Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...
Un après-midi d’avril, aussitôt après le déjeuner, mon mari m’annonça qu’il voulait me quitter. Il me le dit tandis que nous débarrassions la table, que les enfants se chamaillaient comme à l’ordinaire dans une autre pièce, et que le chien rêvait en grognant devant le radiateur.
Suite à mon coup de cœur pour les deux premiers tomes de "L'amie prodigieuse", j'ai décidé de me plonger dans les autres romans d'Elena Ferrante pour me faire une idée de son oeuvre.
J'ai donc emprunté "Les jours de mon abandon" à la médiathèque. Il ne restait d'ailleurs que celui-ci en rayon étant donné que d'autres personnes avaient eu la même idée que moi !
Olga a trente-huit ans, un mari, deux enfants et un chien. Elle a décidé de renoncer à sa carrière pour se consacrer à sa famille et semble heureuse de sa vie même si elle a dû renoncer à écrire, sa grande passion.
Aussi lorsque après plus de quinze ans de mariage, un après-midi d'avril, son mari lui annonce qu'il la quitte... son monde s'écroule.
Sur le coup, elle n'y comprend rien, car elle n'a rien vu venir et elle pense même qu'il va revenir et que c'est juste un passage difficile.
Lorsqu'elle réalise qu'il ne reviendra pas, et qu'il l'a quitté pour une autre femme, elle entre alors dans une spirale infernale de questionnements, de suppositions, d'incompréhension.
Pourquoi a-t-elle été abandonnée ?
Olga vit très mal cette séparation...et le lecteur assiste, impuissant à la dégradation de son comportement.
Elle qui était une parfaite maîtresse de maison, ne range plus rien, ne nettoie plus, ne cuisine plus. Ses enfants sont délaissés et doivent se gérer quasiment tout seuls. Elle qui était si cultivée, se met à utiliser des mots grossiers, et à faire n'importe quoi même devant des gens.
Peu à peu, ses amis la fuient et elle commet erreur sur erreur, allant de catastrophe en catastrophe, car elle sombre littéralement sous les responsabilités.
Si elle se retrouve incapable de faire face à son quotidien, c'est parce qu'elle s'enfonce dans la dépression...jusqu'aux limites de la folie, et jusqu'à ce jour terrible où elle s'enferme littéralement dans son appartement, sans téléphone, avec son fils fiévreux et son chien à l'agonie.
Alors que tous les éléments semblent s'être liés contre elle, la situation commence à devenir sérieusement inquiétante et déstabilisante pour le lecteur...
Je vivais dans la terreur d'oublier que je devais aller chercher Ilaria à l'école ; et si j'envoyais Gianni faire des courses chez les commerçants des environs, j'avais peur qu'il lui arrive quelque chose ou, pire encore que, accaparée par mes préoccupations, j'oublie son existence et ne pense plus à vérifier s'il était bien rentré.
Bref, j'étais dans un état de fragilité, auquel je réagissais en prenant sur moi, tendue, exténuée.
Le sujet ne m'intéressait pas plus que ça au départ, mais je l'avoue, le roman a un côté tout à fait addictif et je ne suis pas arrivée à le lâcher...
Ce sujet, mille fois exploré dans les romans, est traité ici avec beaucoup d'originalité. Quoi de plus banal en effet et malheureusement toujours d'actualité qu'une femme de presque quarante ans, "abandonnée" par son mari pour une plus jeune femme sans enfants.
Banal, mais toujours aussi triste et douloureux pour les principaux intéressés et leur entourage.
Tout est dans l'art et la manière dont l'auteur dissèque l'événement et nous fait entrer dans la psychologie des personnages. Page après page, le lecteur découvre l'ampleur des dégâts, la souffrance d'Olga qui se sent rejetée jusqu'à être incapable de faire face au danger ou de séparer la réalité de ses pensées.
L'auteur décrit avec beaucoup de subtilité, l'état de dépression qui fait suite au choc et nous dévoile sans aucune pudeur, les désirs les plus secrets et les révoltes d'Olga. Le ton est dur, violent et même très cru. Tout est dit sur les sentiments et les désirs de cette jeune femme, sans fioriture et jusqu'à l'extrême.
