Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...
"Ceci est le jour de ma mort...
Le Seigneur m'en est témoin, c'est de ma propre main que je rédige ceci. Mes dernières volontés."
La femme ne prie pas. Elle ne le peut pas. L'histoire des injustices commises au nom de la religion_ envers ses ancêtres_ est sûrement la preuve que Dieu n'existe pas. Car quel Dieu accepterait que tant meurent en son nom dans la souffrance et la terreur ?
L'histoire débute à Carcassonne en 1562. Nous sommes au début des guerres de religion qui ont opposé catholiques et protestants, entre 1562 et 1598.
La famille Joubert est catholique. La mère est morte cinq ans auparavant et le père, libraire est aidé par sa fille aînée Minou (Marguerite) qui a 19 ans, Aymeric le cadet et la petite Alis qui a tout juste 6 ans.
Le père les a élevés dans la tolérance et le respect d'autrui. Aussi a-t-il caché à sa fille que, malgré ses idées progressistes, il avait été arrêté par l'inquisition et torturé sous prétexte que dans sa boutique il vendait des ouvrages interdits. Depuis, il n'est plus que l'ombre de lui-même, ne sort plus de la maison, et répond à peine aux bavardages de ses enfants.
Ce matin-là, Minou va donc ouvrir la librairie toute seule.
Elle va faire la connaissance de Piet, qui est huguenot et vit dans la maison d'en face chez une amie de la famille. Il est venu à Carcassonne pour y retrouver un ami d'enfance Valentin Vidal, qui est devenu prêtre. Mais ce dernier va le trahir et lui tendre un piège, persuadé que Piet est responsable du vol et de la disparition d'un précieux suaire. Il sera désormais traqué sans merci.
Le père décide d'envoyer les aînés à Toulouse, chez sa belle-sœur afin de les protéger des événements tandis que lui-même va partir vers Puivert...ou des secrets de famille l'attendent.
Mais certains de ces secrets ont filtré. Se confier quand on est dans un cachot de l'inquisition peut entrainer des rumeurs...et comme tout le monde le sait au bout d'un moment, ces rumeurs deviennent vraies.
Ce qu'il ne sait pas, c'est que Toulouse est encore moins sûr que Carcassonne, et que des affrontements sanglants sont imminents.
Il ne sait pas non plus qu'à Toulouse, Minou va revoir Piet...scellant ainsi son destin.
Il sait encore moins que durant son absence, les secrets ont filtré et qu'une dame charmante en apparence mais machiavélique, voire folle, dont les désirs et les actes sont racontés en italique entre deux chapitres, est sur les traces de Minou et, qu'elle va s'en prendre à la petite Alis restée dans la cité sous les bons soins d'une amie et de la bonne.
Qui est-elle et pourquoi veut-elle s'en prendre à la famille Joubert ?
Vous le découvrirez en lisant ce roman haletant car, bien entendu, le destin de tous ces personnages va se recouper au fil des pages pour notre plus grand plaisir.
Il n'y a pas de secrets dans un village. Même si le temps érode les souvenirs, quelqu'un finit toujours par parler. Convaincu par une pièce dans la main, un bâton sur son dos, la courbe d'un sein sous une chemise d'été. A mesure que passent les années, les histoires censées rester cachées et celles connues de tous se confondent.
Vous savez fort bien que si un mensonge est répété assez de fois, à l’encontre de la plus claire des preuves du contraire, même les hommes les plus sensés commencent à y croire. Les faussetés deviennent aisément une vérité reconnue.
"La Cité de feu" est le premier tome d'une trilogie dont j'ai lu par hasard en premier le troisième opus, "La Cité des mers", présenté ICI. Il m'a aussitôt donné envie de découvrir les deux tomes précédents.
Ce roman est une belle fresque historique et humaine, mais aussi un roman d'aventure et une saga familiale.
Ce tome commence par un prologue qui se passe en 1862. Une femme dont nous ne saurons pas l'identité se retrouve sur la tombe de protestants installés en Afrique depuis 1688. Le lecteur fera le lien avec ce prologue quand il aura lu toute la trilogie.
Kate Mosse nous emporte de Carcassonne à Toulouse puis au château de Puivert. Les lieux sont décrits à merveille pour qui les connait un peu et les personnages principaux sont très attachants.
Minou (ce surnom finalement lui va bien...alors qu'au départ je ne le trouvais pas très convainquant) est mise en valeur dans cet opus. C'est une jeune femme courageuse qui n'hésitera pas un instant à braver les événements non seulement pour aider sa famille et sa fratrie, mais aussi parce qu'elle respecte profondément les êtres humains quels que soient leurs idéaux ou leurs religions.
Piet est lui-aussi d'une grande tolérance. Il a quitté sa Hollande natale pour se battre pour ses convictions et compte bien aller jusqu'au bout pour les faire respecter.
Même Aymeric jeune ado espiègle et tapageur va nous surprendre tant les événements et les rencontres qu'il va faire vont le transformer.
Les personnages secondaires sont également très réalistes et "jouent" bien leur rôle.
Il est question de secret de naissance, de vengeance, d'émeutes, d'engagement pour une cause, de la valeur réelle d'une relique, de sens moral sur fond de guerre.
C'est un roman facile à lire mais qui retrace la persécution des huguenots, et nous parle du massacre de Wassy et du massacre de Toulouse avec réalisme. Durant cette période le prince de Condé et le duc de Guise se livrent un combat sans merci. Il y a de l'action, des complots, des secrets qui ne seront dévoilés que dans les tomes suivants. Il est plaisant de découvrir la forteresse cathare de Puivert de l'intérieur. Les liens entre les différents personnages se tissent peu à peu sans dévoiler l'essentiel jusqu'à la fin.
Moi qui n'aime pas les romans historiques je découvre que lorsqu'ils sont romancés, j'adhère plus volontiers...d'autant plus que ce roman est bien documenté et que cette période de l'histoire m'a toujours intéressée. La lecture de ce roman m'a d'ailleurs donné envie d'en savoir davantage encore.
C'est un livre qui se lit d'une traite, sans prendre le temps de souffler malgré ses 735 pages. Je l'ai lu il y a quelques semaines, et je vous présenterai le tome 2 la semaine prochaine...
_ Dis-moi, Vidal, reprit Piet, ne te demandes-tu jamais pourquoi ton Eglise se sent si menacée par l'idée que nous pratiquons différemment de vous ?
- C'est une question de sécurité. Un État unifié est un État fort. Ceux qui se démarquent affaiblissent l'ensemble.
- Peut-être, répondit Piet en choisissant prudemment ses mots. Cependant, il en est qui affirment que la véritable raison pour laquelle l'Église catholique essaie de nous empêcher d'être entendus est que vous craignez que nous ayons raison.
Tu parles comme si tu croyais que l'humanité a retenu les leçons du passé. Que nous sommes devenus meilleurs. Je crains l'inverse. J'ai peur que les hommes aient, au contraire, appris à répéter les erreurs du passé, et de façon plus odieuse encore. Que nous avancions vers un nouveau conflit.