Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...
C'est le prix à payer pour que la guerre ne soit pas qu'une idée abstraite et nos morts de foutues statistiques déclamées par des politiciens larmoyants. Ce sont les gens comme Robert qui nous mettent en garde contre la banalisation de la guerre et de la violence, en l'incarnant à travers ceux qui la font et ceux qui la subissent, en nous montrant leur sang et leur désarroi...
Robert Kovacs, un reporter de guerre brillant au passé élogieux, vient de mourir en mission alors qu'il couvrait les événements en Indochine. Nous sommes en 1953 et la rédaction de Life magazine est en deuil.
Personne ne veut le remplacer dans cette zone du monde particulièrement dangereuse. Seule Elisabeth Cole le demande. Elle est la risée de tous les hommes du journal mais, pugnace, elle est persuadée que sa place est là-bas d'autant plus qu'elle a trouvé, bien cachée dans la doublure d'un des vêtements de Robert, une pellicule photo qu'elle s'empresse de développer.
La mort du reporter est-elle bien accidentelle ?
Qui est cette jeune femme qui apparait sur certains clichés ?
Et quel rôle joue ce jeune homme presque encore un gamin qui porte un étrange bandeau sur le front ?
Pour obtenir des réponses, le lecteur va donc embarquer avec Elisabeth, et découvrir que ce pays complexe n'est pas pour rien une zone de conflits. En effet, se mêlent sur place que ce soit à Hanoï, à Saïgon ou sur les hauts plateaux du Laos, l'armée française, la mafia corse, les américains et les soviétiques, et des trafiquants de drogue (opium bien entendu) et d'armes, des guerriers, des sectes, des hommes politiques tenant à leur pouvoir, des agents doubles et des tueurs à gages bien décidés à supprimer tous ceux qui entravent la route des autres. Le lecteur ne sait plus à qui se fier.
Rien ne sera facile pour Elisabeth mais elle est bien décidée à enquêter coûte que coûte, quitte à se mettre en danger... tout en exerçant le métier de ses rêves.
Il ne parvenait pas à se résoudre à l'utilisation de ces armes indignes, seulement bonnes pour les paresseux. Dans sa conception d'honorabilité du métier de tueur, on devait aller au contact de la cible dans une quasi étreinte intime et non pas l'abattre dans le dos, comme un lâche.
Les montagnards ont souvent du mépris pour ceux qui vivent dans l'abondance des terres basses. De leur point de vue, la vie facile rend faible et indolent. Quant aux hommes des plaines, ils craignent les montagnards ces barbares frustes et illettrés. Ils n'ont pour seul désir que les soumettre.
Voilà un roman d'aventure, à la fois roman d'espionnage et historique puisqu'il se passe pendant la guerre d'Indochine.
L'héroine est une femme volontaire et prête à tout pour réaliser ses rêves et assoir son désir de liberté dans une société pas du tout préparée à accepter qu'elle sorte des bureaux pour devenir une véritable correspondante de guerre.
Le lecteur, une fois l'histoire bien campée, veut absolument savoir comment Elisabeth va s'en sortir car le suspense est intense, le rythme soutenu et l'intrigue bien menée.
C'est un roman prenant, riche en événements de toutes sortes. Le lecteur apprend beaucoup de choses sur l'Histoire complexe de cette région du monde, sur cette guerre d'Indochine où les intérêts de plusieurs pays sont en jeu (comme c'est souvent le cas dans les guerres) mais où les enjeux majeurs sont peu connus car cachés aux yeux du monde.
L'auteur s'est inspiré de personnages réels pour faire vivre ses personnages fictifs (il nous en dresse la liste à la fin de son roman mais je ne vous en dirai rien de plus ! ). Je n'aurais pas deviné du tout cela car je ne connaissais pas, je l'avoue, la grande majorité de ces personnages.
J'ai eu du plaisir à découvrir cette lecture malgré les scènes de guerre violentes, car il y a heureusement des passages plus légers. Cependant, je ne me suis pas totalement attachée à l'héroïne car finalement elle quitte sa petite vie tranquille et confortable, son mari et sa famille pour se retrouver immergée dans cette guerre quelques jours plus tard...sans paraitre en être affectée ce qui nous apparait peu crédible. Elle fera cependant preuve de courage et de ténacité dans bien des situations, ce qui est admirable.
Mais bon, laissons lui une chance puisque la fin nous permet d'imaginer que tout peut changer par la suite pour elle, j'apprends en effet en rédigeant ses lignes que ce roman est le premier tome d'une trilogie.
Merci à Babelio pour cette Masse critique privilégiée et à l'éditeur Robert Laffont pour leur envoi qui m'a permis de découvrir pour la première fois cet auteur que je n'avais jamais lu.
La saga va prochainement faire l'objet d'une adaptation télévisée par Éric Rochant qui, sauf erreur de ma part, est le producteur de la série "Le Bureau des légendes"que vous avez peut-être vu à la TV (moi pas, car elle passait sur Canal + !).
Ce roman a été lu en avant première. Il ne paraitra en librairie que le 29 février prochain.
Nous nous sommes tous battus pour la liberté. Alors, quand on nous a envoyés à treize mille kilomètres de chez nous pour combattre en Indochine, les choses étaient aussi simples que lorsque nous nous battions pour libérer l'Europe de l'oppresion nazie : nous devions maintenant liberer l'empire français du joug japonais. Sauver nos compatriotes d'outre-mer.
Bientôt la jeep déboucha dans une forêt clairsemée de laquelle saillaient des centaines de jarres en pierre. Il y en avait de toutes les tailles. On aurait dit qu'elles étaient là depuis toujours, à demi enfouies dans la terre ou posées à même l'herbe rase, sans ordre ou motif apparent, dans un savant chaos de grès et de granit, de mousse et de lichen. Les plus grosses pouvaient contenir un éléphant, les plus petites, tout juste un homme agenouillé. Une émotion brute saisit la jeune femme au ventre. L'endroit éveillait en elle des sensations contradictoires, de joie et de tristesse mêlées, de colère également. Le coeur noir des hommes et de la guerre battait si proche d'une telle splendeur antique...