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Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...

Sarane Alexandrian, le théoricien n°2 du surréalisme

Sarane Alexandrian, le théoricien n°2 du surréalisme

(Lucien) Sarane Alexandrian est né à Bagdad (Irak) le 15 juin 1927 et mort  le 11 septembre 2009, à Ivry-sur-Seine. 

Son père, d'origine arménienne est docteur en stomatologie.  Il parle l'arabe, le français, l'anglais, le turc et l'arménien. Dès le début de sa carrière, il est nommé stomatologiste du roi Fayçal Ier. Par ses fonctions, il est très proche de la cour et de tous les notables.

Sa mère, Marguerite Colin, est française. Elle est la fille d'un entrepreneur parisien spécialisé en menuiserie.

Tout petit, Lucien a une nourrice indienne, qui le baptise Sarane, ce qui veut dire "prince" dans son dialecte indien.

 

Enfant, Sarane contracte la poliomyélite. Ses parents décident alors, pour faciliter les soins, de l’envoyer en France où il vivra désormais chez sa grand-mère maternelle. Il a six ans et poursuit sa scolarité à Paris, puis au lycée Condorcet où  il découvre les écrits de Baudelaire, Bataille et Breton.

 

L'été sa grand-mère passe les vacances à Peyrat-le-Château, près de Limoges.

Mais en 1939, c'est le début de la guerre et tous les deux décident de rester dans le village. Sarane fréquente alors le  lycée Gay-Lussac de Limoges où il devient pensionnaire.

 

Pendant les vacances d'été 1943,  il se lie d'amitié avec Raoul Hausmann réfugié lui aussi à Peyrat-le-Château avec sa famille.

Hausmann a fondé en 1918 le Club Dada de Berlin. Il tient à ce qu'on le considère comme Dadasophe ou directeur du cirque Dada. Il est anarchiste et non-conformiste, et il apprend la vie à Sarane, tout en l'initiant au dadaisme et au surréalisme.

 

C'est durant cette période que Sarane fait la connaissance des maquisards du Limousin et qu'il s'engage à leurs côtés, comme beaucoup d'adolescents de la région,  pour participer à des opérations de réception d'armes parachutées.

 

A la libération, il a 17 ans et publie ses premiers écrits dans un recueil collectif : des poèmes et un article sur Raoul Hausmann. Il retourne à Paris et y prépare son baccalauréat qu'il obtient en 1946.

 

Il entre alors à l'Ecole du Louvre où il étudie l'Histoire de la peinture, tout en poursuivant des études de psychologie à la Sorbonne.

 

Il publie son "autoportrait poétique" et un manifeste intitulé "Poésie et objectivité" (en 1947) dans la revue "Fontaine" qu'il adresse à André Breton. Deux jours plus tard celui-ci lui répond et ils se rencontrent à la Sorbonne lors de la conférence de Tristan Tzara sur le surréalisme intitulée "le Surréalisme et l'après-guerre".

 

Sarane rejoint alors le groupe surréaliste de Paris et devient « le bras droit d’André Breton ». Il prend part aux réunions animées dans les cafés et devient le porte-parole du mouvement.

 

La même année, il  participe à l'organisation de la VIIIème Exposition Internationale du Surréalisme à la galerie Maeght. Il dira "Ce fut la plus grande provocation poétique de l'après-guerre". Les œuvres de 86 artistes étaient réparties chez Maeght d'une façon surprenante. Des débats passionnés décidèrent de leur emplacement. Le catalogue fit scandale...

Pendant tout l'été, cette exposition attira une affluence de curieux et essuya les insultes de la presse.

 

André Breton lui confie la direction du secrétariat de Cause (l'organe de liaison des groupes surréalistes internationaux), avec Georges Henein et Henri Pastoureau, pour répondre à l’afflux des jeunes candidats venus du monde entier dans le groupe surréaliste

 

C'est à cette époque, qu'aux côtés d'André Breton, Sarane Alexandrian dut affronter la crise entre le groupe de Paris et le groupe de Bruxelles (qui avait rallié le très stalinien Parti communiste belge).

Sarane Alexandrian avait un avis tranché sur la politique : "La révolution poétique et la révolution politique n'ont rien à faire ensemble. Elles n'ont pas les mêmes objectifs ni les mêmes moyens".

Il affirmera : "Ce ne sont pas aux poètes de s'engager dans la politique, ce sont aux politiciens de s'engager dans la poésie."

 

Mais au delà de sa rencontre avec André Breton, c'est celle de Victor Brauner qui va être la plus marquante. Chez ce peintre d'origine roumaine, réfugié à Paris, de nombreux poètes se réunissaient... Ils forment ensemble en 1947, le contre-groupe H (d'après le poème H d'Arthur Rimbaud).

Puis le groupe crée la revue "Néon" qui paraîtra en janvier 1948. Claude Tarnaud, Henri Heisler, Véra Hérold et Stanislas Rodanski font partie des rédacteurs.

 

Sarane publie un manifeste intitulé  "L'Économie poétique". André Breton le félicite. La confiance d'André Breton en Sarane est si grande qu'il l'incite à répondre à sa place dans "La Gazette des lettres". C'est à la suite de cette intervention que Sarane Alexandrian sera appelé, dans Les Cahiers du sud, "le théoricien n°2 du surréalisme", et "le bras droit d'André Breton" dans une émission de Jean Tardieu à la radio.

