Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...
La veille de la fête du Travail, un peu de couleurs égayèrent la grisaille ordinaire de la rue. Les quelques fleurs ici et là de chaque côté s'ouvraient, les balisiers rouges et les amarantes crêtes de coq embellissaient les murs, et les rosiers de Chine, bien que fichés dans de vieilles bassines ou d'anciennes marmites, luttaient vaillamment, déployant des pétales jaune pâle ou roses. Le ciel était d'un bleu éclatant, comme s'il avait été peint. La brise était douce au visage...
Dans un petit village de la Chine des années 80, trois adolescents, Baorun, Liu Sheng et Princesse se rencontrent.
Princesse, est une petite orpheline qui a été recueillie par le jardinier de l'hôpital psychiatrique.
Liu Sheng est un séducteur qui a un certain pouvoir sur les deux autres car sa famille a acquis une relative prospérité.
Baorun vit dans la pauvreté avec ses parents et Grand-père.
Mais voilà que Grand-père commence à perdre la tête (il "perd son âme") et se met à creuser des trous partout au pied des arbres, à la recherche d'une lampe qui contiendrait d'après ses dires un véritable trésor, c'est-à-dire deux os ayant appartenu à ses ancêtres qu'il lui faut honorer d'urgence, s'il veut retrouver sa raison.
Les parents de Baorun décident de le placer à l'asile, où il commet tant de bêtises que la famille décide de mettre en place une surveillance étroite.
C'est finalement Baorun qui s'en charge. Il devient un expert dans l'art d'attacher son grand-père sans lui faire mal, pour éviter qu'il ne s'enfuit de l'asile d'une part, mais aussi de creuser partout ce qui l'épuise, et coûte très cher à la famille qui doit à chaque fois payer les dégâts ainsi occasionnés.
Ses deux amis viennent lui prêter mains fortes.
Les trois jeunes gens se disputent en permanence. Princesse est l'objet de toutes les attentions des garçons qui sont tous deux tombés amoureux de cette jeune fille coléreuse et injuste.
Ils vont saborder par leur maladresse toutes leurs chances...
Mais un soir tout bascule car les garçons commettent l'irréparable : ils violentent la jeune fille. Un des deux devra payer...ce sera Baorun.
Nous les retrouverons dix ans plus tard !
Liu Sheng devait faire profil bas, et la blessure de sa vie n'était pas complètement cicatrisée. Baorun le hantait encore, il lui apparaissait à tout moment, de jour comme de nuit. Un matin, alors qu'il passait à vélo sous le pont de la voie ferrée, un train passa au-dessus de lui, à grand fracas ; une ombre noire s'en échappa et vola vers lui, frôla son épaule et s'accrocha au cadre de son vélo. Il se ressaisit et regarda, c'était une boucle de corde de nylon, verte, du diamètre qu'il fallait pour y passer la tête...
C'est un roman que j'ai trouvé très difficile à aborder et dans lequel j'ai mis beaucoup de temps à entrer. La mise en place m'a paru longue, bien qu'on comprenne rapidement les liens qui unissent les personnages entre eux.
L'auteur situe son histoire dans les années 80, une période où la société chinoise est en pleine évolution puisque la Chine est en en route vers le capitalisme.
Il y a un mélange d'humour qui vire parfois au loufoque (surtout autour de la folie du grand-père), d'une certaine poésie que l'on retrouve chez les auteurs chinois et d'une dureté de propos qui peut choquer.
Le roman est divisé en trois parties, chacune mettant à l'honneur un des personnages mais les autres sont tout de même présents.
La condition de la femme est mise en avant, mais aussi la vie quotidienne de cette génération de jeunes qui vivent pour la première fois dans l'espoir d'une vie meilleure mais qui perdent peu à peu leurs repères et les valeurs ancestrales transmises depuis des générations. En fait, c'est une génération sacrifiée ou presque, car aucune amélioration de leur condition de vie n'est possible dans l'immédiat.
J'ai trouvé ce roman très long à lire, trop tortueux bien que très réaliste et je me suis souvent perdue dans sa lecture, tant il y a de digressions et de scènes qui n'apportent rien à l'histoire elle-même, ni à l'ambiance. Aucun des personnages ne m'a paru réellement sympathique, à part le grand-père qui reste finalement le plus humain de l'histoire.
J'ai cependant aimé les descriptions de la vie quotidienne dans la petite rue des Cédrèles, un quartier qui conserve encore les traditions ancestrales, un véritable refuge pour les différents personnages.
En fait, quand j'ai appris que l'auteur écrivait plutôt des nouvelles, cela ne m'a pas étonné car ce long roman aurait pu être, sans problèmes, découpé en différentes histoires ...
C'est donc une lecture à réserver à celles et ceux qui aiment la littérature chinoise et veulent connaître un peu mieux l'auteur de "Epouses et concubines".
"Le dit du loriot", dont le titre a été précédemment traduit, avant la traduction du livre en français par "Chronique du moineau jaune", a été récompensé en 2015, par le prix littéraire le plus prestigieux de Chine...le prix Mao Dun.
Si vous voulez en savoir plus sur l'auteur, je vous mets le lien vers sa biographie.
Ses larmes coulaient sur les mains de Baorun. Il en essuya soudain une sur la corde, qui l'absorba en silence. Les liens avaient été noués par un expert en la matière, simples et coulants, traçant des lignes géométriques ; tant qu'elle ne bougeait pas, ce n'était pas trop inconfortable. Elle se fit obéissante, peut-être par intelligence, peut-être par désespoir. Ils arrivèrent à l'asile...La camionnette s'arrêta devant le château d'eau. Baorun relâcha sa prise, la dévisagea, écrasa une larme au coin de son œil, un si joli visage, il est tout enflé maintenant, dit-il. Pourquoi pleurer ? Tu me dois dix ans, dix ans de liberté...
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