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Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...

Visite d'une forge ancestrale dans la Drôme (1) : un lieu, une histoire, des métiers...

En parallèle de la Fête de la transhumance, dont je vous ai parlé il y a quelques jours, avait lieu dans toute la région de Die, le même week-end, les "Journées du Patrimoine de pays et des moulins", journées qui mettaient à l'honneur les métiers et savoir-faire d'autrefois ou d'aujourd'hui, du pays Diois.

Ainsi de nombreuses visites étaient organisées dans la ville de Die : les abattoirs, la savonnerie, un atelier de tournage sur bois, un atelier de confection de vêtements, une ferme d'élevage de canard et bien sûr la cave coopérative où l'on fabrique la délicieuse clairette de Die. 

De quoi s'occuper tout le week-end...mais bien sûr, il a fallu choisir ! 

Nous avons donc choisi de visiter une forge qui se situe tout près de la porte Saint-Marcel.

Nous avons fait la connaissance à cette occasion de Michel Maillet, un des descendants d'une famille dioise de maréchal-ferrant,  qui nous a permis d'approcher de près ce lieu hautement chargé en émotion de son patrimoine familial, car cette forge a également servie durant des décennies de maréchalerie. 

 

L'entrée de la forge familiale est bien gardée par un berger que l'on peut voir toute l'année à travers la vitre de l'atelier. La maison est accolée aux remparts de la vieille ville. 

Le berger qui garde l'entrée...vu de l'intérieur de l'atelier

Le berger qui garde l'entrée...vu de l'intérieur de l'atelier

Un peu d'histoire...

 

Le métier de maréchal-ferrant existe depuis plus de 2000 ans. Le terme de "maréchal" vient de "marhskalk" en ancien français qui désignait un domestique ("shalk") qui s'occupait des chevaux ("marh").  

Bien sûr peu à peu depuis le développement de l'automobile puis du tracteur, les chevaux ont disparu du paysage quotidien des villes et des campagnes. Autrefois, c'est le propriétaire du cheval qui le menait directement chez le maréchal-ferrant.

Aujourd'hui, il existe environ 1600 maréchaux-ferrants en France. Ceux sont eux qui maintenant se déplacent avec leur matériel et ils n'ont le plus souvent plus d'atelier spécifique. Ils s'occupent en particulier des chevaux de course... et ils ne forgent plus eux-mêmes les fers qu'ils posent aux chevaux, exception faite de ceux de la garde républicaine. 

 

Le maréchal-ferrant est un artisan qui a joué un rôle essentiel au sein de la communauté paysanne. Sans lui, l'agriculteur n'aurait pas pu accomplir son travail quotidien. On le craignait souvent car il savait maîtriser les éléments et travailler la matière, mais c'était un personnage respecté par tous. 

Il avait pour fonction principale de ferrer les sabots des chevaux, mais aussi ceux des boeufs qui autrefois, tiraient la charrue dans les champs.

 

Le maréchal-ferrant a un vrai don : il sait parfaitement adapter la forme des fers en fonction de la forme des sabots et de l'usage qui en sera fait. 

En effet la corne du sabot d'un cheval pousse en moyenne d'1/2 centimètre par mois. Le pied du cheval porte tout son poids. Chaque pied correspond en fait à un seul doigt et le sabot à l'ongle. Je ne vais pas vous faire un cours d'anatomie du cheval, rassurez-vous !

Mais il faut savoir que le fer à cheval est le seul moyen de protéger la corne de l'usure, d'où l'importance pour le maréchal-ferrant de bien surveiller l'état des fers posés...

 

Bien sûr, un maréchal-ferrant doit aussi bien connaître les chevaux, et avoir la mémoire de ceux qu'il connaît, tant au niveau de leur comportement que de leur anatomie.

Il peut avoir à corriger un défaut de position du pied par exemple et il devient alors orthopédiste.

Autrefois, il savait aussi soigner leurs dents, s'occuper de leur crinière et vérifier leur bonne santé générale. Il était le seul à connaître les maladies du sabot. C'était un maréchal-soigneur et il était en quelque sorte l'ancêtre de notre vétérinaire. 

Mais revenons à notre forge donc, maintenant que vous savez que c'est une ancienne maréchalerie...

