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Cela faisait longtemps que je n'avais pas admiré ce joli papillon coloré, peu fréquent en Provence.
Mais cet été, encore une fois en Haute-Loire, mes lavandes étaient envahies par toutes sortes de papillons et j'ai eu tout loisir de les observer et de les photographier...
La Petite Tortue (Aglais urticae) a un nom bien mystérieux.
Si "Aglais", provient bien d'Aglaé, la messagère d'Aphrodite, déesse de la beauté, et fait bien référence à la beauté de ce papillon, et "urticae" au fait que la larve se nourrit exclusivement de feuilles d'orties, c'est beaucoup plus difficile de comprendre son surnom.
En effet, on ne voit pas très bien d'où provient ce surnom de "petite tortue". Les anglais l'appellent "small tortoiseshell" ce qui signifie "petite écaille de tortue". Les allemands eux surnomment ce papillon "Kleine Fuchs" ce qui signifie "Petit-renard" faisant très significativement référence à la couleur de ses ailes.
Quoi qu'il en soit, c'est un papillon qui ne passe pas inaperçu, car il mesure tout de même 4 à 5 cm et sa couleur orangé est superbe. C'est vrai que les dessins sur ses ailes font penser à des écailles...
Quand on s'approche, on distingue bien les bords des ailes, agrémentés de lunules bleues, chacune entourées de noir.
Vers l'avant, les ailes antérieures présentent une bordure jaune et noir et à l'extrémité, une grosse tache blanche qui se voit même sur les individus âgés.
Le revers des ailes est beaucoup plus terne et j'ai mis quelques jours à comprendre qu'il s'agissait du même papillon !
Ces couleurs noirâtres lui permettraient de se cacher dans les feuilles mortes. Ainsi les prédateurs passent leur chemin...
Le bout des antennes est blanc. J'ai appris récemment que le bout des antennes était très important pour faire la différence entre certaines espèces de papillons. Donc dorénavant, je leur demanderai de me les montrer !
La Petite Tortue butine toutes sortes de plantes herbacées, en particulier les centaurées et les valérianes, et même quelques plantes arbustives, comme les aubépines.
J'ai été très surprise d'apprendre que ce papillon commun était en voie de disparition dans certaines régions ouest de la France. Il a aussi quasiment disparu en Grande-Bretagne, alors qu'il était abondant, il y a une dizaine d'années.
Il faut dire aussi que ce joli papillon très coloré et que l'on ne peut confondre qu'avec la grande tortue, a la particularité de pondre sur les orties. Oui vous avez bien compris, les orties, vous savez bien ces plantes urticantes, abondantes près des fermes et des bergeries et dont nous cherchons tous à nous débarrasser car elles deviennent un peu trop envahissantes dans nos jardins.
Nous sommes donc nous aussi responsables de la disparition de cette espèce car ce ne sont pas nos agriculteurs qui luttent contre les orties, en employant des pesticides, mais bien nous, les jardiniers amateurs...
Enfin moi, en Haute-Loire, j'ai choisi de les arracher et il en repousse toujours assez pour que je les cuisine en gratin, en potage ou en tartes, ou que je les mette au compost, ou autres usages...mais du coup, je participe aussi, à ma manière, même sans produit chimique, à la destruction massive de ce joli papillon et de l'habitat de ses larves !
Le problème n'est pas si simple et les chercheurs ont observé récemment que même lorsque des orties subsistent abondamment dans la région, ces papillons peuvent disparaître.
Alors... évitons de nous culpabiliser, il y a certainement d'autres causes, les étés trop secs ? les hivers trop doux puisque c'est un papillon qui vient du nord ? un prédateur plus agressif car en manque de nourriture ?
En tous les cas c'est une espèce à surveiller de près...
Certains spécimens, en ville ou dans les jardins s'observent sur le Buddleia, l'arbuste aux papillons. Mais je n'ai pas trouvé d'indication pour savoir où les adultes vont pondre, s'il n'y a pas de friches aux alentours, ni d'orties pour nourrir les larves, ni de granges abandonnées pour que certains adultes de la dernière génération y passent l'hiver pour hiberner, ce qui est encore une de ses particularités...
A savoir donc, si en fin d'hiver, vous en trouvez un dans votre garage ou la remise du fond du jardin. Ne l'écrasez pas et ne le jetez pas non plus à la poubelle, même si vous pensez qu'il est mort et que vous le trouvez bien mal en point. Mettez-le au soleil. Vous serez peut-être surpris de le voir s'envoler et il ira se reproduire pour fonder la première génération de l'année, c'est prouvé !