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Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...

Terre de ma mère / Sophie Colliex et Djilali Bencheikh

Editions Chèvre-Feuille Étoilée, 2019 / Collection "d'un espace, l'autre"

Editions Chèvre-Feuille Étoilée, 2019 / Collection "d'un espace, l'autre"

Violence révolutionnaire contre violence coloniale.
Nous voilà, nous les victimes, séparées pour un siècle. Et pourtant il y a tant d'amour non-dit entre nos deux rives qui se sourient malgré la nuit, à cause du grand malentendu qu'on leur a imposé. Oui, seules des générations neuves peuvent briser le mur d'incompréhension qu'on nous a savamment édifié.

Qu'importe, disait-on, le nombre des victimes, des martyrs, l'essentiel est d'arriver au but suprême, l'indépendance. Je l'ai cru, maintenant je révise, avec le recul, mon jugement. Aujourd'hui, je pense qu'aucune cause ne mérite qu'on lui sacrifie autant de vies humaines...

Une fois, une élève venue du Nigéria a écrit, dans un bilan de cours "En français, ce que je n'aime pas, c'est quand on nous demande d'écrire au passé. C'est compliqué d'écrire au passé. Et puis moi, le passé je n'ai pas envie de m'en souvenir. Je fais tout pour l'oublier."

Suite à leur rencontre dans une réunion littéraire, les auteurs, tous deux romanciers, décident de correspondre pour échanger leur vision de leur terre d'origine, l'Algérie

 

Djilali est tout de suite attiré par les yeux bleus de Sophie. Ils lui rappellent ceux d'une jeune Juliette rencontrée à l'école. 

Sophie a une envie irrépressible de mieux connaître l'Algérie, ce pays que les siens ont pourtant renié, tout en en gardant de lui, un souvenir, toujours davantage embelli d'année en année. 

Ce recueil est la compilation de leurs correspondances durant tout un été : les seize courtes lettres se complètent parfaitement et surtout, se répondent.

 

Nés tous deux à vingt ans de distance, ils n'ont bien évidemment pas le même point de vue sur leur pays. 

Sophie est fille de "Pieds-noirs". Elle vit aujourd'hui en Suisse et enseigne le français. Elle va chercher à retrouver l'Algérie telle que la lui décrivait sa mère, celle des grandes fêtes colorées et si vivantes, des rires et des chants, des mounas que l'on partageait, et des pieds nus dans le sable...

Djilali est né un peu avant la guerre d'Indépendance dans un petit village entre Alger et Oran. Pour lui, l'Algérie c'est à la fois de beaux souvenirs d'enfance, mais aussi la pauvreté,  l'injustice, la dureté de la guerre et des hommes, la rancœur de certains algériens et leur légitime colère, mais aussi la joie d'aller à l'école pour apprendre toujours plus, grâce à ses instituteurs qui croyaient en lui.

Evidemment, tous deux n'ont pas vécu la même enfance, mais ils restent reliés pour toujours à l'Algérie, leur pays, celui où se trouvent leurs racines familiales.

 

Ce qui m'a touché dans ce récit épistolaire, c'est la sincérité des propos et le respect mutuel dont tous deux font preuve, lors de leurs échanges.

Ceux de Djilali, qui nous livre ici des propos particulièrement apaisants, sont emplis de sagesse. C'est lui le plus âgé et il fait donc preuve de maturité répondant à Sophie, lui expliquant ce qu'elle n'a pas vécu, comme par exemple la vie quotidienne des algériens pauvres, les horreurs de la guerre d'indépendance, la responsabilité des hommes politiques.

 

Ce recueil est une belle façon de revisiter l'histoire en croisant le regard et le ressenti de ces deux personnes différentes.

Il peut être lu dès l'adolescence même si je reconnais que ce genre de récit épistolaire n'est pas forcément facile à aborder pour des ados.  Cela vaut la peine de fournir un certain effort pour entrer dedans.

Ces lettres peuvent de plus, être utilisées en classe puisqu'elles se répondent. Je suis certaine qu'elles pourront être la base de débats constructifs.

Leurs deux regards, complémentaires, dressent le portrait d'un pays meurtri auquel le silence a fait considérablement de mal, comme il a fait du mal aux hommes. Ce silence a entraîné son lot de violence, amenant les hommes à taire leur amour pour lui, et cela, des deux côtés de la méditerranée.

 

Le sujet glisse forcément sur le thème des migrants, de tous les temps et de la méditerranée qui depuis des décennies, a été traversée, car porteuse de tous les rêves... de déceptions et de pertes humaines considérables. 

 

Le fait que tous deux cherchent à comprendre, remettent en questions leurs a-priori et s'interrogent, tout en tentant de trouver un chemin commun sur lequel les générations futures pourront s'appuyer pour pardonner, est un beau message d'espoir... 

J'ai cependant trouvé le ton employé par Djilali, par moment trop moralisateur ce qui a un peu gâché ma découverte. 

