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Revenons un peu en Haute-Loire pour visiter un endroit insolite mais riche de son passé...
Il s'agit de la Pinatelle (=pinède) du Zouave qui comme son nom l'indique est située près du hameau du Zouave, un hameau proche du Puy-en-Velay.
Ce site a reçu le label "arbre remarquable de France" en 2012 , et la forêt est de plus classée Refuge LPO, depuis 2011.
Il s'agit d'un espace naturel sensible protégé où se trouve, sur un plateau qui domine la vallée, une forêt de pins sylvestres, présentant des formes particulières. On les appelle les pins de boulange.
Le Pin de boulange est un pin sylvestre qui au lieu de pousser comme bon lui semble dans les forêts naturelles de la région et d'atteindre parfois à l'âge adulte près de 30 à 40 mètres de hauteur, a été façonné au fil du temps par les hommes qui l'ont taillé à leur mesure, de façon à pouvoir en récupérer le petit bois à portée de main. Ce petit bois, appelé "bois de boulange" alimentait les fours de boulangers de la ville.
Taillé de manière à ce que ses branches poussent plus bas et plus nombreuses et soient donc davantage accessibles pour en faire des fagots, son tronc a pris une allure particulièrement difforme, lui donnant l'aspect d'un arbre malade...ou d'un bonsaïs géant.
Pins sans tête, pins têtards...les hommes supprimaient les nombreux bras environ tous les huit ans.
Ces forêts plantées de pins sylvestres ont été exploitées de 1800 à 1945 environ, mais sans doute bien avant... Les derniers pins de boulange ont été abandonnés vers les années 50 lorsque le fuel domestique, le gaz, l'électricité ont remplacé après guerre peu à peu l'usage du bois.
Cela fait maintenant plus de 40 ans et, en poussant, ils ont pris une forme de chandelier caractéristique...
Pour mieux vous rendre compte du travail des hommes je vous dirai qu'un seul boulanger avait besoin de 100 fagots par semaine pour allumer son four, ce qui représentait près de 3 grosses journées de travail pour un seul homme. Et en 1830, il y avait près de 150 boulangers aux alentours du Puy et dans la ville ! Les fagots étaient également utilisés pour chauffer les fours des potiers ou des tuileries.
Les hommes les transportaient jusqu'à la ville en charrettes tirées par des bœufs.
C'était une source de revenu non négligeable et cela leur permettait d'exploiter des parcelles non cultivables.
Je ne peux pas vous décrire l'ambiance particulière du lieu...
C'est à la fois magique, étrange et tellement poétique ! La main de l'homme est partout et le promeneur a le sentiment d'être seul et pourtant, il entend les voix et les bruits de ces hommes qui ont travaillé tous les jours en ce lieu pendant des décennies.
Certains arbres ont pris des formes tellement bizarres que nous pouvons laisser libre cours à notre imagination et penser que peut-être...ils n'ont pas été "sculptés" au hasard.
Vous pouvez agrandir les photos en cliquant dessus...
C'est un lieu parfait pour se balader en famille. Les sentiers proposés, les prairies réservées à la détente, les aires de pique-nique et le coin cabane, permettent aux enfants et à leur parents de découvrir ce lieu magique d'une autre façon. Le promeneur solitaire recherchera les matins ou les soirées davantage propices à s'imprégner de l'ambiance du lieu.
Les "pelles" de boulanger surélevées nous donnent des renseignements précieux sur l'histoire du site.
Nous avons été étonnés du peu de monde rencontré en plein mois d'août, et c'est une bonne chose car je n'aime pas les endroits trop fréquentés, surtout quand ils nous offrent de telles merveilles de la nature.
Afin d'éviter que le sous-bois envahisse la forêt certaines zones servent aujourd'hui de pâturage à des troupeaux de brebis noires du Velay. Nous n'avons pas réussi à les voir tant elles sont craintives.
Personnellement je rêve de découvrir ce lieu sous la neige, ou dans le brouillard ! On y retournera donc sans nul doute mais un jour d'hiver.
Afin que ce mode d'exploitation typique du Velay ne tombe pas dans l'oubli, le Conseil Général de la Haute-Loire a décidé d'acquérir cette forêt en 1996. Sur une des parcelles, de nouveaux pin sylvestres ont été plantés afin d'expérimenter les méthodes de taille ancestrales. Ainsi ce témoignage vivant pourra continuer à éblouir petits et grands.
A noter... on trouve aussi des pins de boulange dans le Forez où on les appelle des "garolles".
Sur le site, une mare artificielle attire quelques jolis grenouilles...
La biodiversité est bien présente...Nous avons vu de nombreux insectes et trouvé une mue de grande libellule.
Voilà notre visite de ce lieu magique est terminé pour aujourd'hui. Très bientôt nous ferons d'autres balades en Haute-Loire, enfin, comme d'habitude...si vous le voulez bien !