Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...
Née au temps du communisme, dans un camp forestier du nord de la Chine et dans une famille modeste, Fei raconte son parcours extraordinaire.
Ses parents sont si pauvres à sa naissance qu'ils sont obligés de mentir sur sa date de naissance pour ne pas payer l'amende qui punit ceux qui ne respectent pas la loi sur l'enfant unique qui vient de paraître.
Sa petite enfance passée dans la forêt auprès de ses parents, est plutôt heureuse malgré le dénuement des siens.
Son frère Feng est élevé par les grands-parents paternels à Changchun.
Lorsqu'elle a 4 ans ses parents trouvent du travail à la ville et décident de quitter la forêt. Elle passe du statut d'enfant choyée à celui de fille méprisée (car elle est méprisée ouvertement par ses grands-parents parce que seuls les garçons comptent).
Elle, qui est si curieuse et désireuse d'apprendre, découvre que les filles n'ont pas les mêmes droits à l'éducation que les garçons.
Même une fois la famille réunit loin des grands-parents, Fei a du mal avec l'école. Sa seule joie est qu'elle retrouve son frère et qu'une vraie complicité va naître entre eux.
A la fois pugnace et chanceuse, elle va décider qu'en tant que fille chinoise elle bravera les traditions, choisira son destin et apprendra ce qu'elle aime par dessus tout, les langues, pour lesquelles elle se montre très vite douée.
C'est en autodidacte qu'elle commence à apprendre l'anglais qui lui ouvrira les portes d'emplois importants et lui permettra de devenir interprète, puis le français à l’Alliance Française de Shanghai, car dans ses rêves les plus fous, elle se voit vivre en France et surtout à Paris.
Son rêve se réalise, elle qui n'a pas de diplômes, voyagera "sans bagages" d'abord à travers la Chine, puis à Paris. Elle rencontrera des gens formidables qui seront époustouflés par son énergie et sa volonté.
La petite fille triste qui voulait tant que son père reconnaisse ses qualités dans le pays où les filles sont "comme l'eau sur le sable"... va devenir à 31 ans une jeune éditrice dont la mission est de faire connaître aux français la culture de son pays.
Ce que j'en pense :
Voilà une autobiographie tout à fait émouvante, écrite par l'auteur avec l'aide du scénariste Patrick Marty (car si Fei parle couramment le français, il est normal qu'elle ait encore des difficultés à l'écrire). C'est une lecture facile mais riche : le regard plein d'humour et de tendresse que Fei porte sur sa vie, sur les siens, sur ses erreurs, ses doutes et ses peurs, sur son pays, et les pays qu'elle traverse, est tout à fait intéressant !
Le début est désopilant et le lecteur ne comprend pas trop ce que vient faire ce petit cochon et surtout en quoi il est nécessaire au récit.
Mais n'est-ce pas lui qui la rappelle à ses souvenirs d'enfance alors que tout va bien pour elle ? N'est-il pas le seul lien qui lui permet de ne pas oublier les siens et le sacrifice de leur vie (ses parents vendront tout ce qu'ils possèdent pour l'aider à réaliser son rêve). Ne mesure-t-on pas l'amour et la richesse intérieure de quelqu'un, à ce qu'il est capable de donner ?
Le petit cochon lui fait un don considérable en l'écoutant d'une oreille attentive et en ne portant aucun jugement !
Ce récit a le mérite de bien montrer les difficultés à vivre d'une génération de chinois, élevé dans la politique de l'enfant unique, et qui a eu du mal à trouver sa place entre tradition et modernité, dans une Chine en pleine mutation. Et comme chaque fois que cela se produit, ce sont les filles qui en font les frais et doivent se battre deux fois plus pour faire évoluer la situation.
La combativité, le courage, la débrouillardise et la pugnacité de Fei sont un bel exemple pour beaucoup de jeunes qui encore aujourd'hui ne savent pas trouver leur voie. Le travail et la volonté finissent par payer !
A lire absolument !