Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...
J'aurais pu aussi bien intituler mon article "Les pieds paquets à la marseillaise OU de la poésie des pieds paquets"...
Pour clore cette semaine poétique, je ne peux en effet faire l'impasse sur une petite recette qui va horrifier les puristes, les végétariens, végétaliens et adeptes du végan mais qui ravira les papilles des omnivores, dont je fais partie, comme à l'origine l'étaient tous les êtres humains, (ceux que l'on appelle aujourd'hui dans le langage des villes et des médias, des flexitariens !).
Je ne peux faire l'impasse sur la passion, la poésie qui se dégage de certains mets et de la gastronomie régionale. Ce plat cuisiné dans ma famille comme dans beaucoup de familles provençales, est culturellement important dans ma région. Il fait partie des mets qui vont malheureusement un jour tomber dans l'oubli si les générations futures ne se l'approprient pas...
Si vous doutez que la poésie et la gastronomie fassent bon ménage, il vous suffit de prendre le temps de relire Queneau...
Après une attente gratinée sous un soleil au beurre noir,
je finis par monter dans un autobus pistache
où grouillaient les clients comme asticots
dans un fromage trop fait.
Parmi ce tas de nouilles,
je remarquai une grande allumette
avec un cou long comme un jour
sans pain et une galette sur la tête
qu’entourait une sorte de fil à couper le beurre.
Ce veau se mit à bouillir parce qu’une sorte de croquant
(qui en fut baba) lui assaisonnait les pieds poulette.
Mais il cessa rapidement de discuter le bout de gras
pour se couler dans un moule devenu libre.
J’étais en train de digérer dans l’autobus de retour
lorsque devant le buffet de la gare Saint-Lazare,
je revis mon type tarte avec un croûton
qui lui donnait des conseils à la flan
à propos de la façon dont il était dressé.
L’autre en était chocolat.
Raymond Queneau)
Les pieds et paquets à la marseillaise que l'on appelle aussi en raccourci "pieds-paquets" ou "pieds en paquets" et "pèd e paquet à la marsiheso" en provençal sont une spécialité provençale, et pas uniquement marseillaise (malgré mon titre). Ils sont consommés dans tout le sud-est.
Ils font partie d'un patrimoine à préserver !
Un peu d'histoire...
La légende fait remonter l'apparition de ce plat aux origines de la cité phocéenne, il y aurait donc 2 600 ans ! Gyptis la célèbre princesse dont la tribu régnait dans la région, décida de choisir pour se marier, Protis, un célèbre navigateur qui venait de débarquer. Et elle lui offrit, devinez quoi, des pancettes d'agneau roulées, farcies d'herbes odorantes.
Une autre légende, d'après la Confrérie des pieds-paquets (si ! si ! elle existe...) dit que lors des fêtes de Pâques, alors que les riches consommaient les plus beaux morceaux d'agneau, les pauvres ne laissaient rien perdre et agrémentaient les bas morceaux.
Quoi qu'il en soit, les pieds-paquets ont fait la renommée du petit village de la Pomme situé au bord de l'Huveaune (devenu aujourd'hui le 11e arrondissement de Marseille) d'où la recette serait originaire.
L'invention de la recette telle qu'on la mange aujourd'hui, est en effet attribuée à Louis Ginouvès, un cuisinier de ce petit village mais je ne vous garantis rien, car les marseillais, on les connaît bien n'est-ce pas, exagèrent toujours...
La recette apparaît en tous les cas pour la première fois dans le livre de cuisine de Morard, vers 1888. Mais certains écrits prouvent que ce plat était déjà cuisiné au XVe siècle. Un certain cuisinier et poète aixois, César Pellenc, en parle dans son livre, "Les plaisirs de la vie", en 1655...
Quoi qu'il en soit et quelles que soient ses origines, c'est un plat communément cuisiné pour Mardi gras, pour Noël ou pour Pâques dans tout le sud-est de la France et...il est resté longtemps un plat du pauvre !
Dans le temps, les pieds-paquets étaient toujours préparés à la maison et même les enfants aidaient à faire les paquets, je m'en souviens encore car cela m'amusait beaucoup et avec mes petits doigts, je savais très bien fermer les paquets que ma mère ou ma grand-mère avaient farcis.
Les paquets sont faits avec de la panse de mouton, bien lavée et passée à l'eau vinaigrée. On la découpe en carré et on les place sur le plan de travail, l'intérieur de la panse tout lisse au-dessus. On perce une sorte de boutonnière dans un des angles avec une lame de couteau.
Chaque paquet est ensuite farci d'un hachis constitué d'un mélange de petit salé NON FUMÉ, de persil, et agrémenté d'un peu d'ail.
On lie ensuite les paquets pour qu'ils ne s'ouvrent pas en cuisant, en glissant un côté de panse dans la boutonnière.
Aujourd'hui je l'avoue, j'achète les paquets tous prêts !