 

Il devient alors le chef de file de la jeune garde surréaliste qui comprend, Stanislas Rodanski, Claude Tarnaud, Alain Jouffroy, Jean-Dominique Rey… tous novateurs. Ces jeunes s'opposent aux orthodoxes du mouvement, en situant le surréalisme «au-delà des idées » et en accordant la priorité au « sensible».

 

Mais...dans le courant du mois d'octobre 1948 André Breton apprend le suicide du peintre surréaliste américain d'origine arménienne, Arshile Gorky suite à la liaison que le peintre Roberto Matta a eu avec la femme du défunt. "Exclu pour disqualification intellectuelle et ignominie morale" fut la sanction de Breton et du groupe surréaliste à l'encontre de Matta. Mais Victor Brauner et Sarane Alexandrian s'y opposent et refusent l'exclusion de Matta : ils se dissocient alors du groupe surréaliste.

C'est la rupture. Mais Sarane ne cessera jamais d'admirer le maître fondateur du surréalisme.

 

 

Au "contre-groupe H" succède le "Groupe infini" entre 1949 et 1966 qui combattra l'esprit sectaire pour favoriser un esprit de curiosité universelle et surtout la liberté de penser.

En 1953, il rencontre Gherasim Luca, un poète roumain condamné à l'exil par le régime de son pays.

 

En 1959, Sarane Alexandrian se marie avec le peintre Madeleine Novarina. Ils s'étaient rencontrés en 1948, sans se douter ni l'un ni l'autre, qu'une liaison amoureuse passionnelle se nouerait entre eux quelques années plus tard.

Madeleine Novarina deviendra son égérie et sa première lectrice.

Après une maladie grave, Madeleine Novarina meurt le 8 novembre 1991.

 

Sarane délaisse alors la poésie et se tourne vers l'écriture de romans (ses "aventures mentales") et de monographies sur l'art. Il écrit aussi de nombreux  essais.

Il n'écrit plus de poésie mais toutes ses fictions sont des poèmes en prose.

 

De 1962 à 1974, il devient critique d'art successivement à "l'Œil", "Arts", et "Connaissance des Arts". Il est aussi critique littéraire à "l'Express" de 1975 à 1980.

 

En 1995, il fonde avec Alain Jouffroy et Jean-Dominique Rey la revue "Supérieur Inconnu" (dont le titre fut inspiré par Breton en 1948). Cette revue trimestrielle s'interrompt en 2001, avant d'être relancée en 2005. Elle comprendra 30 numéros de 1995 à 2011.

Cette revue, autant ouverte à la littérature qu'aux arts plastiques, met à l'honneur dans chaque numéro un écrivain méconnu du public et de la critique.

 

Sarane Alexandrian restera actif jusqu'au dernier jour. Il décède le 11 septembre 2009 des suites d'une leucémie.

 

En plus de la cinquantaine de livres publiés, Sarane Alexandrian a laissé plusieurs livres inédits... et son sourire.

 

 

 

 

La bourse Alexandrian d'un montant de 10 000 € est décernée chaque année à un écrivain, un éditeur, un directeur de revue, ou à une compagnie théâtrale par la Société des Gens de Lettres (SGDL)

 

Écrivain, essayiste, critique d'art et critique littéraire, Sarane Alexandrian a écrit vingt-quatre livres sur l'art, quatorze essais philosophiques et littéraires, six romans, deux recueils de nouvelles et dirigé les revues Néon et Supérieur Inconnu.

 

Il est considéré comme un poète même s'il n'a jamais publié un recueil de vers (seulement cinq poèmes en 1945, dans une Anthologie intitulée "Couronnes de vent".) car "la poésie est avant tout une manière de vivre, non d'écrire" ["Sarane Alexandrian ou Le grand défi de l'imaginaire", écrit par le poète, essayiste et critique littéraire, Christophe Dauphin].

 

 

Bibliographie (d'après le site du Printemps des Poètes)

 

Essais

  • La Sexualité de Narcisse, Le Jardin des Livres, 2003.
  • La magie sexuelle, La Musardine, 2002.
  • Soixante sujets de romans au goût du jour et de la nuit, Fayard, 2000
  • L’Aventure en soi Autobiographie, Mercure de France, 1990.
  • Histoire de la littérature érotique, Seghers, 1989.
  • Histoire de la philosophie occulte, Seghers, 1983.
  • Le Socialisme romantique, Seuil, 1979.
  • Les Libérateurs de l’amour, Seuil, 1977.
  • Le Surréalisme et le rêve, Gallimard, 1974.
  • André Breton par lui-même, Seuil, 1971.

 

Écrits sur l'Art

  • Max Ernst, Somogy, 1986.
  • Hans Bellmer, Filipacchi, 1976.
  • Marcel Duchamp, Flammarion, 1976.
  • L'Art surréaliste, Fernand Hazan, 1969.
  • Les dessins magiques de Victor Brauner, Denoël, 1965.
  • Victor Brauner l'illuminateur, Cahiers d'art, 1954.
     

Textes et préfaces

  • Préface à Musculatures de Nathalie Gassel, 2001, (Le Cercle)
  • Préface à Erotica de Michel Perdrial, 1999, (Editions du Chardon)
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