 

Merci à Babelio et aux Editions "Chèvre-feuille étoilée" de m'avoir permis de découvrir cet échange épistolaire. Cela me donne envie de découvrir les livres de ces deux auteurs. 

Encore une fois je te propose d'avancer l'un vers l'autre et non pas l'un contre l'autre.

tous les livres sur Babelio.com
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S
Bonjour Manou, je découvre ce matin avec beaucoup d'intérêt, sur Babelio et votre joli blog, votre commentaire de notre Terre de ma mère. Je suis très touchée que vous ayez apprécié notre façon de revisiter l'histoire et je vous en remercie. Terre de ma mère me tient à coeur, et un mois après sa publication je suis son chemin avec la passion que vous imaginez. Chaque personne reçoit un texte avec sa sensibilité et sa subjectivité et je communique avec plaisir avec mes lecteurs. Djilali et moi voulions abandonner la grande histoire aux spécialistes et nous poster aux portes de la vie réelle des gens où planaient inquiétudes, incompréhensions, périls, ainsi que les plaisirs de l'enfance. Merci encore de nous avoir consacré ce temps ! Sophie Colliex
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M
Merci infiniment pour votre visite qui me touche énormément. C'est toujours avec la plus grande sincérité que j'écris mes chroniques de livres sur ce blog. J'ai aimé votre échange parce que justement vous cherchez tous deux à témoigner de votre vécu familial et personnel. J'ai aimé aussi que n'étant pas de la même génération votre regard soit différent. J'espère que votre livre continuera a être apprécié comme il le mérite. Merci infiniment d'avoir pris la peine de venir jusqu'ici mettre un commentaire...Bonne soirée. Manou
S
Cela semble en même temps intéressant et touchant, merci pour le partage.
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M
C'est un livre intéressant car les deux points de vues se complètent
M
Des souvenirs croisés, pas facile de les partager mais un grand amour pour ce beau pays, j'en ai connu de ceux qui en avaient la nostalgie, je pense qu'il faut un peu de maturité pour lire ce livre avec profit...
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M
C'est bien vrai plus jeune, je n'aurai pas tout compris mais avec un accompagnement ou pour illustrer les cours d'histoire je pense qu'au lycée il aura sa place, si l'enseignant a envie de travailler autrement. Bisous et une douce soirée
L
Bonjour (copier/coller)<br /> Encore des retards, je ne m’en sort pas, nous avons eu du mal à trouver du personnel pour maman, mais voilà j’ai laissé ma place à des personnes compétentes. j’ai voulu en tant que présidente d’une association préparer le vide grenier annuel, mais maintenant tout se fait par le net, je sais je me débrouille, sans être une pro, mais là quel galère entre entretenir un blog et remplir des formulaires j’ai réussi à finir hier, je sens qu’il va y avoir d’autres documents je pense que cela va lasser beaucoup de petites associations de proximité cette obligation de passer par internet aie ! <br /> Je vais revenir doucement en fonction de mon temps disponible mais en venant ici j'ai lu un article intéressant et un titre à retenir<br /> <br /> Bises amicales
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M
Merci Lyly ne t'en fais pas tu sais que tu seras toujours la bienvenue. Chacun fait ce qu'il peut avec son temps, sa famille et sa vie quotidienne. Bisous et une douce soirée
N
Une belle histoire! nous n'avons pas fini avec les souvenirs d'uns et des autres qui ne se recoupent presque jamais. Cela est dû au fait qu'en Algérie, il y avait une grande fracture entre les populations autochtones et la population française. Elles se côtoyaient mais ne partageaient pas grand chose et cela pendant plus d'un siècle. Donc, à chacun son histoire et à chacun son récit d'enfance. Bises.
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M
Ce qui est particulièrement intéressant c'est que les générations actuelles essaient de comprendre la passé pour mieux aimer leur pays...au lieu de porter en eux les problèmes liés au passé...Merci pour ton ressenti. bises
P
Très chouette de revisiter l'histoire de cette manière. Une façon sympathique de se cultiver...<br /> Bonne semaine.
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M
Je lis peu de récit épistolaire et c'est vrai que c'est une façon différente de revisiter l'histoire surtout quand chacun y met ainsi de lui-même. Bonne semaine à toi aussi Philippe
D
l'Algérie en ce moment au centre de l'actualité. Bises et merci pour tes impressions.
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M
C'est un pur hasard. Je trouvais que ce livre complétait bien mes lectures faites récemment...Bises
C
Je crois que mon papa aurait adoré ce livre, lui qui a connu l'Algérie de 47 à 49, puisqu'il y a fait son service militaire. Ces échanges entre ces deux personnes doivent être intéressants, entre celui qui y a vécu, et celle à qui on a raconté!<br /> Belle soirée, bisous !<br /> Cathy
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M
Le fait que tous deux ne soient pas de la même génération est en effet très intéressant et l'effort fait pour une compréhension mutuelle un beau message. Bisous et une douce journée
C