Le coeur d'une forge, c'est son foyer...autrefois le feu fonctionnait au charbon puis ensuite, c'est le bois qui a été utilisé. De nos jours les maréchaux-ferrants se déplacent avec des forges qui fonctionnent au gaz. C'est plus commode quand on se déplace en camionnette avec une simple trousse d'intervention.

 

Le feu devait rester allumé toute la journée dans l'atelier et être toujours prêt car les interventions d'urgence n'étaient pas rares et les jours de pluie, il y avait même affluence !  

La demi-obscurité était de mise pour que le maréchal-ferrant puisse contrôler la bonne couleur du fer mis à chauffer dans le foyer. 

 

 Vue générale de la forge de Michel Maillet et du foyer en fonctionnement

Vue générale de la forge de Michel Maillet et du foyer en fonctionnement

Le soufflet de forge (en cuir) est actionné par un bras relié à une chaîne (la branloire) qui permet d'activer manuellement le feu jusqu'à ce que le fer atteigne la température idéale pour le forger, aux environs de 1000°,  c'est-à-dire quand le fer devient rouge cerise ou orangé foncé...Je n'en sais pas plus !  

Le magnifique soufflet de forge en cuir. Le magnifique soufflet de forge en cuir.

Le magnifique soufflet de forge en cuir.

L'enclume est indispensable pour donner aux fers la forme désirée (ce qu'on appelle la tournure). On peut aussi l'utiliser pour marteler le fer. 

L'importance de l'enclume n'est pas à démontrer...dans un atelier de forge !

L'enclume se termine par un ou deux pointes appelées bigornes. Chaque enclume doit être fixée sur un billot pour assurer sa stabilité lors des frappes. 

 

Dans l'atelier de Die, il y a deux enclumes de deux tailles différentes :

- La petite enclume est une enclume typique de forgeron (sans doute la plus ancienne de l'atelier).

Elle dispose sur le dessus de deux trous : un à section carrée, un rond.

La section carrée permet de fixer une enclumette qui servait apparemment à battre les faux (et les faucilles ?) avant de les aiguiser.

Eh oui, on oublie qu'à cette époque les  lavandes, les céréales et le foin étaient toujours coupés à la main...et qu'il fallait aiguiser régulièrement les outils, après les avoir réparé. 

Le maréchal-ferrant a besoin de nombreux outils...et d'une tenue particulière. 

Il porte en effet la plupart du temps un grand tablier en cuir qui protège ses jambes.

 

- l'enclume est indispensable pour donner aux fers la forme désirée ce qu'on appelle la tournure. On peut aussi l'utiliser pour marteler le fer. 

La petite enclume surmontée de son enclumette...

La petite enclume surmontée de son enclumette...

On retrouve sur une des faces de chaque enclume, la marque du fabriquant (en haut), la date de fabrication (en bas), le poids  (à droite) et le numéro de série (à gauche).

 

La plus grosse enclume est typique du maréchal-ferrant car elle a d'un côté une bigorne (extrémité) conique qui servait à mettre en forme les fers et de l'autre, une bigorne carrée appelée le "cul de l'enclume". 

Elle a été fabriquée dans les ateliers de Jacques Claudinon, appelés "l'Usine des Platanes", en 1900 et pèse 164 Kg, comme vous pouvez le constater par vous-même sur mes photos. Les ateliers de Jacques Claudinon et de son fils Georges qui a pris la suite de son père, ont fermé en 1963. A leur place désormais, dans la ville de Chambon-Feugerolles (située à 10 km de Saint-Etienne), les ateliers ont été réhabilités et transformés en salle de spectacle ultramoderne, depuis 2006...

 

La grosse enclume et ses inscriptionsLa grosse enclume et ses inscriptions

La grosse enclume et ses inscriptions

 

Le principal outil utilisé pour forger le fer est le marteau...

Je devrais dire les marteaux !! Il y en a de toutes sortes dans l'atelier et ils sont tous magnifiques. 

De beaux marteaux...
De beaux marteaux...

De beaux marteaux...

Le saviez-vous ?

 

Saint Eloi est le patron des maréchaux-ferrants et de tous ceux qui travaillent le fer (orfèvres, chaudronniers, dinandiers...). On le fête le 1er décembre. 

Au XIVème siècle, pour faire accepter Saint ELOI comme Saint Patron, par la corporation des maréchaux-ferrants, une légende est créée...

