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Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...

Sur le balcon / Ren Xiaowen

L'Asiathèque, 2021

L'Asiathèque, 2021

Il y avait dans l’air une odeur de pourriture. Un rat mort écrasé par une voiture était collé au milieu de la rue, réduit à une tache de poils grisâtres. La pluie emportait des détritus de tous côtés et les amoncelait sur les grilles d'égouts : sacs de plastique, papier d'emballage, feuilles de sterculier, boites de plats préparés jetables dont la surface mouillée réfléchissait la lumière du petit matin.

Après avoir foncé à toute allure dans les rues, il venait d'enlever son casque et hurlait comme un malade. A la lumière des lampadaires, ses cheveux avaient l'air d'un nid de serpents rouges qui se tordaient dans le vent.
"Quand je sors à moto, en fin de journée, c'est comme si je volais" dit-il en caressant la moto avec amour...

Zhang Yingxiong ne fait pas grand chose de sa vie. Dans ce quartier pauvre de Shanghai, il n'est pas facile pour les jeunes de trouver du travail, et il préfère de loin passer ses journées dans un cybercafé, pour y jouer à des jeux vidéos. De plus, il subit la violence verbale de son père, devenu amer et dépressif, qui le traite toute la journée de "bon à rien", et il perd de plus en plus confiance en ses capacités. Timide et craintif, chercher du travail l'angoisse au plus haut point. C'est alors que sa famille apprend que leur immeuble doit être rasé. Le père, Zhang Suqing n'accepte pas la somme dérisoire qui lui est proposée pour l'expropriation, car elle ne lui permet pas d'acquérir un autre bien. Il voit ses voisins déménager, les uns après les autres, et la rumeur dit qu'ils ont obtenu beaucoup plus d'argent que prévu, grâce à leurs relations, mais il ne revient pas pour autant sur sa décision. En colère, il se met à boire davantage et perd peu à peu la santé. Il finit par mourir d'une crise cardiaque. 

Yingxiong et sa mère sont obligés d'accepter l'offre de la mairie, de quitter leur domicile pour aller vivre chez un oncle qui les héberge à regret. 

Le jeune homme aura désormais une seule obsession : chercher à se venger de cette injustice. Après un temps de recherche, il retrouve enfin et se met à suivre quotidiennement, Lu Zhiqiang, le fonctionnaire chargé des expulsions, qu'il juge responsable de la mort de son père et des larmes de sa mère. Il finit par se faire embaucher comme serveur dans le bar situé juste en face de son immeuble, d'où il peut observer son balcon à loisir, avec des jumelles. Mais rien ne se passe comme prévu : il découvre que cet homme, qu'il s'est mis à détester, et qu'il voudrait tuer (avec un simple couteau de poche pliant acheté au supermarché...), a une fille "pas comme les autres"...

Quand on disait à Zhang Suqing que son fils, Zhang Yingxiong, était en grandissant devenu un garçon vraiment bien, il rétorquait : "Vraiment bien ? Des clous ! c'est une taie d'oreiller brodée sur un sac de paille".

Mon avis

Voilà un court roman de 110 pages à peine, paru chez l'Asiathèque le 19 mai dernier, dans une nouvelle collection intitulée "Novella de Chine", dirigée par Brigitte Duzan, la traductrice de ce roman. En effet, ce texte ne correspond pas à un roman tel qu'on a l'habitude d'en lire, ni à une nouvelle, car il présente davantage de développement. Il constitue donc un genre intermédiaire, très intéressant et plaisant pour le lecteur. 

J'ai aimé entrer dans l'ambiance de ce quartier pauvre du vieux Shanghai, un peu inquiétant et entouré de mystères, qui subit les assauts des promoteurs, un quartier oublié des touristes où les rues sont désertes, et les jeunes livrés à eux-mêmes et prêts à tout, pour gagner un peu d'argent comme le fait, l'ami de Yingxiong. Le lecteur ne peut rester indifférent devant tant d'injustice, devant la tromperie et le mensonge des dirigeants qui, pour payer moins cher, annoncent aux habitants qu'un parc va être construit à l'emplacement de leurs vieilles maisons, souvent héritées de leurs ancêtres, alors que ce sont de nouveaux immeubles modernes qui prendront leur place.

