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Aujourd'hui c'est le 4 décembre et c'est le jour de la Sainte-Barbe. En Provence, c’est le début de la période calendale (du provençal calèndo = noël).
La tradition veut que l’on commence ce jour-là les préparatifs de noël dans tous les foyers : Décoration de la maison, réalisation de petits biscuits, mise en place de la crèche...que l'on soit croyant ou pas, puis du sapin avec les enfants.
Noël est la fête de l'année où les traditions provençales sont les plus tenaces et les plus belles. Il faut dire qu'elles nous rappellent notre enfance et que nous n'avons qu'une seule envie, celle de les perpétuer et de les transmettre à nos petits-enfants.
Ce jour-là, pour respecter la tradition provençale, on commence donc la période calendale en plantant du blé (que l'on peut acheter aujourd'hui dans toutes les bonnes boulangeries au profit des enfants hospitalisés) mais qui avant, provenait de la récolte de l'année précédente. On peut aussi faire germer des lentilles car elles sont très aériennes et tiennent plus longtemps dans nos maisons chauffées.
Il faut placer les graines dans 3 coupelles différentes ou des petites assiettes creuses (rappel de la trinité pour les croyants). J'en plante quatre, juste par esprit de contradiction, car je ne suis pas croyante.
Ce petit rituel familial remonte à l'Antiquité. A la maison la plantation est traditionnellement effectuée par les enfants les plus jeunes, lorsqu'ils sont là, bien évidemment !
D'abord ça les occupe dans cette période où ils ont envie que le temps passe plus vite, ensuite cela permet de leur faire garder un contact avec la terre, chose qu'en ville, ils ne font pas toujours.
Une fois plantées, les graines doivent être bien surveillées tous les jours. Il faut cependant les arroser sans excès.
L'idéal est de les placer tout près de la fenêtre, voire directement en plein soleil.
Au moment de noël, elles seront placées , entourées d'un ruban (rouge chez moi), lors du gros souper (le 24 décembre) et y resteront jusqu'au lendemain, pour le repas de midi du 25 décembre.
On les placera ensuite dans la crèche au milieu des santons pour y symboliser les champs.
Puis après l’épiphanie, il faudra diviser les plants et les planter aux quatre coins du jardin !
Si les graines donnent des plantules solides et abondantes, ce sera un signe de bonne santé, de joie et de prospérité pour la nouvelle année.
J'avoue que je n'ai jamais planté les plants aux quatre coins du jardin, n'ayant pas eu de jardin pendant de nombreuses années. Mais mes grands-parents le faisaient !
Comme le disait mon grand-père :
"Quand lou blad vèn bèn, tout vèn bèn !" Littéralement : quand le blé vient (=pousse) bien tout vient (=pousse) bien. Autrement dit : "blé bien germé c’est la prospérité pour toute l’année"…
Remarque : le blé donne naturellement des tiges plus drues et vertes que les lentilles !
Je fais ça depuis mon enfance et ni ma grand-mère ni ma mère n’ont jamais oublié de planter le blé ou les lentilles le 4 décembre. J’ai pu observer depuis, que bien que les coupelles soient placées au même endroit chaque année, les graines ne poussent pas de la même façon !
Donc les années se suivent et ne se ressemblent pas.
Vous en doutiez ?
D’où vient cette tradition encore très ancrée en Provence ?
Elle remonterait en fait à une coutume païenne datant de l’antiquité qui correspondrait à un rite de fécondité.
En effet à cette époque beaucoup de paysans étaient superstitieux.
Dès la mi-décembre, par peur de voir la nature rester endormie et ne plus se réveiller, ils plantaient des graines dans différents plats puis lorsqu'elles avaient germé, ils les transplantaient au bord des champs, comme s'il s'agissait d'une offrande. Une façon d'honorer la terre nourricière et de lui rappeler comment il fallait faire pour nourrir les hommes.
Et une façon aussi de prévoir les récoltes à venir...car, pour eux, si la germination se faisait bien, la prospérité à venir était assurée !
Cette coutume païenne a été récupérée ensuite par l'église catholique.
Puis la tradition a évolué et la légende dit qu’au XIII° siècle, Barbe qui vivait à Nicomédie en Asie mineure, était une jeune fille vierge qui fut séquestrée dans une tour par son père, Dioscore, un riche païen inquiet des ravages occasionnés par sa beauté, car elle était très courtisée.
Durant l’absence de son père, elle se convertit au christianisme et se fit baptisée par un prêtre déguisé en médecin qui s’introduisit en cachette dans la tour.
A son retour, son père furieux la fit torturer puis la décapita de sa propre main. Il fut immédiatement foudroyé pour son acte de barbarie…
Depuis, Sainte Barbe est devenue le symbole et la sainte patronne de tous ceux qui travaillent avec le feu ou la poudre : pompiers, artilleurs, mineurs, couvreurs et charpentiers, qu’elle protégerait de la mort violente.
Sainte Barbe a été retirée du calendrier en 1969 pour être remplacée par Sainte Barbara !
Cette tradition est tellement ancrée en Provence que les écoles commandent un énorme sac de blé chaque année pour que, après en avoir planté à l'école, les enfants en ramènent un petit paquet chez eux pour le planter.
Cet article est paru sur ce blog la première fois en décembre 2012. Il a été mis à jour en 2015, puis des photos nouvelles sont venues l'enrichir un peu plus chaque année.
Merci de votre intérêt !