Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...
La première fois qu'il m'avait dit qu'il m'aimait, j'avais oublié de le lui dire aussi.
J'aurais dû. Si j'avais su ce qui allait arriver et ce que j'allais découvrir sur l'amour et la guerre, je me serais arrangée pour le lui dire à ce moment-là.
C'est bien ma faute.
Nous sommes en Hollande, à Amsterdam en 1943.
Hanneke ne se remet pas de la mort de Bas, son petit ami...
Pour améliorer la vie quotidienne et faire vivre sa famille décemment, elle sillonne la ville sur son vélo pour fournir aux plus riches des produits introuvables et chers qu'elle se procure au marché noir.
C'est un travail que lui a demandé de faire son patron et qui est bien mieux rémunéré que celui, officiel, qu'elle est censée fournir comme réceptionniste dans l'entreprise de pompes funèbres.
Bien sûr, elle fait tout ça en cachette de ses parents, sa mère s'inquiétant déjà suffisamment lorsqu'elle a quelques minutes de retard.
Sa chance, c'est d'avoir un physique d'aryenne, ce qui lui permet de passer le plus souvent inaperçue.
Un jour, alors qu'elle vient de livrer une vieille dame, celle-ci lui demande un service : retrouver une jeune fille juive qu'elle cachait jusqu’à présent chez elle depuis que toute sa famille a été tuée et qui a mystérieusement disparue de sa cache. Mirjam Roodveldt n'a que 15 ans et personne chez qui se réfugier...
Au départ, Hanneke ne veut pas prendre de risques pour quelqu'un qu'elle ne connait pas. Elle finit par accepter et va finalement prendre son rôle très au sérieux. Aidé par Ollie, le grand frère de Bas, elle se retrouve enrôlée dans un groupe de résistants qui compte sur elle pour les aider, en échange des informations qu'ils vont pouvoir lui fournir...
Elle, qui jusqu'à présent ne s'était jamais posée trop de questions sur les désastres de l'occupation nazie dans son pays, va entrer de plein fouet dans l'horreur, découvrir les rafles, le théâtre transformé en camp de transit, la crèche où les résistants tentent de sauver quelques bébés juifs en les faisant adopter par des familles, les caches où se terrent des familles juives apeurées, car c'est l'unique chance pour eux de ne pas partir en déportation, et toutes ces familles de justes qui prennent de gros risques pour sauver des vies.
Mais retrouver Mirjam, c'est comme chercher une aiguille dans une botte de foin.
Et il ne faut avoir peur de rien !
Hantée par les souvenirs d'Elsbeth, son amie d'enfance, avec laquelle elle n'a plus de contact depuis que cette dernière a épousé un soldat allemand, culpabilisée par la mort de Bas, tué au front et qu'elle est persuadée d'avoir poussé à partir, Hanneke va peu à peu s'engager dans la Résistance et œuvrer avec ceux qu'elle apprend désormais à mieux connaître et qui lui font à présent confiance, comme de véritables amis. Judith, Willem, Ollie, Mina...sont prêts à donner leur vie pour leur cause !
Quand Hanneke découvre tout ce qu'elle ignorait et qui se passait à deux pas de chez elle, elle a honte : les réseaux souterrains, les photographes amateurs qui cachent leur appareil où ils peuvent, et apporteront un témoignage crucial sur les événements...les risques pris par des jeunes qui n'ont même pas 15 ans, l'âge où elle a rencontré Bas justement et où elle était, elle, encore si insouciante.
Hanneke, qui était au début du roman, une jeune fille fragilisée par la mort de son ami, ne sera plus jamais la même...
C'est en adulte responsable de ses actes et déterminée que le lecteur la retrouvera à la fin du roman.
La guerre fait grandir trop vite les enfants et les adolescents sans aucun retour possible en arrière...
Voilà le problème avec mon chagrin : il ressemble à une pièce très en désordre dans une maison où il n'y a plus d'électricité...
Bien sûr vous l'aurez compris, l'histoire d'Hanneke et l'enquête qu'elle mène pour retrouver Mirjam, ne sont qu'un prétexte pour raconter l'histoire de la Hollande pendant l'occupation nazie.
Ce roman est donc avant tout un témoignage réaliste sur les événements de la Seconde guerre mondiale en Hollande : tous les éléments historiques racontés dans ce roman sont en effet des faits réels.
Pour info, la Hollande est le pays d'Europe, où le plus de juifs ont été déportés pendant l'Holocauste. Soixante quinze pour cent des juifs néerlandais sont morts en camp de concentration.
La recherche de la jeune fille, donne au roman une dimension particulière et un peu de légèreté. Il y a du suspense, des retournements de situation imprévus, du mystère. Les personnages sont si humains avec leurs doutes, leurs espoirs et leurs maladresses qu'ils en deviennent attachants.
Au delà de l'Histoire, que pour la plupart nous connaissons, l'auteur nous montre par l'exemple comment, en temps de guerre et quand la peur quotidienne prend le pas sur la raison, tout peut d'un instant à l'autre basculer et, un simple citoyen devenir un héros ou au contraire, un délateur et un criminel...
C'est donc aussi un roman qui développe des thèmes universels, comme celui de la haine, de la jalousie, de la méchanceté humaine et, à l'inverse du courage, de la solidarité, de la générosité et de l'humanité.
Voilà donc un roman à mettre entre toutes les mains...et en particulier dans celles des ados. L'écriture est simple, la construction sans grande originalité ce qui en fait un livre facile, sans difficulté de lecture particulière, et qui saura toucher son public.
Aujourd'hui 8 mai...on célèbre partout en Europe, la fin de cette guerre, à la fois si proche de nous et si éloignée pour les jeunes générations.
Je me devais d'en parler ici et ce modeste roman me paraît être un bon compromis pour un débat intergénérationnel. Un bel hommage à ceux qui se sont battus avec détermination et ont donné leur vie, pour un monde meilleur.
Pour ne pas oublier, jamais, et faire partager nos convictions aux ados d'aujourd'hui, pour qui la dernière guerre apparaît comme faisant partie des événements du passé...
Il y a tant de choses que j'aimerais oublier. Les passages les plus durs. Les vilaines blessures, sous les cicatrices, toutes ces choses que je voudrais voir disparaître en les ignorant...