Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...
Quand il rentre en voiture, après la nuit tombée, une guirlande lumineuse en forme d'arbre installée par le restaurant lui tristement, au milieu des lumières clairsemées provenant des fenêtres des préfabs, renforçant encore l'impression de dénuement. Il ne sait pas combien de personnes qu'on appelle encore des réfugiés habitent là ; l'ensemble est resté un camp amélioré sans jamais devenir comme un nouveau hameau.
En fait, les opérations de décontamination ont un effet d'irradiation sur les ouvriers : c'est bien parce que l'irradiation est dangereuse que les travaux de décontamination sont effectués, mais si on craint l'irradiation, on ne peut pas faire les travaux de décontamination...
Devant une table de jardin, recouverte d'une nappe blanche, le marié et la mariée sont acclamés et applaudit par les parents et amis, près d'eux, puis les habitants des préfabriqués, rassemblés autour, sur plusieurs rangs...
Les jeunes mariés allument ensemble une énorme bougie en forme de cœur puis,sans façon, échangent un baiser.
Ce recueil contient six courts récits mettant en scène le quotidien des rescapés de Fukushima, après la catastrophe nucléaire et le tsunami qui ont ravagé le Japon en mars 2011.
Le premier récit débute en racontant la catastrophe, le lecteur se retrouve au milieu du chaos, puis le second se passe juste après et ainsi de suite au fur et à mesure que la vie reprend le dessus, que le temps passe et que l'espoir refait surface.
Ce sont de beaux récits authentiques, touchants, réalistes...et terriblement humains.
Le lecteur découvre...
Les silences (en particulier des politiques et spécialistes) qui n'ont pas permis aux survivants de comprendre l'ampleur des dégâts de la catastrophe nucléaire.
Le déni de toute une partie de la population qui ne veut pas se faire du souci pour quelque chose qu'ils ne voient pas (les radiations).
Les drames sous-jacents qui ont détruit des familles entières, aujourd'hui amoindries car amputées de plusieurs de leurs membres... Et les déchirements : certains ont voulu fuir et d'autres rester dans la zone affectée.
Pendant la lecture, nous partageons le quotidien de ces êtres en deuil, leur détresse et leurs doutes. Ils sont terriblement courageux et résolus, dignes et tellement vivants.
Nous rencontrons au fil des récits, des parents inquiets parce que leur fils travaille encore dans la centrale ; un moine qui a vécu le tsunami et en a miraculeusement réchappé. Ce dernier ne sait pas comment aider son père, car depuis ce jour-là, il a perdu la tête et récite des "soutras" en virevoltant sur lui-même toute la journée.
Nous croisons la route de cette jeune mère et de son fils qui se rendent au commissariat pour se soumettre à un test ADN, dans l'espoir de retrouver le père, un pompier disparu ; puis deux amies qui se retrouvent pour la fête des morts, après que l'une d'entre elles ait quitté subitement la région, son retour amenant d'un coup de multiples questions autour des radiations ; enfin un retraité participe bénévolement aux opérations de décontamination... il est gravement malade et se sait condamné.
Le dernier récit nous projette dans le futur lorsque des années après sur la montagne de déchets radioactifs (d'où le titre, "la montagne radieuse" !), un homme organise des visites guidés pour des touristes curieux.
Ce n'est pas un livre lourd à porter malgré la gravité du sujet.
L'auteur nous dévoile la vie de ces gens simples avec beaucoup de poésie et nous découvrons des êtres emplis de sérénité et qui ont une certaine philosophie de vie. Dans cet après-chaos, chacun trouve sa place...pour recommencer à vivre.
Ce sont des récits à la fois tristes et doux, lumineux et sombres...mais la vie est toujours là, bien présente. Il y a des chants de grillons et de cigales, des araignées d'eau, des mantes religieuses qui nous le prouvent...mais aussi un mariage, et beaucoup de solidarité et d'empathie.
Rien d'étonnant, car l'auteur est un moine zen qui vit à 45 km de Fukushima dans le temple de Fukuju où il est veilleur. Il a publié un "Journal de la catastrophe" et "Vivre à Fukushima" pour continuer à informer sur le quotidien des habitants des zones sinistrées.
Connu pour ses nombreux écrits, il a été récompensé en 2001, par le plus important prix japonais de littérature, le Prix Akutagawa pour "Au-delà des Terres infinies" (la traduction du titre original est " Des fleurs dans les Limbes" et vous pouvez le trouver sous ce second titre parfois).
L'auteur explique d'ailleurs dans sa postface, qu'écrire lui est apparu comme un besoin, impossible à refréner...On le comprend après avoir vécu ces événements, rien ne peut être comme avant.
Un livre indispensable pour réfléchir sur les problèmes posés par le nucléaire, à découvrir donc...
Les récits rassemblés ici ont tous été écrits en plein milieu de la terrible transformation qui a affecté le réel après la catastrophe du 11 mars.
(…)
il s'est avéré qu'écrire des romans m’était tout aussi indispensable pour vivre que respirer, quels que soient les taux de radioactivité relevés dans l’air.
Ce recueil entre encore sans que je l'ai voulu en le choisissant, dans le challenge de Philippe "Lire sous la contrainte"...
Le titre du recueil devait être...