Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...
Au coeur des battues et des bagarres, je fis ainsi une étrange expérience, celle de la dissociation. Je n'étais pas une, mais deux. Il y avait ce corps, qui ne réagissait pas toujours, et mon esprit_ alerte, puissant...
Dans ma tête, je gagnais tous les combats.
Voici un roman surprenant qui n'a pas cessé de m'étonner et même de me perturber tout au long de ma lecture. J'avoue que j'ai eu du mal à le terminer, alors qu'au départ le sujet m'intéressait beaucoup.
C'est l'histoire d'une jeune métisse dont on ne saura pas le nom. Recueillie par sa grand-mère après la triste disparition de ses parents, et alors qu'elle n'a que dix ans, elle cesse subitement de grandir. Elle reste donc naine. Sa grand-mère devient totalement obsédée par sa taille, elle s'est mis en tête de la faire grandir à tous prix. Pour fuir sa folie, la jeune fille écrit ses ressentis dans un carnet qui ne la quittera jamais.
Un jour, après avoir récupéré quelques liasses de billets chez un voisin qui volait les autres, elle quitte le domicile familial. Elle décide alors de tenter de vivre sa vie loin des siens.
Sur son chemin, elle va rencontrer des personnes bienveillantes, qui vont vouloir veiller sur elles à cause de sa petite taille, d'autres au contraire qui profiteront de ses faiblesses.
Depuis sa petite enfance, elle a découvert qu'elle avait un don extraordinaire, le don de dissociation, c'est-à-dire la capacité de s'extraire de son propre corps par sa seule imagination, et ainsi de prendre de la distance avec les événements et la réalité...cela va bien l'aider !
La mémoire ne fait rien avec les trous. Soit elle invente, soit elle abandonne. Mais un trou n'est ni une perte, ni un manque. C'est une échappée, le point dans lequel se glisse le récit pour filer ailleurs. Il ne suit pas une ligne, il s'enfonce. Il navigue comme un bateau déchainé, qui s'écrase contre la houle et jaillit de l'autre côté des vagues.
Ils avaient refusé de participer au monde et avaient choisi la désertion. Pour résister à la violence, il avait fallu créer d'autres trajectoires, enfanter un autre séjour. Il n'y avait rien à attendre de la société, de l'autre côté de la frontière et, pour trouver la paix, il fallait se glisser dans les espaces d'indistinction. C'est avec "L'Indépendance" que tout avait commencé. Une idée...
Mon avis
J'ai aimé le côté loufoque de ses rencontres, souvent poétiques et décalées, comme celle de Luzolo, l'artiste qui n'aimait pas l'art, d'Andrée et Petit chat de l'hôtel Béthune, et les autres avec qui elle va s'engager davantage...en particulier cette drôle de communauté qui a inventé ses propres règles utopistes et tient à les appliquer.
Au fil de son voyage, véritable épopée ou roman d'aventure qui va la mener du Nord de la France jusqu'à la capitale, elle va croiser de nombreux marginaux, tous prêts à la protéger, à l'intégrer dans leur groupe...et tous en quête d'un idéal. Cela va l'aider à mieux s'accepter telle qu'elle est.
Le roman alterne ce qu'elle écrit dans son carnet, son "Manuel", une sorte de journal, pas toujours très compréhensible pour moi, et les événements qui étayent sa vie et ses découvertes. L'amitié n'est jamais très loin, mais la folie aussi.
Je pense que si j'ai eu tant de difficultés à lire ce roman c'est qu'il est beaucoup trop ardu pour moi, très littéraire et philosophique. En fait, je n'ai pas honte de dire que je n'ai pas tout compris des propos tenus par l'auteur, sans doute brillante dans son domaine, mais un domaine beaucoup trop éloigné de moi et de mes connaissances (je vous rappelle que j'ai une formation scientifique !). Je n'ai pas réussi à lâcher prise et à me laisser porter par cet écrit qui prend parfois des allures de fable, ce qui aurait pu me plaire. Ce n'était donc pas le bon moment pour découvrir sa plume.
C'est un roman qu'il faut peut être relire plusieurs fois pour le comprendre. Il y a des passages émouvants, frappants de réalisme, mais je me suis perdue en chemin dans tous ces messages et même parfois dans les personnages.
Dommage que je sois restée sur le bord de la route...
Nadia Yala Kisukidi est agrégée et docteur en philosophie, maîtresse de conférences à l’université Paris-VIII. Elle est spécialiste de la pensée d'Henri Bergson et des études post-coloniales. Ce livre est son premier roman.
Je savais qu'il fallait se méfier des mots. Ils donnent le vertige et ce n'est pas bon pour le coeur. Ils entretiennent le chagrin, la douleur au lieu de les apaiser. Les gens heureux rêvent en silence.