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Le tian est à la fois un contenant, l’ustensile de cuisine, très utilisé dans le sud de la France, c'est-à-dire un simple plat à gratin en terre ou maintenant en terre vernissée et en couleur, et son contenu, c'est-à-dire, le plat à déguster...
Il est devenu une spécialité de la cuisine provençale.
Ce mot "tian", qui existe depuis 1803, vient d’un ancien mot provençal (le tion) issu du grec tegamon qui signifie "poêle à frire" c’est-à-dire "bassin de terre" ou "plat en terre". Cette appellation est apparue pour la première fois en France dans la région du Comtat Venaissin (Cavaillon, Carpentras, Vaison-la-Romaine), puis s’est propagée à travers toute la Provence, jusqu'à atteindre la région de Nice.
Je me souviens que ma grand-mère en avait un, aussi grand qu’une baignoire de bébé. Elle y avait planté des fleurs. En effet à l’origine, le tian n’est autre qu’une bassine à tout faire !
De forme conique et évasée vers le haut, plat à la base pour être bien stable quand on le pose sur une table ou par terre, le tian traditionnel était souvent en poterie de Salernes (dans le Var).
Il servait à l'origine, de bassine pour laver les légumes, pour faire la petite lessive quotidienne, ou autres usages domestiques, à l’époque où l’eau courante n’existait pas toujours dans les maisons et, où la pile (l’ancien évier en grès ou granit que l'on trouvait dans les maisons de Provence !) n’était pas encore entrée dans toutes les maisons.
Les plus riches en avait plusieurs (un pour chaque usage) ce qui n'était pas le cas des foyers modestes.
Les tians n'ont jamais d'oreilles. On les attrapait grâce à leurs rebords épais.
Le tian se posait tout simplement sur la table, ou par terre, et pesait lourd (« comme un âne mort » !).
Le modernisme a amené ensuite, pour le remplacer, les bassines en zinc, puis émaillées, et ensuite en plastique que nous connaissons tous.
Après la forme haute qui servait de bassine, est apparue le tian plus bas, de forme et couleur variée que l'on connait aujourd'hui, et qui sert d'ustensile de cuisine.
C’est l’été quand il y avait trop de légumes au jardin, que les cuisinières prenaient leur plus grand ustensile pour y cuire tous les légumes ensemble…ou y faire les petits farcis !
Cuit au départ dans le four communal, puis dans celui du boulanger, le tian a poursuivi son histoire en cuisant dans le four familial (à charbon ou au bois), puis s’est modernisé dans nos fours à gaz et électrique.
On plaçait en effet le tian dans le four pour profiter de la chaleur résiduelle après la cuisson du pain. C’était donc un plat économique !
Je ne savais pas, quand j’avais 8 ans (l’âge où on commence à s’imprégner des coutumes familiales) et que ma grand-mère cuisinait avec amour des gratins dans ses superbes plats en terre de toutes formes, qu’elle me transmettait un vrai patrimoine.
Je la revois frotter d’ail les parois du tian. Y placer les légumes dans un ordre aléatoire et terminer par un peu de sel, des herbes aromatiques et un filet d’huile d’olive…puis on oubliait le plat à 70° parfois jusqu’au soir dans le vieux fourneau en fonte.
A l’heure où la chaleur commençait à s’estomper, on pouvait enfin le déguster sous la tonnelle ou à l’ombre du vieux figuier, en écoutant les dernières cigales chanter.
Pour réussir un tian, un seul secret, cuire les ingrédients le plus lentement possible : les saveurs se mêlent, les sucs se libèrent, et c’est un vrai régal de déguster ce plat simplissime et pas cher.
Chacun a sa façon de le faire. Les recettes varient d’un village à l’autre et chaque famille a sa recette préférée, au fur et à mesure qu'avance l'été.
Ce qui compte en fait, en plus des légumes de pleine saison, c’est l’amour que la cuisinière a mis pour le préparer…