L'auteur nous en parle avec beaucoup de justesse : tout est suggéré avec une grande sensibilité et mille petits détails qui brodent autour du sujet, pour nous le révéler par petites touches. Les gens vivent au jour le jour, et le lecteur découvre peu à peu leurs rêves et leurs déceptions, mais aussi la corruption, les jalousies, les rumeurs et toute la face cachée de la ville.

Les dialogues sont réalistes. Les situations décrites sont très imagées, comme par exemple la confrontation entre Zhang Suqing et le fonctionnaire en charge des expulsions, qui vient frapper à sa porte en pleine nuit. Certains passages sont emplis de cynisme, comme l'anecdote relatant la porte tournante, installée par les promoteurs que, à l'image du monde qui les entoure, personne n'a jamais réussi à faire tourner comme elle le devrait, ou encore la description de la mascotte de l'exposition universelle de 2010, reflet d'un autre monde, inconnu pour les plus pauvres du quartier.

L'auteur nous livre ici une véritable chronique sociale, avec des personnages forts, mais déchus, bien présents mais qui restent mystérieux, doublée d'un récit empli de suspens, et d'une intrigue bâtie comme celle d'un roman policier.  Elle amène le lecteur vers une fin inattendue, dans laquelle la véritable nature des hommes se révèle enfin, dans toute son humanité. 

A noter, les mots de vocabulaire qui font référence à une coutume chinoise sont expliquées dans des notes de bas de pages.

Ce texte, qui peut être lu dès le lycée, a été adapté au cinéma par le réalisateur Zhang Meng. Le film est sorti en mars 2019. 

Merci à Pascaline et à l'Asiathèque pour leur confiance. 

L'auteur, Ren Xianwen est née en 1978. Elle est une figure montante de la littérature chinoise d'aujourd'hui. Auteur de recueils et nouvelles mais aussi de romans, tous salués par la critique, et couronnés de prix littéraires, elle n'avait encore jamais été traduite en français. 

