Arluk (le chant pour celui qui désire vivre) de Jorn RIEL

Je suis tombée amoureuse du Grand Nord canadien, il y a bien longtemps. J'avais lu presque tous les livres de Paul-Emile Victor et de Jack London dès l'adolescence. Il faut dire aussi que par rapport à aujourd'hui, il y avait moins le choix de lecture, et donc à part la science-fiction, j'adorai lire ces romans d'aventure.

Et puis, j'ai eu la chance d'aller dans le Nord du Canada et de rencontrer des eskimos modernes mais toujours aussi chaleureux. Ils ne vivaient déjà plus dans des igloos, mais dans des maisons colorées en tôle, avec des circuits de chauffage qui passaient d'une maison à l'autre, l'eau courante, l'école, et les habits modernes mais adaptés au froid, des skidoos. Mais ils avaient encore des chiens de traîneaux, et des traîneaux, et chassaient encore, le phoque, l'ours, le caribou et le bœuf musqué.

Alors, je précise tout ça parce que forcément je ne suis pas totalement objective quand je lis un roman sur les Inuits, et bien que je ne sois jamais allée au Groenland (et que je compte bien le faire un jour !) je n'ai pas besoin de beaucoup de description pour voir les paysages dénudés sans arbres, les bœufs musqués en position défensive pour protéger les petits, ni les caribous car  je les ai vu en vrai...même si la période où j'y suis allée était l'été.

Voilà sans doute pourquoi je lis et je relis Jorn Riel avec autant de plaisir et surtout chaque fois que dans ma vie, les doutes m'assaillent, que je ne sais où je vais, que j'ai besoin de me raccrocher à mes racines pour avancer dans la vie. Il y a un lien direct avec nos lectures, celles qu'on aime ou pas et notre état d'esprit du moment, notre humeur, notre besoin de nous ressourcer, de nous évader, de nous détendre ou de nous retrouver.

J'ai enfin réussi à relire Arluk !

C'est le second volet d'une trilogie, mais il peut se lire indépendamment (ce que j'ai fait deux fois !!).

C'est un superbe roman sur les Inuits qui nous fait pénétrer avec réalisme dans leur monde à travers l'histoire d'Arluk, jeune orphelin élevé par son grand-père qui lui raconte toutes les légendes de son peuple. Là, au milieu des glaces de l'arctique, le lecteur découvre un peuple pacifique, blagueur et chaleureux qui  s'amuse intensément, et sait profiter de la vie et de l'instant.

En écoutant les légendes racontées le soir à la veillée, les jeunes apprennent les coutumes et les tabous de leur peuple, et savent ainsi toute leur vie comment se comporter.

A cette époque, les inuits nomades descendus du Grand nord vers l'Est et le Groenland, rencontrent les descendants des vikings venus de Norvège ou d'Islande qui peuplent les côtes du sud.

Les pirates qui bordent les côtes, la peste noire déciment peu à peu les habitats vikings.

C'est dans ce contexte que naît Arluk.

Arluk devenu Angakok (chaman). On lui prédit qu'il fera le tour de la terre (la terre des hommes c'est-à-dire le Groenland). Il  veut respecter la parole qu'il a donné et, un beau matin, il quitte son village.

Au début du  XVI° siècle, cette expédition ne peut être que périlleuse. Arluk va vivre des moments de bonheur intense, et des périodes de grande solitude et de souffrance, inévitables, mais il terminera sa vie auprès des siens.

Au contact de ses nombreuses rencontres avec les autres peuples, Arluk et ses proches  vont découvrir la violence, l'alcool, la trahison...mais aussi l'amour. Lui-même rencontrera Svava, une Kavdlunait,  seule rescapée d'un massacre, dont il fera sa deuxième épouse et qui lui donnera une fille blonde comme elle, Panikpak.

Le roman alterne les scènes de chasse, les aventures de la vie quotidienne, les mythes et coutumes, les scènes familiales plus intimes et la description  des paysages immenses dont la beauté transparait à chaque page.

C'est magnifique !