Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...
C'est une question que beaucoup de non-provençaux se posent et comme l'été arrive, j'ai décidé de tenter d'y répondre en vous racontant la petite histoire du pistou provençal que nous préparons avec le basilic cultivé en Provence.
Celui à petites feuilles est particulièrement recommandé car il est beaucoup plus parfumé...
Je suis d'ailleurs souvent surprise que l'on puisse confondre les deux préparations mais, bon je suis tombée dans le pistou lorsque j'étais petite...alors, je vous pardonne et comme toujours chaque famille est sûre de détenir la vérité, je ne fais donc pas abstraction à la règle !
A l'origine, dans les deux cas, il y avait le PESTO et la LIGURIE...
AH, ces italiens !
Le pesto des italiens d'aujourd'hui est une sauce traditionnellement composée de basilic, ail, fromage, pignon et huile d'olive. C'est la 2ème sauce la plus consommée dans le monde après la sauce tomate.
Mais il y a pesto et pesto !
Un peu d'histoire s'impose...
Le mot "Pesto" (mot d'origine génois) vient de l'italien "pestare" qui signifie "écraser" "presser" "piler".
Les romains utilisaient déjà un mélange d'huile, d'ail et sel pour aromatiser le poisson.
Le pesto tel qu'on le connait aujourd'hui, serait entré dans le patrimoine culinaire provençal dès le Moyen Âge, quand la ville de Nice était alors génoise... Puis la recette aurait gagné toute la Provence et en particulier Marseille.
Le pesto est utilisé traditionnellement dans les pâtes, les gnocchis, le fameux minestrone à la génevoise, les pizzas, les lasagnes ou tout simplement pour accompagner des légumes grillés ou sur les crostinis (antipasti italien)...
Mais revenons au pesto ligure et à la recette traditionnelle...
D’après la légende, il est question d’un couvent (San Basilio) sur les hauteurs de Gênes (à Prà). Un religieux, lassé de manger quotidiennement des anchois décida de cueillir des herbes aromatiques dont le basilic (nom donné en l’honneur du Saint protecteur du couvent, en l’occurrence Basilio) puis les ajouta à d’autres ingrédients.
Une fois la recette terminée, il offrit aux fidèles, ce qui deviendra par la suite le célèbre "Pesto alla Genovese".
La première recette de pesto a été publiée dans un livre intitulé "La Cuciniera genovesa" sous le titre "Battuto o spaore all'aglio" (pesto) en 1863 dont un des auteurs est Giovanni Ratto.
Pesto : (traduit du génois) terme qui n'a pas d'équivalent précis en italien, est une sorte de sauce ou de condiment qui se compose de basilic, de marjolaine ou de persil, d'ail et de fromage pilés ensemble dans un mortier, puis liée avec de l'huile d'olive et de l'eau de cuisson d'un bouillon que l'on veut aromatiser.
On voit que dans la recette de base, ce n'était pas seulement le basilic qui était utilisé pour le pesto, mais également pour changer de recette, selon les jours, et la période de l'année sans doute, la marjolaine, ou le persil !
Roberto Panizza, patron du restaurant "Il Genovese" qui sert de la cuisine Ligure est l’organisateur d'un championnat particulier : le "Championnat du monde de pesto au mortier".
La sélection pour le championnat 2016 débute aujourd'hui 3 juin 2016, à Paris !
Fabrication du pesto traditionnel
Toute la saveur vient des ingrédients frais et de leur qualité...
Il en faut 7 au total...
Les quantités sont approximatives car elles varient à l'infini selon l'utilisation qui sera faite du pesto.
1 - Il faut du basilic génois ou basilico genovese (100 grammes de feuilles les plus fraîches) et uniquement celui qui pousse sur les collines et prend l'air de la mer (je ne blague pas).
C'est un basilic AOC. Il a un arôme très intense, des feuilles de couleur claire et assez petites.
La variété utilisée et la plus facile à trouver en Provence s'appelle Ocimum maritimum...var. (variété) Genovese.
Certains préconisent de laver le basilic à l'avance et le faire sécher à l'air.
D'autres de ne surtout pas le laver car les essences contenues dans les nervures risqueraient de s'échapper...et de faire oxyder la préparation.
C'est vous qui voyez...
2 - Il faut de l'ail
3 - de l'huile d'olive de la Riviera Ligure DOP du Frantoio Sant'Agata d'Oneglia et uniquement celle-là.
Cette huile, obtenue à partir d'une variété autochtone d'olives appelées "taggiasche" est de couleur jaune or. Ce sont de petites olives caractéristiques des collines d’Oneglia qui sont encore cueillies à la main...
L'arôme de l'huile d'olive est particulier, à la fois fruité et à la saveur d'amande fraîche et de pignons.
4 -des pignons de pin italiens (environ 30 g) poussant près de Gênes bien sûr, sinon c'est pas pareil !
5- environ 50 g de Parmeggiano-Reggiano râpé (de 24 mois).
Fiore Sardo" ("fleur sarde").
N'oubliez pas que la Sardaigne a été longtemps sous la domination de Gênes...l'histoire se retrouve en cuisine.
7- du gros sel des salines de Trapani.
Comment faire vous-même un délicieux pesto ?
Dans un mortier en marbre de Carrare et avec un pignon en bois de poirier (ou de balsa), mettre d'abord les pignons, puis l'ail et commencer à broyer, puis ajouter le basilic et le gros sel (qui va aider à fragmenter les feuilles). Ajouter le fromage râpé. Puis incorporer l'huile d'olive peu à peu...
Le pesto traditionnel est riche en fromage et doit être crémeux.
La vidéo ci-dessous vous en dira davantage...sur le véritable "pesto a la genovese" !
Comment faire un délicieux "pesto a la genovese"
Le pistou des provençaux est donc une adaptation de ce pesto et une sauce traditionnellement provençale. C'est en fait le pesto antique, sans fromage...
Dans sa compostition ne rentre que...
- des feuilles de basilic fraîchement cueillies, environ 4 poignées.
- 4 grosses gousses d'ail frais
- 4 c. à s. de bonne huile d'olive parfumée de 1ère pression à froid.
- gros sel et poivre du moulin
Pas de pignon de pin donc...
Le fromage est facultatif (mais recommandé quand même par les anciens).
Il sera servi en dehors et non incorporé au pistou !
Vous pouvez retrouver ma recette de pistou sur ce blog ICI !
Voilà le mortier traditionnel que ma grand-mère utilisait...et dont j'ai hérité.
Mais je le reconnais, moi-même je réalise maintenant le pistou au mixer...
C'est plus rapide mais c'est vrai que le pistou est plus facilement oxydé avec les lames du robot...et change de couleur.
Le pistou se conserve très bien, une petite semaine au refrigérateur recouvert d'une fine pellicule d'huile d'olive...et lorsque j'en ai vraiment trop je le mets aussi au congélateur.
L'ail y perd un peu de sa force mais nous sommes si heureux de le consommer hors saison !
Quand j'étais enfant, c'était l'ingrédient de base et incontournable de la soupe au pistou.
Par extension, les provençaux appellent souvent pistou !
Et il n'est pas rare sur les marchés de Provence d'entendre des personnes demander du "pistou" en parlant du bouquet de basilic parfumé...qu'elles glisseront dans leur panier.