j'ai lu ce tome avec grand plaisir. Il est vrai aussi que le sujet m'a moins touché, et que je ne suis pas de ce monde-là ! Ceci explique peut-être le fait que je ne me sois attachée à aucun des personnages, sauf au petit Paul cependant.
J'attendrais tout de même un peu pour découvrir le troisième opus, "Miroir de nos peines" que sans doute vous êtes nombreux à avoir déjà lu.
Un pseudonyme. Tout le monde pensera que, pour ne pas vouloir signer, c’est une sommité qui s’exprime ! Et ne l’oubliez pas, les lecteurs aiment les horoscopes, alors choisissez un nom qui leur évoque la sagesse supérieure.
C’est ainsi que début août parut, en première page du « Soir de Paris », la première chronique signée « Kairos ».