Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...
Tu es venu chercher ta fille, et plutôt que de la ramener avec toi en Amérique, tu as décidé que Kalamaki serait sa terre pour toujours. Tu nous l'a confiée, et de ce don merveilleux, chacun d'entre nous te sera redevable à jamais...
Cet enfant porte en lui toute la douleur des hommes, se dit Kosmas. L'immense solitude et l'impossibilité désespérante de s'ouvrir à l'autre.
- Tu sais quand arrive l'heure de la consolation ?
Eliot resta figé, le yeux sur sa tasse de café.
- C'est lorsque tu te sens prêt à être blessé à nouveau. Rien ne dit que tu seras blessé. Mais tu dois être prêt à en assumer le risque.
C'est la première fois que je lis un roman de Metin Arditi alors que son nom figure dans mon petit carnet depuis très longtemps, et que j'ai vu passer de nombreuses chroniques positives sur cet auteur, sur internet.
Quand j'ai découvert celui-ci en médiathèque, et qu'en plus j'ai vu que le sujet était encore une fois sur l'autisme, un sujet qui m'intéresse beaucoup, évidemment je n'ai pas pu résister !
Le roman est découpé en courts chapitres et se lit très facilement.
Le lecteur part dans une île grecque, Kalamaki et ne sera pas déçu du voyage. Bien entendu la Grèce est dévastée par la crise, et au loin l'Europe rend la vie des habitants encore plus difficile. En peu de temps, ils perdent tout ce qu'ils avaient réussi à construire.
Le lecteur se rapproche en particulier de trois d'entre eux.
D'abord il y a la famille formée par Maraki, une mère divorcée et son fils Yannis, qui est autiste.
Le petit garçon se rassure au quotidien en mesurant et en comptant mille choses, le nombre de pêcheurs, la quantité de poissons pêchés par chacun, le nombre de personnes installées à la terrasse du café ou à l'intérieur...Il compare ensuite les résultats d'un jour à l'autre et fait preuve d'une mémoire étonnante. L'ordre du monde le rassure.
Sa mère a repris la pêche à la palangre, un boulot épuisant depuis que son propre père ne peut plus le faire. Il faut bien vivre... Mais depuis, elle a du mal à s'occuper comme elle le voudrait de son petit garçon.
Puis il y a Eliot, un architecte américain à la retraite, venu sur l'île douze ans auparavant, pour enterrer sa fille, victime d'un terrible accident. Il n'en est jamais reparti...
Il a tout d'abord voulu poursuivre les recherches effectuées par sa fille, sur un amphithéâtre antique, des recherches autour du Nombre d'Or. Il les a ensuite étendues à toute la Grèce.
Eliot propose à Maraki de s'occuper de Yannis. Il va non seulement s'attacher au petit garçon, mais l'intéresser à mille choses, au dessin, à la mythologie, à l'apprentissage de la lecture et de l'écriture...
En parallèle, la petite île est en émoi : un projet d'hôtel de luxe pour vacanciers est en cours, mené par Andreas le père de Yanis qui est maire du village. Ce projet doit voir le jour dans la plus jolie crique de l'île. Bien entendu tout le monde en mesure l'impact économique...
Un jour en triant les anciens mails de sa fille, Eliot découvre un projet qu'elle avait imaginé et qui lui apparaît bien utopique. Il s'agit de faire construire sur l'île une université prestigieuse. Il décide, pour contrer le projet immobilier qui d'après lui ferait perdre son âme à la petite île, de présenter ce projet à la commune...
Maraki a peur elle-aussi de l'impact de cet ensemble hôtelier, sur son fils qui n'aime pas changer ses habitudes, mais aussi sur les habitants et leur bienveillance habituelle et naturelle pour Yannis. D'ailleurs celui-ci a déjà peur quand il entend son père parler du projet. Il le symbolise comme une gigantesque pieuvre et ses tentacules...
Tandis que la population de l'île s'interroge, l'amitié qui est déjà présente entre Maraki et Eliot évolue, prouvant que la gentillesse et l'écoute de l'autre peuvent faire des miracles pour transformer la vie de chacun...
Voilà un roman remarquablement bien écrit, lumineux et qui fait du bien car il nous touche par sa générosité et son attention aux autres.
Voir la population s'interroger pour savoir s'il vaut mieux avoir de l'argent en exploitant le tourisme de masse ou bien au contraire favoriser l'insouciance et la beauté, est très intéressant.
L'autisme est abordé avec beaucoup d'humanité. L'intelligence du petit Yannis mais aussi les limites de sa compréhension face aux inéluctables changements du monde autour de lui, sont montrés de manière tout à fait réaliste.
Eliot nous apprend aussi beaucoup de chose sur le nombre d'or, utilisé par les anciens en architecture pour leur construction, mais aussi par la nature elle-même, un concept mathématique qui permet à l'harmonie de régner sur terre...et à l'homme d'appréhender sa beauté.
Merci à Eve qui m'a rappelé que si j'avais noté ce titre dans mon petit carnet de lecture, ce n'était pas pour rien et à Hélène qui avant elle, m'avait donné envie de le faire...même si elle avait émis quelques réserves au sujet de ce livre.
« L’enfant qui mesurait le monde » de Metin Arditi
Je vous présente aujourd'hui ce roman de Metin Arditi, un auteur francophone contemporain d'origine turque que j'apprécie particulièrement : Quatrième de couverture: Sur l'île de Kalamaki, Yan...
https://leslivresdeve.wordpress.com/2018/03/03/lenfant-qui-mesurait-le-monde-de-metin-arditi/
L'enfant qui mesurait le monde de Metin ARDITI - Lecturissime
♥ ♥ ♥ D e l'importance de se laisser surpendre par la beauté du monde A Kalamaki en Grèce trois destins vont se croiser : celui du petit Yannis, perdu dans son autisme, celui de sa mère Ma...
http://www.lecturissime.com/2016/10/l-enfant-qui-mesurait-le-monde-de-metin-arditi.html
- Je crois que c'est ça l'ordre du monde, tu sais, Yannis.
C'est quand tu ne peux pas savoir à l'avance comment les oiseaux vont crier, ou comment le meltème va souffler entre les pierres, ni quand la mer va s'écraser contre le parapet. Mais tu es heureux d'écouter ces bruits comme ils viennent à toi. L'ordre du monde, c'est quand tu es heureux. Même si les choses changent...
Nous sommes heureux tels que nous sommes. Nous n'avons pas appris à vivre autrement. Nous sommes libres. Nos parents l'étaient avant nous, et j'espère que nos enfants le seront à leur tour. Libres et heureux.