Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...
Je venais de le comprendre : le jardin de l'homme est peuplé de présences. Elles ne nous veulent pas de mal mais elles nous tiennent à l’œil. Rien de ce que nous accomplissons n'échappera à leur vigilance.
J'avais appris que la patience était une vertu suprême, la plus élégante et la plus oubliée. Elle aidait à aimer le monde avant de prétendre à le transformer. Elle invitait à s’asseoir devant la scène, à jouir du spectacle, fut-il un frémissement de feuille.
Voilà un livre qui a obtenu cet automne le Prix Renaudot et que j'aurai tout de même lu s'il ne l'avait pas obtenu, car même si j'ai souvent un avis mitigé sur les livres de Sylvain Tesson, j'aime les sujets qu'il aborde dans ses écrits. Je sais c'est contradictoire mais c'est ainsi !
Sur l'invitation de son ami photographe animalier, Vincent Munier, l'auteur part sur les Hauts Plateaux du Tibet, sur les traces de la mystérieuse et discrète panthère des neiges. Vincent Munier est un très grand photographe qui met de la poésie là où les autres scientifiques sortent la calculette. Il sait que la rencontre avec la panthère est une simple promesse...
Mais existe-telle vraiment ?
Ou appartient-elle à la légende ?
Dès le début de leur périple, doutant de ses capacités à rester immobile, Sylvain Tesson calque son attitude sur celle de l'équipe. Aux côtés de Vincent Munier, il y a Marie son amie cinéaste, et Léo sans qui il ne part jamais, car il sait si bien mettre en mots ce que les autres pensent tout bas et en tirer une certaine philosophie, qu'il fait du bien à toute l'équipe.
Là-bas, l'auteur apprend à apprivoiser la nature comme il ne l'avait encore jamais fait. Il apprend l'importance de l'affût, du silence, et de l'attente. Au fond de nous et même si nous aimons la nature et les randonnées, nous sommes tout de même des citadins dans l'âme et tenons à notre petit confort ! Là-bas il faut se lever avant le jour, s'habiller dans le duvet tant il fait froid, manger frugalement et tenir des heures sans bouger.
Un jour, l'auteur comprend que les animaux sont là et les observent, jusqu'au jour où, ultime récompense, c'est la panthère qui apparaît parmi les rochers...
La conscience met du temps à accepter ce qu'elle ne connaît pas. L’œil reçoit l'image de pleine face mais l'esprit refuse d'en convenir.
Elle reposait, couchée au pied d'un ressaut de rochers déjà sombres, dissimulée dans les buissons. Le ruisseau de la gorge serpentait cent mètres plus bas. On serait passé à un pas sans la voir.
Ce livre est le compte-rendu imagé et souvent poétique de cette rencontre avec la nature sauvage du Tibet et bien entendu avec toute la faune de ces contrées.
J'ai aimé...
le style simple et agréable. Il y a de l'humour et de l'auto dérision et cela rend la lecture plaisante.
J'ai aimé que ce récit nous parle aussi des rencontres avec les éleveurs de yaks qui les accueillent chez eux et partagent leurs coutumes, leurs sourires et leur hospitalité.
J'ai aimé que ce soit un livre paisible et distrayant car nous en avons bien besoin en ce moment.
J'ai aimé aussi les relations qui naissent entre les membres de cette petite équipe et le plaisir partagé des découvertes : tout cela tisse des liens qui prennent toute leur importance au fil des jours.
J'ai moins aimé...
de savoir que secrètement ce qui a poussé l'auteur, nous avoue-t-il, à partir là-haut, ce n'est pas la panthère, mais le souvenir d'une femme qu'il a aimé et qu'il n'a pas su garder auprès de lui. Comme d'habitude, les moments où il s'épanche sur sa vie ne sont pas ceux qui m'intéressent le plus. Mais il est bon de savoir qu'il ne peut s'empêcher de mêler sa propre vie à cette aventure.
Comme habituellement l'auteur étaye son récit de trop nombreuses remarques philosophiques ou références littéraires et c'est, je l'avoue ce qui me gêne le plus dans ses écrits. Mais cette fois cela m'a moins gêné, je le reconnais. Soit je m'habitue à son style, soit je savais à quoi m'attendre et j'ai été moins surprise. Je sais bien qu'il veut nous inviter à prendre du recul sur nos propres vies et notre monde moderne mais j'ai trop souvent l'impression qu'il "crache dans la soupe", lui qui malgré tout ce qu'il veut nous laisser croire, est loin d'être le portrait idéal d'un véritable aventurier, enfin à mes yeux.
Enfin, ne vous fiez pas à la carte qui illustre le début du livre, l'endroit où la panthère vit encore en liberté est tenu secret et ce sera impossible de la retrouver, préservation oblige...
Cependant si vous êtes curieux de connaître sa frimousse n'hésitez à faire quelques recherches sur internet !