"Saint -Eloi alors maréchal-ferrant avait grande difficulté à ferrer un cheval qui ne voulait pas se laisser faire. Pour être plus à son aise, il coupa le membre du cheval, le plaça sur l'enclume, et posa le fer. L'opération terminée, il replaça le sabot ferré sans dommage pour l'animal. Il fit ainsi pour les trois autres membres."

 

En son hommage, les maréchaux-ferrants, ayant fini leur Tour de France de compagnons, donnent le nom de "Bouquet de la Saint Eloi" à leur oeuvre finale, qui réunit toutes les difficultés et prouesses réalisées par l'artisan au cours de sa formation.

Il doit y mettre en avant son habileté ainsi que tous les modèles de fer qu'il a découvert pendant sa formation. Ils sont disposés en éventail, soudés ou rivetés les uns aux autres. Le bouquet est parfois entouré d'une guirlande de laurier.

On trouve sur les plus anciens, des scènes champêtres ou bien des scènes de la vie quotidienne des compagnons du devoir... 

Ce bouquet était traditionnellement accroché au-dessus de la porte du nouveau maréchal-ferrant lorsqu'à la fin du tour de France, il s'installait. C'était donc à la fois une enseigne, et une façon de mettre en avant les qualités de l'artisan, sa minutie et son savoir-faire. 

 

Le dessin du bouquet de Saint Eloi d'un des ancêtres de Michel Maillet

Le dessin du bouquet de Saint Eloi d'un des ancêtres de Michel Maillet

Quelquefois comme je l'ai déjà dit, le maréchal-ferrant donnait d'autres soins aux chevaux. 

 

Dans l'atelier par exemple, il y a une étrille qui servait à démêler (ou arracher) le crin du cheval, à la fois pour entretenir sa crinière mais aussi parce que cela le calmait, avant ou après l'intervention... 

 

L'étrille

L'étrille

Autrefois, le maréchal-ferrant était le plus souvent le seul forgeron du village. Il fabriquait donc divers objets...

 

Il pouvait même jouer le rôle de serrurier : non seulement il fabriquait des clés forgées mais avait en sa possession tout un nombre de passes pour dépanner les étourdis qui déjà à l'époque égaraient leur trousseau !

 
Les clés forgées

Les clés forgées

Il réparait aussi des outils, aiguisait les faux et faucilles, fabriquait des outils spécifiques selon les besoins de ses clients ou les siens.

 

Voilà par exemple une faucille sans doute amenée là pour être soit réparée, soit aiguisée, à moins qu'elle n'ait été fabriquée dans l'atelier.

Une faucille

Une faucille

Et là, une pince fabriquée il y a très longtemps pour un usage particulier inconnu.

Une pince ancienne

Une pince ancienne

Il utilisait aussi dans sa pratique de forgeron, des poinçons...

Une boîte de poinçonsUne boîte de poinçons

Une boîte de poinçons

Certains objets se trouvant dans l'atelier attestent de la bonne intégration de cette forge dans la vie de la communauté.

 

Ainsi on retrouve une balance romaine qui était peut-être celle en usage dans la famille.

La balance romaine

La balance romaine

On trouve aussi d'autres pièces forgées comme par exemple au centre de la photo une force, cette grande cisaille forgée qui servait à tondre les moutons...

 

Et bien d'autres outils dont je ne connais pas du tout l'usage ! 

La force au milieu d'autres outils...

La force au milieu d'autres outils...

Cet atelier a évolué au cours du temps...de maréchalerie et forge, il est devenu aujourd'hui simple atelier familial. 

 

De nombreux objets ou outils présents ont été utilisés dans l'atelier au fil des générations, récemment  ou pas, et n'ont aucun rapport avec le métier de forgeron ou de maréchal-ferrant mais ils ont été bien utiles à la vie quotidienne de l'atelier pendant toutes ces années. 

 

Vous êtes partants pour poursuivre la visite ?

Demain...c'est promis !

Je vous présenterai les différentes étapes du ferrage des chevaux et les outils indispensables au maréchal-ferrant... 

