Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...
Actuellement, je ne vais que rarement au cinéma, alors qu'avant je ne pouvais pas passer un mois sans. J'étais abonnée dans un cinéma d'Art et d'Essai et je suivais de près l'actualité cinématographique, lisais des revues spécialisées et ne perdais pas une miette des reportages réalisés sur les différents festivals. Comme quoi on change dans la vie...
Il faut dire aussi que l'ambiance des cinémas a bien changé. Je sais "ça fait vieux jeu" de dire tout ça mais je ne crois pas être la seule à éprouver ce rejet actuel pour les salles obscures.
Bref, quand j'ai vu l'article de Miss Fujii, qui est passionnée et nous tente souvent en nous parlant de tous les films qu'elle va voir dans sa jolie ville d'Istres, et que j'ai lu plus récemment celui de Marion, je me suis finalement décidée !
Il faut dire qu'en plus (après j'arrête de vous raconter ma vie !) il y avait une séance spéciale dans mon petit village. La salle de spectacle qui tient lieu également de salle de cinéma était comble. Quel bonheur de ne pas aller en ville, braver les embouteillages, payer un parking et en plus de se retrouver avec plein d'amies...
L'histoire...
Romain Gary (1914-1980) est considéré comme un des plus grands écrivains du XXe siècle. Il a écrit "La promesse de l'aube" en 1960 et j'ai adoré lire ce roman autobiographique.
Dans le roman, comme dans le film, Romain Gary (de son vrai nom Roman Kacew) revient avec humour, un humour parfois grinçant, sur sa vie. Il nous retrace son enfance à Vilnius, en Pologne, une enfance marquée par la pauvreté et les difficultés familiales, les affronts subis et les moqueries de ses camarades, parce qu'ils sont juifs, puis leur exil vers la France lors de la montée de l'antisémitisme.
Lorsqu'ils s'installent à Nice, la vie devient plus facile mais cela ne dure pas car la Seconde Guerre mondiale se profile, et le jeune Romain devra rapidement interrompre ses études et laisser de côté ses ambitions littéraires, pour s'engager dans l'aviation et partir en Afrique...
Au-delà de l'histoire familiale et de la grande Histoire, Romain Gary nous parle de Nina, sa mère, et de la relation fusionnelle qu'ils ont eu ensemble. Même si nous avons l'impression que le héros principal est Romain, c'est d'amour maternel qu'il est question, autant dans le film que dans le roman, et c'est ce qui en fait la force.
Nina a toujours cru en lui, car elle n'avait plus que lui, et voulait qu'il réalise ce qu'elle n'avait pas réussi à faire dans sa vie. Elle voulait qu'il devienne écrivain et elle lui avait prédit un destin fabuleux...il l'a eu !
Car, à force de dire à tout le monde que son fils deviendrait quelqu'un, lui, n'a pas eu d'autre choix que de le devenir...
Son récit est un hommage vibrant à cet amour maternel incommensurable. Toute sa vie, même lorsqu'elle ne sera pas auprès de lui, c'est pour elle, Nina, et parce qu'elle l'a toujours soutenu quoi qu'il arrive, qu'il luttera et fera tout pour réussir. Mais ce soutien l'étouffera aussi et sera un fardeau très lourd à porter...
L’humour a été pour moi, tout le long du chemin, un fraternel compagnonnage ; je lui dois mes seuls instants véritables de triomphe sur l’adversité. Personne n’est jamais parvenu à m’arracher cette arme, et je la retourne d’autant plus volontiers contre moi-même, qu’à travers le "je" et le "moi", c’est à notre condition profonde que j’en ai. L’humour est une déclaration de dignité, une affirmation de la supériorité de l’homme sur ce qui lui arrive...
[extrait du roman]
Ce film a été pour moi un grand moment de bonheur !
Comme vous pouvez le voir sur l'affiche, il a été réalisé par Eric Barbier, avec Charlotte Gainsbourg, émouvante dans le rôle de la mère (Nina), et Pierre Niney dans le rôle de Romain (adulte).
En principe, je ne vais jamais voir un film inspiré d'un livre, car il ne correspond que rarement à ma propre imagination, et j'ai peur d'être déçue par l'adaptation forcément différente.
Pour une fois, le scénario est très proche de l'histoire, même si bien sûr il ne raconte pas l'histoire en entier, et je dois reconnaître que l'ambiance est très bien rendue. Le côté intimiste, et les propos sonnent toujours juste. De nombreuses anecdotes sont reprises avec bonheur et les moments tragiques sont très réalistes et émouvants.
Pierre Niney est fabuleux dans le rôle de Romain et il s'est approprié ce rôle de façon extrêmement touchante.
Charlotte Gainsbourg, dont je ne suis pas une grande fan pourtant, joue son rôle de mère, passionnée, excessive et possessive de façon remarquable, et nous donne à voir un personnage qui sonne juste et qui nous touche...
Ce film est donc un bel hommage à Romain Gary qui a aussi écrit sous différents pseudonymes dont le plus connu est, Emile Ajar.
Voici le lien vers la seule chronique de cet auteur que j'ai réalisé sur mon blog. Il s'agit de "La vie devant soi", un autre roman que j'ai beaucoup aimé et pour lequel l'auteur (sous le pseudo d'Emile Ajar) a obtenu le Prix Goncourt en 1975. Il avait déjà obtenu le Prix Goncourt en 1956 pour "Les racines du ciel" écrit sous le nom de Romain Gary.
Un auteur à découvrir sans tarder si vous ne l'avez pas encore fait et un film à voir donc, si vous en avez l'occasion, avant ou après la lecture du livre, l'un pouvant vous donner envie de découvrir l'autre...
Il n'est pas bon d'être tellement aimé, si jeune, si tôt. Ça vous donne de mauvaises habitudes. On croit que c'est arrivé. On croit que ça existe ailleurs, que ça peut se retrouver. On compte là-dessus. On regarde, on espère, on attend. Avec l'amour maternel, la vie vous fait à l'aube une promesse qu'elle ne tient jamais. On est obligé ensuite de manger froid jusqu'à la fin de ses jours.