Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...
Si tu cuisines en étant triste ou énervée, le goût ou la présentation en pâtissent forcément. Quand tu prépares à manger, pense toujours à quelque chose d'agréable, il faut cuisiner dans la joie et la sérénité.
Pouvoir simplement cuisiner pour quelqu'un me rendait vraiment heureuse, du fond du coeur.
Merci, merci !
Le crier encore et encore vers le ciel par une nuit d'hiver ne me suffisait pas, j'aurais voulu crier si fort que la planète entière m'entende, crier jusqu'à ce que ma voix intérieure s'éraille, que tout le monde sache ce que je ressentais.
Lorsque Rinco rentre chez elle après son travail dans le restaurant turc qui l'emploie, elle trouve la maison vide. Tout a disparu : ses ustensiles de cuisine (le mortier de l'ère Meiji hérité de sa grand-mère aujourd'hui disparue, le baquet en bois de cyprès dans lequel elle gardait le riz au chaud, la cocotte en fonte Le Creuset enfin achetée avec son premier salaire, les baguettes de cuisine à pointe fine dénichées chez un marchand spécialisé de Kyôto...) , ses denrées, ses économies et tous ses rêves de monter un jour un restaurant avec son compagnon indien. Il a tout emporté, ne laissant que les clés de l'appartement.
Elle est si choquée par cette découverte qu'elle reste sans voix (au sens concret du terme). Elle quitte la ville et prend le bus pour rentrer dans son village natal, emportant avec elle son ultime bien, la jarre de saumure de sa grand-mère, seul héritage de celle qui lui a tout appris.
En refaisant le trajet en sens inverse de celui qu'elle avait fait il y a 10 ans, Rinco songe à sa mère, Ruriko avec qui les relations ont toujours été tendues. Celle-ci d'ailleurs, l'accueille plutôt froidement, mais malgré sa vie mouvementée et bien occupée (elle possède un bar local), accepte qu'elle s'installe dans son ancienne chambre où rien n'a changé. Même Papy Hibou est toujours au grenier pour sonner avec régularité les douze coups de minuit, ce qui apporte à Rinco un grand sentiment de sécurité. Elle en a bien besoin et elle, qui était partie il y a dix ans sur un coup de tête, est finalement soulagée de se retrouver dans la maison de son enfance.
Ruriko, cependant pose ses conditions. Elle a adopté un cochon, dont Rinco devra s'occuper en échange du gîte. Hermès est un animal intelligent et très affectueux et Rinco va très vite s'y attacher, trouvant important de lui donner des aliments de qualité, préparés par ses soins.
S'occuper d'Hermès va lui faire réaliser que la seule chose qu'elle sait faire, c'est la cuisine...elle va donc décider d'ouvrir un restaurant. Elle sera aidée dans sa tâche par Kuma, un ancien "homme à tout faire" qu'elle connait depuis son enfance car il travaillait dans son école. Il deviendra pour elle au fil du temps un véritable ami.
Dans la cuisine de "l'Escargot", c'est ainsi qu'elle nomme son restaurant, Rinco découvre que lorsqu'elle cuisine avec amour pour des gens, même inconnus, leurs vœux les plus chers se réalisent...un pouvoir qu'elle n'imaginait pas.
Elle va donc encore davantage soigner la préparation de ses plats, les sélectionner en fonction de ses convives pour réveiller chez eux des émotions qu'ils croyaient oubliées, et pour cela elle ne pourra accueillir qu'un seul client par soirée, un couple ou au maximum une famille, après une entrevue lui permettant de cerner leurs désirs.
Ce faisant, en leur apportant l'écoute dont ils ont besoin, elle va les aider à dépasser leur détresse mais trouver elle-même, une nouvelle raison de vivre. Ses propres émotions, ce qu'elle éprouvait envers sa propre mère en particulier, vont évoluer pour aller vers davantage de sincérité et elles en seront toutes deux transformées.
Avec ma mère, c'était toujours la guerre froide.
J'étais capable d'amour pour presque tous les humains et les êtres vivants. Il n'y avait qu'une seule personne que je n'arrivais pas à aimer sincèrement_ma mère. Mon antipathie pour elle était profonde et massive, presque autant que l'énergie qui me faisait aimer tout le reste. Voilà qui j'étais vraiment.
L'être humain ne peut pas avoir le cœur pur en permanence.
Chacun recèle en lui une eau boueuse, plus ou moins trouble...
Un repas, c'est parce que quelqu'un le prépare pour vous avec amour, qu'il nourrit l'âme et le corps.
Voilà un roman qui fait du bien, tant il est empli d'humanité.
Cette jeune Rinco, âgée à peine de 25 ans, nous donne une belle leçon de vie. Elle sait s'attacher aux moments simples de l'existence pour en remplir sa propre vie et combler le vide et la déception laissés par le départ de son ami indien : aller ramasser des fruits sur les arbres ou des légumes sous la neige, cultiver un jardin d'herbes aromatiques, goûter des grenades directement sur l'arbre, cuisiner en harmonisant les saveurs et les odeurs. L'auteur nous parle tout en pudeur, de sa façon de tenter de se relever de sa déception amoureuse, des sentiments ambivalents qu'elle ressent pour sa propre mère qui ne l'a jamais serrée une seule fois dans ses bras... Malgré cela, elle va tout faire pour retrouver le bonheur de vivre.
Bien entendu, vous vous en doutez, on parle aussi beaucoup de cuisine, de l'art d'accompagner les plats ou de les réaliser...mais ce n'est pas le sujet principal car on parle surtout d'amour, de partage, de quête de soi, de relation mère-fille et d'une certaine philosophie de vie, à la japonaise.
D'ailleurs, le récit est assez lent sans grand rebondissement. L'auteur prend tout son temps pour nous laisser pénétrer dans l'ambiance et nous donner envie de nous installer nous-aussi pour un soir ou davantage, à la table de cette jeune femme, amoureuse de la cuisine et de la vie.
Comme souvent dans la littérature japonaise, de chacun des faits de la vie quotidienne, même d'apparence infime, se dégage une certaine poésie, les mots et les échanges sonnent juste et la sincérité des relations entre les différents personnages nous les rendent particulièrement attachants. Chacun a son importance et trouve sa juste place...même Hermès le cochon apprivoisé.
C'est le premier roman de l'auteur que je lis et c'est pure coïncidence, le premier écrit par l'auteur, un roman que j'aurais du lire depuis longtemps donc, qui nous fait voyager vers d'autres contrées et d'autres coutumes. Je continuerai à découvrir son œuvre avec grand plaisir, d'autres titres m'attendent à la médiathèque.
Comprendre les sentiments d'autrui n'allège en rien la souffrance de la solitude.
Il y a ce qui a disparu pour toujours.
Mais qui, néanmoins, demeure éternellement.
Et puis il y a aussi, si on cherche avec ténacité, tout ce qu'on peut conquérir, toutes ces choses qui nous attendent.