Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...
Et le son ? Il n'y a pas le son ?
- Bien sûr que si. Il suffit de monter le volume.
Papa avoua cependant que le réglage du son dépassait ses compétences. Après tout, il dirigeait une agence de pompes funèbres. Rien dans son métier ni dans ses courtes études ne l'avait préparé à l'installation d'un récepteur de télévision. Ce fut maman, plus dégourdie, qui identifia parmi les trois molettes de l'appareil celle qui agissait sur le son.
Ici aucun risque d'éboulements ni d'avalanche, guère à craindre des humeurs de l'eau, ni des convulsions du sol. Voilà, sans doute, ce qui vaut au Luxembourg son classement flatteur dans la liste des nations les moins exposées aux catastrophes naturelles...
Si donc les Luxembourgeois ont peu à craindre des colères de la Terre et de l'hostilité des éléments, ils peuvent légitimement redouter le zèle de leur administration. Notre famille, devait l'apprendre à ses dépens.
Papa m'avait dit que notre métier, c'était de nous occuper des morts. Mais une chose était le mot ; une autre, le mort en vrai. Qu'est-ce qu'on pouvait faire, de ce monsieur dans sa boîte ?
La coïncidence a fait qu'il y a quelques jours je suis tombée par hasard en médiathèque sur ce roman un peu particulier dont j'avais entendu parler sur des blogs. Connaissant l'auteur de nom, mais ne l'ayant jamais lu, je l'ai bien évidemment emprunté tout de suite.
Le roman commence d'une manière fort plaisante et dynamique en juillet 1969, alors que le monde entier s'apprête à visionner les premiers pas de Louis Armstrong sur la lune. Toutes les familles ont fait installer la télévision et il en est de même dans celle de Gabriel, qui n'est pas encore né.
Ce soir-là, l'orage est terrible et son père Robbe monte sur le toit pour réparer l'antenne qui s'est couchée à cause du vent, malgré les protestations de Vala, sa femme. Il est foudroyé... Suivront des semaines de souffrances, une longue convalescence et un handicap qui anéantira à jamais moralement, cet homme solide et volontaire. Gabriel sera conçu pendant sa convalescence dans des circonstances que je vous laisse découvrir.
Il arrive dans une drôle de famille, c'est le moins qu'on puisse dire. La famille Spautz tient une agence de pompes funèbres dont les locaux se situent dans...leur propre maison. Tout jeune enfant, Gabriel voit tout, entend tout, même s'il ne comprend pas tout. La maison est organisée pour recevoir les familles, le sous-sol pour faire la toilette des morts, et les parents qui ne peuvent pas toujours le faire garder, l'emmènent souvent avec lui, comme d'ailleurs sa sœur plus âgée.
En fait, le père ne rêve que de le voir reprendre l'affaire familiale qui est passée, raconte-t-il de génération en génération.
Mais Gabriel, n'a pas la vocation. Si pour Janelle, sa sœur, le métier est un métier comme les autres, pour lui, il n'en sera jamais ainsi. Sa sensibilité naturelle le porte à s'éloigner de la mort, qu'il côtoie depuis sa plus tendre enfance, et il n'a aucune envie d'être un jour à la tête de l'entreprise "Lumière-de-l'Est".
Alors que devenu adolescent, son père l'inscrit d'office dans une école spécialisée aux métiers funéraires, il taille les cours pour aller s'amuser comme c'est bien normal de le faire à son âge.
Mais là-bas, il va faire des découvertes étonnantes sur le passé de sa famille et découvrir que son père lui a depuis toujours menti sur l'histoire familiale...mais bien entendu je ne vais pas vous révéler de quoi il s'agit.
Dans nos civilisations occidentales parler de la mort est encore tabou, c'est bien vrai et ce livre m'a donc surprise par la légèreté avec laquelle l'auteur aborde le sujet.
Il y a en effet beaucoup d'humour dans ce roman : voir les choses à travers les yeux de Gabriel enfant, puis adolescent, change forcément le regard que l'on porte sur les événements et les descriptions parfois très précises des différentes opérations qui entourent la prise en charge des défunts.
Je n'ai pas aimé personnellement entrer à ce point dans les détails, que je connaissais pourtant, hélas, comme beaucoup d'entre nous. Je ne trouve pas d'ailleurs que ces détails apportent beaucoup à l'histoire.
Mais heureusement ce n'est pas le centre du sujet.
J'ai aimé par contre suivre Gabriel, le voir lutter pour se construire et trouver sa propre voie au sein de cette famille pas comme les autres. J'ai aimé ses questionnements. Je l'ai trouvé sympathique et attachant et le lecteur d'ailleurs développe beaucoup d'empathie pour lui au fil de l'histoire.
J'ai aimé les rebondissements qui nous révèlent la nature profonde du père et la véritable histoire familiale et ses secrets inavoués.
C'est un roman initiatique, bien écrit, décalé et intéressant qui m'a permis de connaître un peu mieux l'auteur, mais je pense que j'oublierai sans doute très vite ce roman, vu le sujet. Il m'a donné cependant envie de lire d'autres titres de l'auteur.
Bien que j'ai donc un avis mitigé sur cette lecture, c'était le jour ou jamais pour que je vous le présente, en ce jour des Morts, au lendemain de la Fête de la Toussaint, jour où nous pensons tous à ceux que nous aimons qui ne sont plus parmi nous, autrement que dans nos cœurs...
L'auteur Olivier Bleys a écrit une trentaine de livres, romans, essais, récits de voyage, bandes dessinées. Ses écrits ont été traduits dans une dizaine de langues et certains ont obtenu des prix littéraires. Il a un parcours intéressant et atypique. Il est élu Membre de la Société des Explorateurs français et effectue depuis 2010 un tour du monde à pied, par étapes.
Il a réalisé des carnets de marche multimédia pour la région Nouvelle-Aquitaine que vous pouvez découvrir sur le site ICI.
De plus, depuis 2014, il est Chevalier des Arts et des Lettres. Vous pouvez lire sa biographie complète ci-dessous.
Si vous ne voulez pas, vu le sujet, lire ce roman, ce que je comprends tout à fait, je suis bien certaine que vous en trouverez un autre à votre goût dans sa bibliographie.