Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...
A ce moment-là, alors que je disais adieu à ma jeunesse, je me rendis compte à quel point je l’avais aimée.
Avis de l'éditeur sur la 4ème de couverture :
En Corée du Sud, dans les années soixante. Chun et son copain Inho abandonnent les cours pour vivre dans une grotte puis faire l’été une grande virée dans leur pays encore marqué par l’occupation japonaise et la guerre. De retour à Séoul, ils reprennent leurs études, forment un cénacle avec leur nouvel ami, le peintre Chang Mu, se retrouvent tous au café Mozart. Chun et Mia entament une relation amoureuse qui les entraîne vers l’île de Cheju. Mais Mu meurt de la tuberculose et Chun est arrêté pour avoir manifesté.
En prison il rencontre "Lieutenant" avec qui il part travailler sur des chantiers et en mer. C’est alors qu’il découvre, par une belle nuit, l’"étoile du chien qui attend son repas", autrement dit Vénus.
Enfin, après avoir voulu devenir moine et rescapé d’une tentative de suicide, il est appelé sous les drapeaux.
Ainsi ce beau périple initiatique à plusieurs voix, où s’entremêlent premières amitiés et amours, recherche spirituelle, aspiration à la liberté, se termine avec ironie par le départ pour le Viet Nam du principal narrateur, enrôlé pour cette guerre américaine qui n’est pas la sienne.
Le roman est traduit du coréen par Jeong Eun-jin et Jacques Batilliot.
Nous sommes en 1960 en Corée.
Chun, le narrrateur principal est sur le quai de la gare : il va partir pour le viêtnam faire une guerre pour laquelle il ne se sent pas concerné.
Mais avant de partir, il tient à dire au revoir à sa mère qu'il aime profondément, à son jeune frère encore au collège et à tous ses amis qu'il ne reverra plus pendant longtemps...
Et les souvenirs de sa jeunesse l'assaillent...
Il se remémore ses camarades de lycée, la perte d'un de ses amis d'alors, tombé sous les balles lors d'une manifestation, les soirées où les jeunes lycéens se retrouvent ensemble pour boire et refaire le monde dans un café du centre ville, le café Mozart...
Mais alors que certains d'entre eux poursuivent leurs études sans problèmes, Chun, rebelle à toute autorité, et considéré comme un être à part, à la fois indiscipliné et rêveur, parce qu'il aime avant tout passer son temps à lire, décide de quitter le lycée pour vivre sa vie et faire le tour du pays qu'il ne connaît pas.
Dans une lettre magnifique qu'il écrit à son professeur, responsable de la classe cette année-là, il expose ses motivations et sa propre vision de l'apprentissage et, sans demander l'avis de sa mère, il quitte le lycée pour aller quelques temps s'installer dans une grotte avec son ami Inho.
La sensation paisible que me procurait le vent en effleurant mes sourcils, la procession des nuages aux formes changeantes, les jeux de couleur, de densité, de lumière et d'ombre que créaient les rayons de soleil en se posant sur la surface des choses... ces sensations m'ont paru enrichir ma vie plus que les six heures de cours du matin et de l'après-midi où je suis assis dans ma classe.
Mais après ce temps de retraite spirituelle et de réflexion, les jeunes gens partent explorer le pays...
Les découvertes sont nombreuses : la vie paysanne est rude et éloignée de toute modernité. Mais c'est la découverte de la vie ouvrière qui sera, au cours de ce périple initiatique, une véritable révélation pour Chun...
Il me fallut attendre l’âge de vingt ans pour sortir des livres et prendre conscience de toute l’énergie qu’exigeait la dure vie de travailleur.
C'est un roman à plusieurs voix où, tour à tour, Chun et ses amis prennent la parole pour évoquer, avec beaucoup de nostalgie, leur jeunesse, leur vie à l'école, leur attirance pour les filles, les traditions, et leurs doutes...
Dans ce roman largement autobiographique, l'auteur de "Princesse Bari", roman que j'avais beaucoup aimé, et chroniqué sur ce blog, nous montre la jeunesse coréenne de l'époque.
Une jeunesse sans espoir d'avenir, prise entre traditions et modernité, désireuse de s'émanciper mais complètement enfermée dans l'enfer disciplinaire des institutions scolaires quasi militaires...
L'uniforme y est certes de rigueur et se doit d'être impeccable, mais les notes et le classement de chacun sont affichées dans le couloir à la vue de tous, la longueur des cheveux, mesurée au millimètre près, les poches des pantalons, cousues pour ne pas risquer d'y glisser les mains...et d'avoir ainsi une attitude irrespectueuse.
L'humour est cependant bien présent donnant un peu de légèreté à ce témoignage d'une jeunesse en perdition qui s'éloigne peu à peu de tous ses rêves et de l'espoir de vivre différemment de leurs aînés...
Il faut prendre le temps d'entrer dans la vie de cette jeunesse pour mieux la comprendre et prendre nos propres repères pour les suivre dans leur périple et leurs réflexions.
Le roman est étayée de nombreux extraits de haïkus et de poèmes coréens...mais aussi d'auteurs occidentaux.
L'écriture est magnifique, les descriptions à la fois réalistes et très poétiques. C'est un roman empreint de nostalgie, mais jamais triste pour autant.
L'auteur nous peint aussi par petites touches discrètes, la situation politique et sociale du pays.
Il nous montre un pays exsangue, en manque de repères, tout juste sorti de l'occupation japonaise en 1945, puis des suites de la guerre de Corée qui a duré de 1950 à 1953, un pays où la vie dans les campagnes comme dans les villes y est désespérée...mais où tous tentent pourtant de trouver une raison de vivre.
Encore un auteur à découvrir.
Je voudrais acquérir la capacité de créer, plutôt que d’apprendre par cœur.
L’auteur (site de l’éditeur) :
Né en 1943 en Mandchourie, Hwang Sok-yong traverse l’histoire contemporaine de la Corée tant par sa personnalité qu’à travers son œuvre.
Sa lutte contre la dictature et sa volonté de faire un pas vers la Corée du Nord le mènent en exil d’abord, puis en prison.
Chacune de ses publications nous fait découvrir une page de l’histoire de la Corée et une vision d’ensemble sur l’évolution de la société sud-coréenne par l’intermédiaire d’un récit palpitant.
Il est auteur de "L’Invité", "Chim-chong, fille vendue", "L’Ombre des armes", ainsi que de recueils de nouvelles tels que "La Route de Sampo ou Les Terres étrangères", le vieux jardin ou Princesse Bari"…