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M
Je l'ai trouvé en librairie ! J'espère qu'il me plaira autant qu'à toi !
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M
J'ai beaucoup aimé en effet tout est question d'ambiance !
L
Je connaissais pas les éditions L'Asiathèque mais je vais me pencher dessus. <br /> Merci pour cette jolie découverte une fois de plus.
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M
Cet éditeur mérite vraiment qu'on prenne du temps à explorer son catalogue. Belles découvertes et merci pour votre message
F
La Nature humaine, ici ou ailleurs demeure énigmatique lorsque l'on s'arrête sur ses faiblesses et lâchetés et qu'en contrepartie on découvre sous le fatras des bassesses, une âme en quête de considérations, désespéré quand elle se perçoit comme anonyme et souvent oubliée... Alors elle se raccroche à tout ce qui lui permet d'être et d'exister dans des rôles rarement glorieux mais leur permettant d'être influents et de peser sur le sort des plus faibles et de ceux qui sont assujettis aux systèmes... <br /> Parfois le pire peu révéler quelques pans du meilleur .<br /> Voilà la réflexion que m'inspire ton résumé de lecture, dans cette position, étant comme au balcon, je devrais descendre pour mieux saisir l'intérêt de cette lecture et donc trouver le livre.<br /> Amitiés.
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M
Tu as toujours des réflexions intéressantes en effet...Merci de les partager ici ! Amitiés
D
à lire davantage des auteurs asiatiques ; Chine, Japon, Inde, etc...<br /> merci - bises
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M
C'est par période chez moi, n'oublie pas les coréens, j'ai fait de belles découvertes avec eux, d'ailleurs l'Asiathèque en offre une belle sélection. Bises
C
tu nous le présente très bien ce livre, merci beaucoup de tes toujours très bonnes chroniques<br /> belle journée<br /> bisous<br /> patricia
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M
Merci Patricia je sais qu'en travaillant on ne peut pas tout faire, ni tout lire et qu'il faut faire des choix ! bisous et merci de ton passage qui me fait toujours plaisir
E
Bonjour, tu nous décris des livres plus vite que je n'ai eu le temps de les lire lol ! Je le marque pour plus tard, bisous
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M
Il se lit vite même en prenant le temps de le savourer :) bisous
Q
Je le note, on ne sait jamais... j'ai aimé ce que tu en as dit.<br /> Merci !
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M
Merci Quichottine de ta confiance...Bisous
P
Comme je suis allé en Chine, ce livre pourrait m'intéresser. Je ne l'ai encore vu nulle part. Tu fais des découvertes ! <br /> Bonne soirée.
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M
Oui j'aime ces éditeurs qui nous proposent des livres magnifiques !
M
Bonjour Manou,<br /> j'hésite un peu... Mais tu en parles si bien!<br /> Bisous,<br /> Mo
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M
Je comprends et heureusement le choix ne manque pas pour nos lectures, on peut varier les plaisirs ! bisous
D
Ta chronique est tentante... Je lirai peut-être ce livre si je le croise dans les rayons de la médiathèque. Et je suis intriguée par le mystère de la fille du fonctionnaire...
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M
Je ne pouvais pas tout raconter bien évidemment, et la psychologie des personnages est très intéressante ! belle journée, je suis très en retard pour venir te voir !
L
Coucou tu en parles très bien et tu donnes envie de lire ce livre bisous
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B
un court roman qui doit réellement permettre de s'évader
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M
L'auteur est douée pour créer une ambiance dépaysante !
F
Bonjour, je note, l'histoire semble bien, je te souhaite une bonne journée, bisous
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R
Et merci a toi pour la présentation. Bisous
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M
Pas de soucis Renée. bisous
P
Un tout petit livre mais on rentre dans l'histoire assez facilement. Il donne juste envie de le lire. Bises Manou
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V
je crois que cette chronique sociale a tout pour me plaire même si je râle parfois quand les romans sont vraiment trop courts.
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M
En peu de mots l'auteur nous tient en haleine et on n'a pas du tout envie de lâcher notre lecture. Je lirai ton avis avec grand plaisir.
E
je ne suis pas sûre qu'il me plaise mais pourquoi pas, mais en tout cas ce ne sera pas pour tout de suite vu le retard que j'ai accumulé et la grosseur de ma PAL :-)
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M
C'est pareil pour moi et en plus je lis moins en ce moment et de manière moins suivi, justement j'ai trouvé ce format intéressant, j'ai pris le temps de le savourer et je l'ai finalement très vite lu.
P
Tu me donnes envie de lire cette nouvelle. Merci de le partager ici.<br /> Bisous et bonne journée
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E
Bonjour Manou. Je ne suis pas sûre d'aimer ce format entre nouvelle (que je n'aime pas) et roman. Il faudra que j'essaie. Bisous
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M
Je m'étais dit la même chose et j'ai été conquise ! bisous
T
Bonjour Manou, un sujet qui pourrait peut-être m'intéresser. J'ai bien envie de connaitre le dénouement de cettz histoire à Shanghaï. Je connais pas les livres sur le thème asiatique, ça serait donc une découverte pour moi. Merci pour la si belle présentation de ce bouquin comme tu sais si bien nous raconter, commz chacun de tes différents articles d'ailleurs ! Bonne journée à toi
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M
Merci c'est gentil Théo, je suis contente que tu apprécies mes articles, car je ne publie plus que 5 jours à présent. Belle journée à toi aussi