Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...
Chez elle [fatou] on savait dire "je t'aime" à ses enfants. On les touchait. On les étouffait de caresses, pour vérifier qu'ils étaient encore vivants, pour vérifier qu'on l'était encore, qu'importe. On savait leur dire qu'ils comptaient plus que tout le reste. Bien plus que les fins de mois difficiles, que la haine qui régnait partout, sourde, dans cette ville, depuis qu'elle avait basculé entre les mains des racistes...
Annabelle est une jeune collégienne en classe de troisième. Elle vit une situation familiale difficile, sa mère étant dépressive et incapable de s'occuper d'elle. Heureusement, elle a une amie qu'elle apprécie beaucoup, c'est Fatou...
Chez elle ce n'est pas comme à la maison, on sait parler d'amour et manifester par des gestes et des mots tendres que l'on se soucie des autres.
Dans la classe d'Annabelle, rien n'est simple non plus et la situation est quasiment explosive en cette veille de weekend prolongé de Pentecôte.
La jeune professeur de français que les élèves surnomment "Et chérie chérie" tente de les inviter à débattre sur le roman de Radiguet "le diable au corps" mais personne ne veut jouer le jeu. Elle finit par exclure les trois plus pénibles garçons de la classe qui se prennent la tête depuis le début du cours et sont incapables d'arrêter de s'insulter.
Mais Fabien, un des garçons exclus, décide de se venger à la fois de son professeur et de ses camarades qu'il juge responsables de cette exclusion.
Il va être aidé par Sébastien, l'ex-petit copain d'Annabelle qu'elle vient de quitter et qui le prend très mal (car c'est la première fois qu'une fille ose le faire).
Tous deux n'hésiteront pas un instant à se rendre au concert prévu ce soir-là, pour laisser libre cours à leur agressivité, certains d'être dans leur bon droit et soutenus par leurs parents.
Toute la jeunesse de la ville s'y trouve réunie, car le concert est organisé pour soutenir les "sans-papiers" que le père de Fabien, adjoint au maire de la ville, fait expulser depuis que la municipalité a basculé à l'extrême.
Le drame éclate...
Les gens couraient dans tous les sens et je perdais complètement mes repères. Je n'arrivais plus à savoir exactement dans quelles directions se trouvaient les issues.
J'ai tenté de ramper sur le béton parmi les éclats de verre en me guidant tant bien que mal aux pas des spectateurs qui s'enfuyaient. La panique me faisait manquer d'air et de force. Chaque centimètre me coûtait un effort plus terrible que le précédent. J'allais abdiquer lorsque ma main a rencontré le petit corps d'une gamine assise-là sur mon passage et qui pleurait...Somaya appelait Fatou d'une voix sourde et déjà presque inaudible.
Dès le départ, le lecteur prend connaissance d'un drame à venir, même s'il ne sait pas lequel car le texte présente des encarts en italiques qui donnent la parole à deux personnes, encore vivantes...mais on ne sait pas encore pour combien de temps.
Très vite, le lecteur va comprendre que ce n'est pas un hasard si l'auteur se focalise sur les événements survenus en classe, cet après-midi là... C'est un de ces jeunes adolescents qui va "péter un câble".
La tension monte en effet rapidement et le lecteur, au fil du récit, se révolte devant tant d'injustice et de violence et finalement voit arriver le dénouement avec soulagement.
On se prend d'amitié pour Mokhtar qui n'est pas un mauvais bougre malgré sa fougue et sa promptitude à répondre. Il va servir de bouc émissaire à la cruauté et la trahison des jeunes racistes irresponsables, mais se croyant soutenus par leur famille.
Annabelle, l'héroïne, nous émeut par ses questionnements et ses "moments de grâce" auxquels elle s'accroche pour trouver quelque chose de positif à sa vie quotidienne. Son envie de vivre et d'être heureuse nous touchent de près.
Isabelle l'enseignante, qui nous semble bien démunie au départ, est un des personnages attachants du roman car elle montre bien que parfois, il est difficile quand on a ses propres problèmes de faire face à ces ados rebelles et agressifs.
L'auteur nous offre ici une belle écriture, un rythme époustouflant pour ce roman qui nous entraîne dans la spirale de la violence.
A la fois roman d'ado et thriller social, il montre bien comment de simples violences verbales vont être montées en épingle et servir de prétexte à des actes barbares et irréfléchis.
Voilà donc un roman très réaliste et crédible qui, je l'espère fera réfléchir les jeunes sur la montée de la violence et les conséquences de leurs actes...
Une lecture marquante pour un roman très fort dont nous ne sortons pas non plus indemnes, je vous l'assure.
A réserver aux plus de 13-14 ans.
J'ai repris le chemin de la maison en songeant que mon jardin secret était planté de pousses maladroites et semblables. Des mauvaises herbes qui luttaient, qui parfois réussissaient à fissurer les murs, les trottoirs et la ville, mais pour en faire un chouette jardin d'agrément, c'était assez pauvre. Il fallait que je change les choses.
Hubert Ben Kemoun est devenu un auteur prolifique en littérature jeunesse dès les années 90. Il a toujours ancré ses romans dans la réalité et les problèmes de société.
Mais là alors qu'il a fini d'écrire ce livre, c'est la réalité cette fois qui l'a tragiquement rattrapé et il s'en excuse à la fin du livre.
J'ai découvert ce titre chez DocBird, une blogueuse enseignante-documentaliste passionnée et qui partage avec nous ses lectures adultes et ados : romans, documentaires, mangas, il y en a pour tous les goûts. C'est elle qui m'a donné envie de le lire et de l'emprunter à la médiathèque de mon village...
Je la remercie ici pour cette belle découverte.
N'hésitez pas à aller lire sur son blog sa superbe chronique, en cliquant ci-dessous...
La fille quelques heures avant l'impact - Doc Bird : Blog de découverte en lectures
" La fille quelques heures avant l'impact " d'Hubert Ben Kemoun, éditions Flammarion Résumé : Une demi-journée où tout va basculer pour Annabelle et d'autres élèves de sa classe, ainsi que l...
http://docbird.over-blog.com/2017/03/la-fille-quelques-heures-avant-l-impact.html