Mais malgré le côté parfois excessif de la situation, tout sonne juste : son rôle de mère qui lui pèse, sa vision de la féminité, son angoisse des années qui passent, son laisser-aller physique et moral et le regard cruel qu'elle porte sur elle-même et son incapacité à faire face.
Le lecteur se retrouve impuissant mais non en position de voyeur ce que j'ai beaucoup apprécié. Il est touché par le regard et l'attitude des enfants qui voient leur mère s'effondrer et ne peuvent rien faire.
On aimerait à chaque page tendre la main pour aider cette jeune femme qui accumule les malheurs et fait fuir tous ceux qui l'entoure, la décharger de ses enfants et aller promener le chien. On finit même par en vouloir terriblement à Mario (son mari) de l'avoir abandonné ainsi, sans explication et de ne pas s'occuper des conséquences. Son attitude nous révolte. Pendant des mois, il est indifférent à la souffrance de sa femme et délaisse les enfants sans même venir les voir, y compris pendant les vacances, par crainte d'avoir à vivre une scène, qu'il fuit d'avance par simple lâcheté, et dont il accuse Olga.
Mais est-elle seule responsable de sa fuite ? Pas si sûr !
Tout était si fortuit. J'étais tombée amoureuse de Mario encore jeune fille, mais j'aurais pu tomber amoureuse de n'importe qui d'autre, d'un corps auquel nous finissons par attribuer je ne sais quelles significations. Un long lambeau de vie passée ensemble et on pense que c'est le seul et l'unique homme avec qui on aimera vivre sa vie, on lui attribue certaines vertus résolutoires, et c'est, au contraire, seulement un bois émettant des sons de fausseté, on ne sait qui il est véritablement, il ne le sait pas davantage lui-même. Nous sommes des occasions...
Il y a un côté irréel à ce roman que certains ont jugé peu crédible. Moi je ne le crois pas. Il est au contraire très réaliste. Seule la journée catastrophe m'a paru légèrement exagérée mais bon je n'ai pas de porte blindée, ni de chien...
C'est une lecture difficile, parfois pesante car cette femme qui s'enlise et se noie (voir la couverture du folio) mais tente de rester éveillée (au plein sens du terme car elle a toujours envie de dormir pour oublier) et d'être attentive pour ne pas sombrer dans la folie, a quelque chose de pathétique.
Je crois au contraire qu'Elena Ferrante met encore une fois son talent en lumière pour bousculer la bienséance, traiter ce sujet en faisant fi des idées reçues, et nous déranger avec la violence des mots (et des maux) d'Olga.
Difficile de dire, j'ai aimé ou pas ! La sujet ne s'y prête pas...J'ai aimé ce qui est sûr l'écriture d'Elena Ferrante et retrouvé avec plaisir son style unique et direct.
Ce roman m'a autant touché que dérangé et il restera pour moi, un roman marquant sur le thème de la séparation et de sa violence psychologique...le cri de hargne d'une femme qui pourrait être celui de toutes les femmes abandonnées dans ces conditions.
A ne pas lire toutefois par celles qui vivent en ce moment une séparation brutale.
Oui j'étais bien sotte. Les canaux de mes sens s'étaient refermés, le flux de la vie n'y coulait plus qui sait depuis quand. Quelle erreur avais-je faite de borner le sens de mon existence aux rites que Mario m'offrait avec un prudent transport conjugal. Quelle erreur avais-je faite de confier le sens de mon existence à ses gratifications, à ses enthousiasmes, au parcours toujours plus fructueux de sa vie. Quelle erreur avais-je surtout faite, de croire que je ne pourrais pas vivre sans lui, alors que depuis bien longtemps je n'étais pas le moins du monde certaine qu'en sa compagnie j'étais vivante.
N'oubliez pas d'aller lire l'avis de Maryse concernant cette lecture sur son blog. Et profitez-en pour noter sa recette des gnocchi et de leur fabuleuse sauce à l'italienne ainsi que celle de sa pâte de coing.
RECETTE DES 13 DESSERTS & LECTURE - L'Espigaou.
Je commence les préparations de Noël en cuisine Et oui nous approchons de la fin d'année et des fêtes En Provence nous commençons les 13 desserts maintenant. Notre premier dessert est les pât...
http://lespigaou.canalblog.com/archives/2016/11/03/34478273.html