Je reviens tout doucement, mais c'est dur….<br /> Cet échange épistolaire doit être du plus grand intérêt, un mélange de perceptions, un désir de communication, de compréhension commune …. ce qui devrait régir nos peuples !<br /> Je lis peu en ce moment. Bisous Manou et une douce soirée.
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M
Je comprends bien que tu aies du mal à te concentrer sur une lecture...Merci de passer ici. Je ne t'oublie pas. Prends soin de toi surtout c'est le principal. bisous et une douce journée
S
c'est intéressant cet échange de point de vue sur l'histoire!!! bisous
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M
Surtout quand les deux personnes sont d'une génération différente et n'ont pas vécu les mêmes choses:) bisous
R
Thank you for this review. It sounds quite interesting to be told through letters exchanged. Friendship
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M
J'aime varier mes lectures sur tous les sujets :) Amitiés
E
je vais essayer de le trouver car le thème me plaît et le récit qui alterne des lettres aussi<br /> merci pour ce partage :-)
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M
Je lis peu de récit épistolaire mais de temps en temps, j'aime les découvrir. Voilà pourquoi je n'ai pas hésité à le demander lors de la Masse critique de Babelio...en plus il complète bien tout ce que j'ai lu sur l'Algérie ces derniers temps...
P
Bonjour Manou,<br /> Ce livre est une jolie leçon d'histoire. C'est un partage intéressant. <br /> Mon oncle venait d'une famille de pied noir. Il parlait de sa petite enfance comme d'un paradis. Il faut dire que la rentrée en France a été rude. Sa mère (mère de 9 enfants) n'avait su qu'enfanter. Elle avait des domestiques et les enfants un précepteur. A Paris, du jour au lendemain plus rien. Cette famille avait toujours gardé des airs de grandeur.<br /> Belle journée à toi. Bises sous un ciel chargé avec un peu de soleil.<br /> Bises
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M
Merci Elisa ! C'est vrai que j'aime approfondir aussi dans mes lectures des sujets pas forcément évident car je n'ai pas vécu tout cela et j'étais bien jeune lors de la Guerre d'Algérie. Bises et une douce fin de journée
M
Un livre qui doit aider à mieux comprendre un pays que je connais par bribes mais pas très bien..... intéressant.<br /> Je viens de terminer La drôle de vie de Zelda Zonk de Laurence Peyrin... il était noté dans mon carnet mais j'ai oublié de mettre le nom du blog, du coup je ne sais pas si c'est chez toi que je l'ai vu. J'ai beaucoup aimé et c'était une détente après ma dernière lecture! ;-) <br /> bisous et bon lundi!
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M
Il me semblait bien que c'était Mimi mais je n'en étais pas certaine car je suis plusieurs blogs littéraires :) bisous
M
J'ai trouvé la coupable, pour Zelda zonk c'est Mimi de" mes petites boites! " ;-)
M
J'ai noté ce livre aussi dans mon carnet mais je ne peux te dire qui en a parlé parmi les lectrices ou lecteurs qui nous entourent :) Il faut entrecouper les gros pavés de livres plus légers ou d'un sujet différent ! bisous et un bon lundi à toi aussi
D
un sujet qui de plus colle avec l'actualité
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M
C'est un pur hasard...je trouvais qu'il complétait bien mes dernières lectures sur le sujet
D
Je suis née au Maroc, nous sommes rentrés à la fin du protectorat, pour l'Algérie c'est très différent, il y a eu des générations de français d'Algérie et l'indépendance a été difficilement vécue par certains. un échange épistolaire qui doit être intéressant de découvrir. Merci pour cette lecture.<br /> Bonne journée, bises
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M
C'est enrichissant de confronter les points de vue de deux personnes de deux générations différentes et qui ont vécu chacune les événements différemment...Bises et une douce journée
D
ce livre me semble bien intéressant; j'ai perdu de vue puis retrouvé le fait que ce n'est pas un roman? étant donné le contexte actuel, cette lecture doit être intéressante pour se faire une idée de ce que vivent les Algériens et les "Pieds-noirs". je ne connais pas l'Algérie, mais j'y ai des attaches indirectes. je note!
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M
Oui il est intéressant mais c'est vrai qu'il faut aimer le récit épistolaire :)
D
Merci pour ce partage qui permet de montrer que les échanges sont toujours possibles, et qui donne de l'espoir !
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M
C'est important l'espoir surtout quand il y a des souvenirs communs...J'imagine que tu profites bien de tes vacances :)
M
J'aime bien les livres épistolaire mais le sujet ne m'attire pas spécialement. Bisous
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M
Je comprends et il faut lire les sujets qu'on aime ou qui nous touchent de près, ici en Provence nous sommes très concernés par ces divers problèmes...bisous
Q
Je ne sais pas si je le lirai, mais qui sait ? Peut-être un jour. :)<br /> Merci pour ta présentation de ce livre.<br /> Bisous et douce journée.
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M
J'ai accepté de le lire parce qu'il était très court et qu'il complétait bien les autres livres lus récemment sur le même sujet. Bisous et une douce journée