C'est un plat qui ne se cuisine pas pour deux...
On le partage entre amis ou membres de la famille, ou bien, on en mange deux fois et on congèle ce qui reste.
C'est très facile à cuisiner, mais c'est trèsssss longgggg à cuire...
Six à huit heures, c'est vous dire si vous voulez obtenir un plat onctueux, tendre, savoureux...donc parfait !
Les ingrédients...
Pieds et paquets selon le nombre de convives
(Il faut compter 1 pied et 2 à 3 paquets maximum par personne pour chaque repas)
3 oignons dont 1 piqué de deux clous de girofle
1 carotte (ou plus si vous aimez)
1 poireau (il n'est pas sur la photo mais il ne faut pas l'oublier)
3 belles tomates (ou 1 pot de tomates au naturel maison)
1 belle bouteille de vin blanc sec
1 litre de bouillon
3 à 4 gousse d'ail
du persil
du paprika (ou du piment si vous aimez)
1 morceau d'écorce d'orange séchée
100 g environ de petit salé NON FUMÉ
certains rajoutent pour changer un filet de pastis (et ça on en a tous à la maison en réserve !)
La préparation et la cuisson...
1 - Par précaution, blanchir les pieds de mouton dans de l'eau vinaigrée et bien les égoutter.
2- Faire revenir dans un peu d'huile d'olive, deux oignons émincés et le petit salé coupé très fin ou même comme je le fais souvent haché fin.
3- Quand ça commence à légèrement fondre, sans pour autant attacher, ajouter le poireau émincé très finement lui-aussi, puis la carotte en tranches fines (ou râpée) et enfin, les tomates...
4- Laisser suer un moment en tournant doucement...
5- Quand la préparation commence à compoter légèrement, mouiller avec 3/4 à 1 litre de vin blanc et au moins un litre de bouillon (selon la quantité de paquets).
6 - Saler légèrement, poivrer, ajouter 1/2 cuillère à 1 cuillère à café de paprika doux, de l'écorce d'orange, le dernier oignon piqué de deux clous de girofle.
7- Poser les pieds au fond de la marmite puis les paquets par dessus.
Le liquide doit ABSOLUMENT tout recouvrir ! S'il en manque ajouter du bouillon à ce stade...
8- Ajouter alors les gousses d'ail écrasées et un bouquet garni que vous placerez dans une boule pour ne pas avoir à repêcher les morceaux (donc thym, sauge, romarin, sarriette, marjolaine...vous avez le choix) et des feuilles de laurier.
9- Quand le tout atteint l'ébullition, baisser le feu tout doux et couvrir. Certains scellent même le faitout.
9- Cuire à couvert au moins 3 à 4 heures sans y toucher et à feu très doux sans remuer !
10- Ôter le couvercle et continuer la cuisson encore au moins 3 à 4 heures toujours à feu très doux.
Le plat est meilleur réchauffé à feu très doux le lendemain, après avoir laissé le tout reposer toute la nuit. Le réchauffer au moins une heure donc, deux c'est parfait.
L'idéal est en effet de commencer la préparation la veille à midi, de laisser mijoter tout l'après-midi pendant 6 heures et reposer toute la nuit. Et le lendemain il suffit de prévoir de faire réduire la sauce tout en réchauffant le tout.
La sauce a réduit juste ce qu'il faut et est devenue onctueuse...et tellement parfumée.
Attention ! Si vous avez des petits-enfants de bien enlever les petits os qui pourraient en effet se trouver au fond du plat. Certains préfèrent d'ailleurs désosser les pieds. Chez moi, on ne le faisait jamais...
Les pieds et paquets se servent tout simplement avec des pommes-de-terre cuites à la vapeur et jamais autre chose...
Quand on achète les paquets tout faits, ce n'est pas du tout compliqué à cuisiner, c'est juste la cuisson qui est à surveiller. Et c'est un régal pour les papilles et un plat maigre au contraire de ce que pensent beaucoup de gens.
Certains journalistes, sur le blog de Médiapart, en ont même fait un poème dans la rubrique spécial OUIQUINDE...si ça vous amuse de la lire, moi j'ai trouvé ça sympathique.
Ouiquinde gastronomique: les pieds et paquets marseillais.
Je viens de régaler quelques épicuriens Des mangeurs de cadavres, pas des végétariens D'un plat que l'on ne peut décemment oublier: Les très fameux pieds et paquets marseillais. Écoute bien,...
Et n'oubliez-pas d'aller déguster ceux de Jupiter, légèrement différents des miens, sur son blog, "La Cachina" en cliquant sur le lien ci-dessous...
Pieds et Paquets à la Marseillaise - La Cachina
Révision de Noël L'amitié est une plante qui doit résister aux sécheresses du coeur Recette provençale classique et qui revient au goût du jour paraît il. C'est délicieux et je vous autori...