Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...
Comme je vous l'ai dit récemment lorsque nous retournons nous promener en famille au Lac du Bouchet, situé entre la commune de Cayres et celle du Bouchet -Saint-Nicolas, en Haute-Loire, nous nous garons très fréquemment, surtout en été quand il y a du monde, au parking de la Croix de la chèvre.
La vue d'en-haut sur le lac est magnifique, un peu moins dégagée cependant en été !
Je vous ai déjà raconté dans mon article de septembre dernier, une version de la légende qui a précédé l'édification de cette croix dans les années 50. Elle se retrouve résumée, sur ce panneau informatif.
J'ai trouvé une autre version, plus complète sur un blog...si vous avez envie de la lire jusqu'au bout !
Francisque Mandet, dans l’Ancien Velay, nous donne une variante de cette légende qui diffère de la précédente sur quelques points essentiels, notamment la métamorphose en pierre de la vieille femme et de sa chèvre.
Dieu voulant un jour éprouver les habitants d’une ville, autrefois bâtie à l’endroit où se trouve le lac du Bouchet-Saint-Nicolas, descendit sur la terre et revêtit la forme d’un vieillard infirme et malheureux. Appuyé sur un grand bâton, le mendiant frappa aux portes de toutes les maisons de cette ville sans qu’une seule s’ouvrît, sans qu’une main charitable lui tendit une aumône; au contraire, on répondait à ses pleurs, à ses humbles supplications par de grossières injures.
Aussi, Dieu s’éloignait-il, décidé à la plus terrible vengeance, lorsqu’il aperçut une modeste cabane à laquelle il ne s’était point adressé. Il frappe, une femme pauvre et courbée sous le poids des années vient lui ouvrir. « Vous souffrez, lui dit-elle, je souffre aussi; vous avez faim, voyez ma profonde misère, n’importe; entrez, mon hôte, j’ai là une chèvre dont j’ai vendu les chevreaux, j’ai un peu de farine et, tandis que vous vous reposerez sur ce banc, je pétrirai un pain, je trairai ma chèvre, puis nous partagerons ce frugal repas. – Eh quoi ! s’écria le vieillard, est-ce donc ici, dans cette chaumière dénudée, que se trouve la seule âme accessible à la pitié ! Méchantes gens, malheur à vous ! Femme, ajouta-t-il, ne perds pas un instant, prends ta chèvre, suis ce chemin sans te retourner, quelque bruit que tu puisses entendre, et fuis ces maudites contrées que Dieu va punir… » A ces mots, le vieillard, dépouillant son enveloppe mortelle, disparaît dans une éblouissante clarté.
– Encore toute émue de cette miraculeuse apparition, le vieille de la montagne se hâte d’obéir; mais, à peine est-elle arrivée au sommet du pic voisin, que sa chèvre pousse des cris lamentables, la terre tremble, le ciel s’obscurcit, les nuages tombent du ciel comme de noirs rideaux, un bruit affreux emplit l’air et glace d’épouvante la malheureuse femme. En ce moment terrible, elle oublie la défense que Dieu vient de lui faire; la curiosité la pousse, elle se retourne : ô prodige ! la ville a disparu; un lac immense, noir, bouillonnant, est à la place et vient d’engloutir toute une population maudite… Effrayée de ce qu’elle vient de voir, la fugitive veut hâter le pas; il est trop tard, ses pieds sont à jamais fixés au rocher; elle et sa chèvre sont changées en pierre.
– Ce fut pour perpétuer la mémoire d’un aussi grand prodige que les nouveaux habitants élevèrent une croix à l’endroit de cette métamorphose et lui donnèrent le nom de Croix de la Chèvre.
http://leblogdeviviane.free.fr/index.php/2016/09/02/la-croix-de-la-chevre/
Donc pour résumer l'histoire à ceux qui ont eu la flegme de lire jusqu'au bout...le village du "Petit-Puy" qui se trouvait à l'emplacement actuel du lac, aurait été englouti par les eaux... et les jours de grand beau temps, on pourrait voir les habitations au fond de l'eau et même entendre le tocsin.
Il faut en conclure que la curiosité est un vilain défaut...en effet, on raconte aussi aux alentours du lac, mais peut-être est-ce aussi une légende, qu'un jour un villageois voulut s'approcher un peu trop près du village englouti : il se rendit au milieu du lac et immergea une marmite accrochée à une longue corde. Elle remonta emplie de sang. Le pauvre fut sauvé de la noyade par Saint-Nicolas lui-même, le protecteur et patron du village proche.
Dans une autre version, la marmite est remontée rougie par les flammes qui se consument toujours au fond du lac...
Quoi qu'il en soit, en 1950, l'abbé Pharisier et un groupe de jeunes agriculteurs décidèrent de tailler une croix en hommage à cette légende.
Les jeunes creusèrent le socle dans la pierre du Bouchet (d'origine volcanique), et la croix fut inaugurée en 1950 ce qui donna lieu à de nombreuses réjouissances.
Voici donc, quelques photos de cette croix. Côté chèvre d'abord, bien sûr !
Puis côté... colombes, symboles de paix.
Le lac du Bouchet a toujours inspiré de la crainte. Les femmes avaient peur d'y plonger leur linge.
Il y a trente ans encore, les gens du pays nous mettaient en garde quand on y emmenait nos enfants patauger. Même les nageurs de haut niveau hésitaient à le traverser à la nage et de nombreux pêcheurs et baigneurs y ont péri noyés. C'est vrai que l'eau y est souvent très froide, ce qui explique sans doute les noyades. De plus, certains corps n'ont jamais été retrouvés à cause de la vase et de la profondeur du lac (28 mètres).
Il n'en fallait pas plus pour que la plupart des gens aient la crainte de cette eau cristalline d'une couleur de rêve, mais dont les profondeurs s'avéraient menaçantes...Tous, y compris les pêcheurs, avaient peur d'être emportés par un tourbillon, s'ils s'aventuraient par mégarde au centre du lac !
Personne n'ose encore aujourd'hui s'aventurer loin des rives et ceux qui tentent la traversée courageusement ne sont pas forcément suicidaires (800 mètres de longueur seulement !). Par contre ils redoutent encore de la faire en passant par le centre...
Mais le plus grand secret du lac ne réside pas dans ce village englouti comme nous le dit la légende, ni dans un mystérieux et inexplicable tourbillon.
En fait, malgré les recherches et les nombreux travaux des géologues, personne ne s'explique d'où proviennent les eaux du lac. Aucun ruisseau ne s'y déverse et aucune source connue ne l'alimente.
L'eau qui alimente le lac provient-elle uniquement des eaux de pluie et de ruissellement ? Y aurait-il des remontées d'eau le long de fissures souterraines ?
Nul ne le sait encore avec certitude...
D'où viennent les poissons, me direz-vous ? Et c'est une bonne question !
Ils sont le résultat d'une implantation humaine...et comme ils se sont plu dans ces eaux cristallines, ils se reproduisent pour le plus grand plaisir des pêcheurs.
Seuls les paysans du coin, qui pourtant ne savent pas nager pour la plupart, sont sereins car "plus les eaux du lac sont basses, plus la moisson sera abondante" et c'est le cas cette année !
Le lac du Bouchet n'a peut-être pas encore livré tous ces mystères...et à l'échelle géologique, il deviendra sans doute un jour une simple tourbière, comme beaucoup de lacs de la région.
Nos descendants verront bien alors, si un village se cache vraiment au fond de l'eau...comme nous le dit la légende mais nous ne serons plus là pour qu'ils nous le racontent !