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Aujourd'hui, nous allons visiter les Salins du Midi en petit train. Le public peut en effet accéder aux Salins d'Aigues-Mortes depuis plus de 25 ans, en petit train, en VTT ou encore, en véhicule électrique avec un guide naturaliste, mais jamais à pied, pour ne pas gêner le travail des sauniers, ce qui est bien compréhensible.
A Aigues-Mortes, les Salins se situent sur le marais de Peccais et occupent aujourd'hui une surface d'environ 18 000 hectares, dont un peu plus de 10 000 sont exploités, la surface de Paris intramuros.
Autant dire que les salins, avec sa production de 500 000 tonnes de sel par an, sont au coeur de l'activité économique de la Camargue. De plus, ils se situent sur quatre communes, à cheval sur deux départements et offrent encore aujourd'hui de nombreux emplois saisonniers.
La récolte est facilitée par le climat ensoleillé de l'été et le vent (mistral et tramontane) ainsi que par la faible quantité de pluie qui tombe sur la région.
Le sel de mer, "l'or blanc de Camargue", produit sur le site, est essentiellement destiné à l'alimentation.
Mais avant d'embarquer pour ce périple d'une heure 15 environ, nous allons nous pencher un court moment sur l'histoire du lieu, puis je vous ferai visiter le site...
L'exploitation des Salins d'Aigues-Mortes date de l'Antiquité, mais nos ancêtres, dès le néolithique, savaient déjà récolter le sel, sans qu'aucune trace n'ait pu être découverte dans la région. On doit donc l'origine la plus anciennement connue de cette activité, à l'ingénieur romain Peccius qui a donné son nom au marais. Il aurait été chargé par Jules César d'organiser la production de sel à Aigues-Mortes.
Au Moyen Âge, la cité ne vivait encore que de la pêche et des salins...la quasi totalité des salins de Peccius appartenaient alors aux moines de Psalmody et aux Seigneurs d'Uzes et d'Aymargues (lieux géographiquement tout proche des Salins). Puis, les moines de Psalmody cèdent le territoire d'Aigues-Mortes à Louis IX (Saint-Louis) qui aménage les Salins et poursuit leur exploitation.
Après lui Philippe III, puis Philippe IV développent la ville et réorganisent les marais salants. Les Salins de Peccais deviennent alors le site d'exploitation du sel, le plus important du littoral méditerranéen. On les baptise alors les "Salins du Roi".
Au XVIIe siècle, il n'existait pas moins de 17 salins, tous réunis sur le territoire du marais de Peccais, appartenant à divers propriétaires. Chacun des salins avait son propre nom conservé aujourd'hui : les Aubettes, la Lone, Mirecoule, Bourbuisset, Saint-Jean...
Au début du XVIIIe siècle, après les graves inondations du Rhône de 1842, les différents propriétaires décident de s'unir pour ne former qu'une seule société. Ils exploitent alors à frais commun tous les salins et en partagent la production. Mais il faudra attendre 1856, pour que la "Compagnie des Salins du Midi" voit le jour.
Le site de production, les bâtiments administratifs et les logements des Salins d'Aigues-Mortes sont inscrits à l'inventaire général du patrimoine culturel depuis 1995.
Alors, prêts pour monter dans le Petit Train avec moi, et découvrir cet environnement encore sauvage, ayant été façonné par les hommes au fil des siècles ?
Si la visite permet de comprendre l'organisation et le fonctionnement du salin que je vous montrerai demain, elle permet aussi de découvrir cet espace préservé...
Et tout d'abord, la visite permet d'apercevoir la cité d'Aigues-Mortes et bien sûr les remparts, de loin certes, mais quelle vue, ce serait dommage de ne pas commencer par là !
Pourtant, le jour de ma visite, le temps était couvert suite à des entrées maritimes.
Le paysage des Salins d'Aigues-Mortes est grandiose et, bien que façonné par les hommes qui ont creusé au cours des siècles ces tables salantes plus ou moins grandes et ces canaux reliés entre eux, il constitue un site unique en Europe par son immensité d'une part et sa diversité biologique d'autre part.
Car malgré l'intervention des hommes sur les Salins, la nature alentour est encore en partie sauvage... La saliculture est donc créatrice de richesses écologiques.
Sur les Salins on recense environ 300 espèces de plantes différentes, dont une vingtaine sont protégées et certaines adaptées à l'extrême salinité. A côté de plantes connues et fréquentes comme l'immortelle, la salicorne, les saladelles ou lavandes de mer (7 espèces différentes en Camargue), la canne de Provence, par exemple, on trouve des plantes rares, protégées en PACA, comme le lis de mer (Pancratium maritimum), qui fleurit en juillet dans les dunes de sable, et certaines, carrément en péril, quasiment disparues du territoire français, comme la malcolmie naine (Maresia nana).
Pour admirer la flore, il vaut mieux parcourir les salins en VTT : c'est plus facile de s'arrêter. Enfin, moi en tous les cas je n'ai pas essayé de descendre du petit train en marche, même pour faire les photos !
Les Salins constituent aussi une gigantesque réserve de nourriture pour de nombreux oiseaux et mammifères. L'eau chaude salée de ce milieu humide, et la préservation des abords des tables salantes, servent à la fois de garde-manger et de lieu de reproduction.
Les Salins abritent plus de 200 espèces d'oiseaux (dont 157 protégées) qui se reproduisent sur les lieux.
1/4 de la population française de flamants roses se retrouve ici, et 5000 couples viennent y nicher, grâce à l'aménagement d'îlots de reproduction !
On dénombre 8 espèces d'oiseaux rares ou vulnérables, et donc tous protégés : l'avocette élégante, la sterne naine, la sterne pierregarin, la sterne caugek, la sterne hansel, la mouette mélanocéphale, la mouette rieuse, le goéland railleur...
Saviez-vous que la couleur des tables salantes variait selon la salinité de l'eau et les micro-organismes qui y vivent ?
La coloration rose de l'eau est liée à la prolifération de micro-algues : les dunaliella salina qui aiment les fortes salinités.
Elles servent de nourriture à un petit crustacé très résistant et vivant lui aussi dans ce milieu extrême : l'artemia salina, qui devient rose à son tour !
Lorsque l'eau atteint la concentration de 70g de sel par litre, les petits crustacés abondent...et les flamants roses colonisent la table salante pour s'en nourrir ce qui leur donne leur belle couleur.
J'espère que vous n'avez pas eu trop chaud en vous promenant avec moi au coeur de ces paysages grandioses !
Bientôt, nous poursuivrons la visite en nous penchant sur la fabrication du sel, enfin...si vous le voulez bien.
Cet article est programmé...
Un grand Merci pour votre visite !