Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...
Aujourd'hui je vous propose de revenir dans mon département, les Bouches du Rhône, pour découvrir une fresque qui orne le mur de clôture de l'ancienne Conserverie Beaudoux de Lambesc (anciennement nommée la Conserverie Gillet).
La municipalité a racheté cette usine (ainsi que l'usine Ours dont je vous parlerai sans doute un jour qui se trouve en campagne), dans les années 90.
Il ne reste à présent de l'ancienne usine que les bureaux administratifs transformés en salles de sports, danse, yoga, et musique.
Voici quelques détails, derniers vestiges du passé de ce lieu qui a été important pour la petite ville pendant des décennies.
Les autres bâtiments ont disparu, car remplacés par un parking et de petits immeubles résidentiels, que l'on aperçoit au fond du parking. La petite mare qui se remplissait à chaque pluie, est asséchée à présent, et un lotissement a été bâti tout près de l'ancienne gare.
Jusqu'à une époque assez récente, il y avait trois conserveries sur la ville (Ours, Beaudoux, et Barbier Dauphin qui a vu le jour à Lambesc avant de partir pour Meyrargues). Pour info, entre les années 1870 et 1890, on en comptait six ! Autant dire que les lambescaines et les lambescains étaient nombreux à y travailler. Ces conserveries étaient le gagne-pain de beaucoup de familles des alentours, mais aussi de très nombreuses familles de travailleurs saisonniers qui venaient déjà d'Espagne ou du Portugal s'installer là pour plusieurs mois. Les hommes travaillaient dans les vignobles ou les vergers, et les femmes dans une des conserveries. L'été, les étudiants étaient eux-aussi, très nombreux à se faire embaucher pour gagner un peu d'argent.
Voici la fresque qui représente les différentes activités du village et crée un lien intéressant entre passé et présent, puisque les habitants et les touristes viennent se garer sur ce parking qui porte le nom de l'ancienne usine et ne peuvent pas la rater.
Par contre, je ne sais pas qui a peint cette fresque, et je n'ai rien trouvé à son sujet sur le site de la mairie.
Petite histoire de l'usine Beaudoux (pour les curieux)
L'usine a sans doute ouvert ses portes en 1907, date gravée sous l'horloge. Mais peut-être est-ce la date de la construction des bâtiments administratifs. Je n'ai rien trouvé de plus précis à ce sujet, mais pour les anciens elle a toujours été là, faisant partie de la vie du village.
Au début du XXe siècle, les témoignages sont nombreux à ce sujet, les personnes n'hésitaient pas à emporter à la maison, les légumes pour les trier (par exemple les haricots verts ou les artichauts) tout cela pour gagner du temps le lendemain pour la mise en conserve.
En été, c'était les tomates. Au moment des champignons les familles allaient dans les collines ramasser les "pissacans" (ou bolets de pins) pour les ramener à l'usine.
Pendant la seconde Guerre Mondiale, l'usine devient pendant quelques mois, un camp d'internement. En effet, en avril 1940, le Camp des Milles, lui aussi installé dans une usine située près d'Aix-en-Provence, doit fermer ses portes, il ne réouvrira qu'au mois de juin.
Les internés sont alors installés dans l'usine Beaudoux (appelée encore GILLET à l'époque). D'après les témoignages, ils arrivent en train, l'ancienne gare étant à moins de 200 mètres. Officiellement ils sont pas moins de 343, chiffre apposé sur la plaque commémorative ci-dessous. Cent quatre vingt allemands, cent vingt huit autrichiens, des personnes d'origine tchèque, polonaise, ou russe, et d'autres dont on ne connait pas les origines, car les archives ont été détruites à la fin de la guerre, ce qui explique que nous n'en sachions pas davantage et que seuls les témoignages de nos anciens puissent empêcher cet épisode de l'histoire de tomber dans l'oubli.
Certains des internés étaient mineurs, la majorité avait moins de 40 ans. Que sont -ils devenus ? Certains d'entre eux ont été retrouvés ensuite sur les listes des déportés.
Pour ne pas les oublier, la municipalité a fait apposer cette stèle en mémoire à leur court séjour sur la commune, un séjour qui a marqué les esprits.
L'usine sera occupée ensuite par la Kommandatur jusqu'en 1944 date à laquelle elle reprendra peu à peu ses activités de conserverie.
Pour plus d'informations si ce sujet vous intéresse, vous pouvez consulter les deux sites suivants, ICI, et ICI.
Dans les années 50, l'usine devient l'usine Beaudoux du nom de son nouveau propriétaire. Après le décès de celui-ci, en 1971, l'usine est vendue mais ne change pas de nom. Elle se spécialise dans des conserves moins liées à la saison. Des plats cuisinés comme la soupe de poissons, sont alors fabriqués sur place, tout comme du Ketchup qui est de plus en plus prisé.
Elle devient ensuite "la Monégasque" en 1992 qui changera d'emplacement, mais son siège restera dans la Zone d'activités de la commune jusqu'en 2020. Les locaux de l'usine sont alors rachetés par la municipalité.
La cheminée de l'usine sera abattue en 1997 car elle devenait dangereuse pour la population. Dommage car je trouvais que c'était un témoin du passé qui faisait honneur au travail de nos ancêtres.
De nombreux métiers étaient liés à cette usine...tous sur place. Le village était ainsi autonome comme beaucoup de nos villages d'antan. Il y avait la scierie pour fabriquer les caisses en bois et une autre usine fabriquait les parties métalliques. Les hommes s'occupaient de la manutention, de la mise en route de la chaudière, du sertissage. Les femmes travaillaient au tri car tout était fait à la main...et tout était fait sur place et provenait de productions locales.
Les témoignages proviennent presque tous du site ICI.
Voilà notre article du jour est terminé, j'espère qu'il vous a plu, même si encore une fois il est un peu long. Prochainement, nous monterons au cimetière découvrir une jolie petite chapelle, enfin, comme d'habitude...si vous le voulez bien !