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J
Bonjour !<br /> La forge ! C'était l'un des points obligés de mon village, avec les clang du marteau qui donnaient le ton... c'était l'époque où il y avait encore des chevaux, et où les machines agricoles pouvaient être réparées par un forgeron de métier.<br /> Dans mon village natal, l'atelier existe toujours mais il sert désormais à vendre des savons fabriqués sur place, à base de lait d'ânesses. Il y en a tout un troupeau, une trentaine ! Le labo est dans un coin de l'atelier, et au-dessus, pour éclairer en hiver, est suspendu un lustre de fer forgé, sans doute fut-ce la dernière fois où la forge fut utilisée.<br /> https://www.marais-poitevin.com/produits-regionaux/du-coq-a-l-ane-savonnerie-asinerie-du-marais-poitevin
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M
Merci de votre passage ici et de votre témoignage. Dommage que le marais poitevin soit trop loin de chez moi je serais venue volontiers découvrir cet atelier installé dans l'ancienne forge. Je pense que ce lien ne manquera pas d'intéresser certains de mes lecteurs...Bonne journée
P
je viens de visiter votre forge , à mon tour de vous dire que j'en possède une située à"VILLEVEYRAC 34770" mon père l'a achetée en 1936 et elle a été crée en 1920 .j'ai travaillé avec mon père à la forge j'ai 77 ans et je sais fabriquer les outils aratoires pour chevaux ,j'en possède quelques uns. j'ouvre ma forge un jour par an pour la visite gratuite et je forge pour m'amuser ce jour là. dommage que personne ne vienne pour récupérer tout mon savoir sur la fabrication des outils.vous pouvez me joindre par mail
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M
Vous faites bien de venir ici parler de votre forge et de la possibilité de la visiter. Si vous ouvrez votre forge à la visite, il faut espérer que de nombreux visiteurs en profiterons car personnellement j'ai trouvé cette visite passionnante et je suis bien persuadée qu'il en est de même pour la votre. Croisons les doigts que des journées du patrimoine puissent à nouveau être ouvertes cette année. Merci pour votre message...si je passe un jour par chez vous je ne manquerai pas de vous contacter.
É
Bel article sur ce métier qui est devenu très rare...
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M
Maintenant nous avons des automobiles et des moyens de transport plus modernes...mais il y a toujours des passionnés de chevaux et entre les courses et les loisirs, heureusement le métier perdure. Par contre il y a de moins en mois de forgeron.
É
Travail ancestral par déformation du metal à chaud ou à froid .... c'est fascinant! Merci pour les explications! Bon week - end! Bises!
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M
C'est vrai c'est un travail fascinant et les outils utilisés semblent bien mystérieux quand on est pas du métier...<br /> Bon dimanche !
N
Bonsoir Manou, helas, je ne pourrai le faire car je n'ai pas connue grand-pere car il est decede lorsque je n'etais qu'une enfant, Je t'embrasse,Douce nuit
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M
Ce n'est pas grave Nell...Moi aussi tu sais je n'ai connu qu'un seul de mes grands-pères et encore pas bien longemps : c'était l'époque qui voulait çà. Ils se sont usés au travail. En fait je disais çà pour te taquiner...
C
Ce savoir-faire se transmettait de génération en génération, et c'est vraiment bien qu'il perdure encore ! Merci pour toutes ces explications Manou, c'est vraiment très intéressant !<br /> Excellent week-end !<br /> Cathy
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M
C'est vrai que ces métiers perdurent et c'est déjà pas si mal...bonne soirée Cathy
N
Magnifiques explications qui m'ont données beaucoup d'émotion, Manou, car je m'imaginais mon grand-père... IL était maréchal-ferrant. Gros bisous et superbe journée
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M
Super ! Alors tu pourras corriger mon article prévu à la publication...demain !?<br /> Bises et bon après-midi...Chez nous il fait super chaud dehors.
M
Wow, quelle belle visite, merci pour ce beau partage impressionnant et intéressant, superbe! Bise et bon vendredi tout en douceur!
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M
Merci Maria-Lina j'ai trouvé en effet cette visite très intéressante !<br /> Chez toi c'est déjà le soir ??
M
Reportage très intéressant ! On comprend mieux le travail des artisans d'autrefois. Et ce soufflet en cuir est de toute beauté. Saint-Eloi, on le fêtait dans le Nord (ma région d'origine) a l'epoque, il y avait de nombreuses chaudronneries. Mais ça c'était avant... À demain Manou pour la suite. Bisous.
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M
Sûr aujourd'hui on peut toujours chercher ce type de métier... Alors si tu es du Nord, tu en sais plus que moi sur Saint Eloi :)<br /> Oui il était temps que je publie la visite faite il y a déjà 10 jours...<br /> Bonne fin d'après-midi.