Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...
Chaque année, quand revient le temps de noël, on sort (du provençal santoun = petits saints). rangé dans un carton, enfoui au fond du placard à vêtements (jamais du garage, car il y fait trop humide !).
Traditionnellement, c'est à la Sainte-Barbe (ou pour faire simple, le premier dimanche de décembre) qu'on la monte et après la chandeleur qu'on l'enlève. Maintenant les temps modernes nous invitent à la monter...quand on a le temps mais au plus tard le dimanche précédent noël, et à la démonter dès le mois de janvier, aussitôt passée l'épiphanie.
Chaque année si on le peut, on achète un nouveau santon pour compléter la collection, en se rendant à une foire aux santons.
La première foire est apparue à Marseille en 1803. Si elle eut lieu tout d'abord près du Vieux Port, elle s'installa assez rapidement (80 ans après !) en haut de la Canebière, le long des allées de Meilhan, où elle est toujours.
Aujourd'hui, à l'occasion des foires et marchés de noël, nombreuses sont les communes de Provence qui proposent la vente de santons. On n'a que l'embarras du choix et à se fixer un budget à ne pas dépasser car la tentation est grande.
Pour installer la crèche dans la pièce principale de la maison, La crèche ne doit de toute façon jamais être placée en contre-bas : elle doit dominer pour être vue ! Et personne ne doit tourner autour non plus, cela porte malheur !
Puis on profite des rayons de soleil d'un dimanche en famille pour aller dans la forêt ramasser la mousse qu'on fait sécher près de la cheminée au moins une nuit, pour en enlever l'humidité (qui, sinon, ne manquerait pas de mouiller les pieds des santons et d'abîmer la poterie). On ramasse aussi quelques branchettes : cistes cotonneux, thym, romarin, petit houx avec ses boules rouges, chêne vert...pour le décor et un peu de lichen pour symboliser la neige.
Un peu de papier alu fera un superbe ruisseau (enfant c'était l'alu d'une tablette de chocolat qu'on gardait précieusement pour emballer le goûter !). Quelques pierres ou galets de Durance symboliseront les collines, quelques branches, la forêt...quelques pincées de farine, la neige (ou quelques débris de coton).
Point n'est besoin de bombe chimique pour faire une jolie crèche !
Et après le repas de noël, on y placera le blé de la Sainte-Barbe, symbole de printemps, donc de renouveau.
Mais rien n'est figé dans la crèche, chacun est libre de la faire à sa façon.
Enfant, chaque jour on déplaçait les santons (sauf ceux de l'étable) : certains se rapprochaient de l'étable en marchant doucement, d'autres allaient vers le village vaquer à leurs occupations, et de petites mains mais bravaient les interdits pour se raconter de longues histoires, où il était question de bergers et de bergères, de chasseurs et de lapins, d'arlésienne...
Bref vous l'aurez compris, la crèche est vivante !
D'où vient la crèche provençale ?
La crèche provençale est une crèche de noël présentant les différents personnages et petits métiers de la Provence. Elle n'est apparue qu'au XVII° siècle.
La crèche n'a pas toujours existé. Aussi bizarre que cela puisse paraître, elle nous vient d'Italie !
Dès le IIIe siècle, des représentations de la Nativité sont gravées sur des couvercles de sarcophages paléo-chrétiens retrouvés en Arles.
On attribue à Saint François d'Assise les premières représentations de la Nativité. C'est lui qui aurait pour la première fois en 1223, mis en scène, la naissance du Christ en utilisant les habitants de son village (Greccio ou Grecchio ?) venus entourer .
La crèche d'église est arrivée d'Italie dès le XIIIe siècle et s'est développée à la Renaissance. Elle était un support de la pratique religieuse et, en commémorant la naissance de l'enfant Jésus, elle est devenue le symbole de noël et de la Nativité pour les croyants.
Pour protéger les figurines de verre, elles étaient placées dans un cadre de bois et fermées par une vitre (à voir au musée Arlaten en Arles).
La Révolution française, en fermant les églises et en interdisant le culte (et la messe de minuit), a incité les familles provençales à créer leur propre crèche chez eux. Les santons étaient alors en cire, en carton, en argile et parfois en mie de pain chauffée et sculptée !
Au XVIIIe et XIXe siècle apparurent des crèches parlantes constituées de marionnettes animées qui bougeaient grâce à des glissières, puis des crèches mécaniques, dans lesquelles les santons en plomb étaient animés comme des automates...
Aujourd'hui c'est la crèche située à Grignan (dans la Drôme) qui est considérée comme la plus grande du monde. On l'appelle le "village provençal miniature". Elle couvre plus de 1100 m2 et met en scène plus de 1000 santons. Le village comprend environ 80 maisons pouvant mesurer 1 mètre de hauteur. Cette crèche est d'ailleurs homologuée par le Guinness des records !
Si vous voulez la visiter: rendez-vous sur le site en cliquant ICI.
La plus petite qui tient dans une coquille de noix est visible à l'éco-musée du Santon et Traditions populaires de Fontaine-de-Vaucluse. On y trouve 2 000 santons de toutes tailles.
La crèche provençale d'Avignon est également célèbre. Elle occupe plus de 50 m2 et met en scène plus de 600 santons. Au départ elle était exposée à l'hôtel de ville mais, laïcité oblige, elle a migré dans une église.
La crèche provençale mêle en fait le profane et le religieux, ce qui explique que beaucoup de provençaux non croyants la réalisent chaque année. Marcel Carbonnel un des grands santonniers de Provence a développé à travers ses santons, les personnages typiques ou célèbres de la région. Certains représentent les petits métiers d'autrefois et montrent la vie du village.
C'est à la crèche que l'on doit la pastorale (représentation vivante et théâtralisée, de la Nativité jouée en provençal) où chaque personnage de la crèche a sa propre histoire...
Aujourd'hui nombreuses sont les communes à proposer une pastorale avant noël ou avant la messe de minuit (comme le voulait la tradition).
La plus célèbre est la Pastorale Maurel qui comprend 5 actes tous en provençal. Elle a été créée en 1844.
Au départ, elle avait une importance religieuse, mais aujourd'hui, vu que la plupart des provençaux ne parlent pas le provençal, elle est devenue un témoignage de la culture provençale et un lien intergénérationnel.
L'histoire, toute simple, est la suivante : les bergers (les pastres) sont avertis de la naissance de Jésus et se rendent à l'étable, suivis par leurs moutons, pour lui offrir des cadeaux. En chemin, ils réveillent les villageois qui les suivent au son du tambourin et du galoubet. Le cortège s'agrandit au fur et à mesure. Chacun apporte des offrandes.
On retrouve dans la pastorale les principaux personnages de notre crèche : le tambourinaire, le meunier, le pêcheur, le rémouleur, les bohémiens...
Les pastorales n'ont jamais été jouées par des professionnels ! Ces acteurs d'aujourd'hui ont le mérite de défendre la culture provençale et la langue, et d'être porteurs d'une tradition fortement ancrée en Provence.
Pour ceux qui veulent en savoir plus, cet article est complété par un autre article sur les santons, ci-dessous...
Petite histoire des santons de Provence - Dans la Bulle de Manou
Dans la crèche provençale, tous les habitants du village viennent apporter des cadeaux à l'enfant qui vient de naître (tradition encore respectée aujourd'hui lors de la naissance d'un nouveau-...
http://www.bulledemanou.com/2013/12/petite-histoire-des-santons-de-provence.html