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L'idéal pour être en forme en ce moment en Provence, est de profiter du soleil quand il est là, et du printemps puisqu'il est là, pour aller marcher dans la garrigue.
C'est la pleine saison des asperges sauvages... ça tombe bien car j'adore aller les ramasser.
Et puis peu de gens font de même, finalement car ils sont au travail toute la semaine et nous, en tant que retraités, nous avons davantage de temps. De plus pour les asperges, c'est comme pour les champignons : les coins sont secrets.
Appellations locales
Comme beaucoup de plantes, l'asperge sauvage se nomme différemment selon l'endroit de Provence où vous la ramassez. je vous rappelle que le u se prononce "ou" en provençal.
En Provence, en général on l'appelle "romaniéu-coniu", "esparga fèra", "romanin de tina" ; ou "aspergi" tout simplement.
Dans le Vaucluse (qui est en Provence aussi, oui je sais !) on l'appelle "rouniéu-couniéu";
Dans le Var, plutôt "ramo-couniéu" ou "pounchu", ou alors "tiro-bou"...
En Corse, ce sera plutôt "sparagu".
Et dans le Languedoc, c'est l'"espargue salvarge" ou "romanin conilh".
Si vous avez la vôtre, je suis preneuse !
A quelle plante correspond l'asperge sauvage ?
Quel que soit le nom qu'on lui donne, la partie comestible de la plante est la jeune pousse (appelée en botanique, un turion) d'une plante vivace, l'asparagus acutifolius ou "asperge à feuilles piquantes".
C'est la variété sauvage de notre asperge verte cultivée, les autres variétés d'asperge cultivées étant des cousines.
On trouve facilement des plants d'asperge dans la garrigue provençale, sur les sols secs et rocailleux, souvent en plein soleil ou à mi-ombre dans les bois mixtes ou sous les chênes, surtout les kermès.
Vous ne serez donc pas surpris si je vous dis que cette plante était déjà consommée par les hommes préhistoriques.
Adulte, la plante présente des rameaux piquants très courts et forme souvent une boule aux tiges aérées parfois très longues et pouvant atteindre 1.50 mètre. Quand elle se plaît à un endroit, la plante colonise de grands espaces. Elle prolifère après une coupe de bois par exemple, ou bien un feu car elle fait partie des plantes qui reprennent facilement et aident à la constitution du nouveau sol.
Elle peut s'acclimater dans les jardins ou les parcelles boisées provençales sans problèmes...
Elle fleurit durant l'été mais attention car ses baies qui apparaissent à l'automne sont toxiques. Ce sont les oiseaux qui n'y sont pas sensibles qui les transportent dans leur tube digestif et favorisent ainsi la dissémination de la plante.
Comment ramasser les jeunes pousses ?
Au pied de chaque plant adulte, il est fréquent de trouver dès la fin février dans les zones abritées et jusqu'à fin avril ailleurs en Provence, au moins une à deux pousses nouvelles (parfois bien davantage).
Parfois la plante adulte disparaît, en particulier après un hiver rigoureux, mais toujours en action, le rhizome bien au chaud dans la terre va produire de jeunes pousses qui reparaissent dès le printemps suivant au milieu de rien ou bien dans l'herbe.
La jeune pousse peut avoir une couleur vert tendre ou bien parfois brunâtre. Elle grandit très vite et peut dépasser les massifs bas de chênes kermès.
Là même pas besoin de se baisser, ni de se piquer, le ramassage devient un jeu d'enfant.
Il faut la cueillir directement à la main en cassant d'un coup sec la tige, dans sa partie tendre.
Ne pas tirez sur la pousse car en arrachant tout, on détériore le rhizome et aucune autre pousse ne ressortira cette année. Par contre celle que vous avez coupé, continuera à grandir, à se lignifier et à se ramifier et souvent le promeneur trouvera à nouveau à ses pieds dans quelques jours de nouvelles pousses tendres.
En quelques minutes, ou parfois, après deux heures de marche, vous pouvez remplir un petit panier.
A noter : cette asperge est beaucoup plus petite que l'asperge commune que vous trouvez chez votre maraîcher et aussi beaucoup plus forte en odeur, en goût et très légèrement amère.
Comment la préparer ?
1 - Si vous en avez vraiment beaucoup ou si elles sont grosses.
Vous pourrez les cuire à la vapeur pour les manger en vinaigrette ou dans une salade composée de printemps.
Pas besoin que je vous détaille la recette, ni que je vous mette des photos ! Nous on les aime beaucoup avec une vinaigrette à l'huile d'olive et au citron, très légèrement salée.
On peut aussi les faire revenir dans une poêle avec du beurre ou de l'huile d'olive et une simple persillade.
2- Si elles sont plus fines.
Vous pouvez procéder de même en les faisant cuire à la vapeur ou bien revenir dans de l'huile d'olive. Mais cette fois il faudra les couper au préalable en petits tronçons de 2 à 3 cm, ce qui vous permettra de vérifier leur tendreté. La pointe est souvent la plus tendre.
Vous les préparerez ensuite...
- soit en tarte salée.
La recette est simple. Sur un fond de pâte brisée ou feuilletée, vous étalerez vos asperges cuites. Versez ensuite une préparation classique, faite en battant ensemble 2 à 3 œufs selon la grandeur de votre moule, de la crème fraîche, sel et poivre...et un peu de gruyère pour agrémenter le tout, mais pas trop pour ne pas masquer le parfum.
Cuire à 180° pendant 30 minutes.
Et voilà le résultat...
- soit en brouillade (ou en omelette).
Pas besoin de recette (ni de photos). Souvent je fais cuire avec un filet d'huile d'olive les asperges coupées en petits morceaux directement dans la poêle. Lorsqu'elles sont bien tendres, je verse les œufs battus avec un peu de sel, de poivre et de lait et je touille. Pour les enfants on peut ajouter un peu de gruyère râpé qui adoucit l'amertume.
- soit en potage.
Il faut choisir les asperges de début de saison, bien tendres et pas du tout fibreuses.
Pour un beau bouquet que je coupe en tronçons, prévoir deux pommes-de-terres épluchées et coupées en dés et une belle courgette, détaillée elle-aussi en dés. Couvrir d'eau salée et cuire 10 à 15 minutes en cocotte minute.
Mixer finement et servir avec un petit filet de crème fraîche.
Parfois je fais revenir les asperges avant de les incorporer dans le potage (version gourmande) parfois non (version light)!
Quelles sont les propriétés des asperges sauvages ?
Ce sont les mêmes que celles des asperges cultivées mais en plus concentrées.
Elles ont des propriétés diurétiques et elles présentent une très grande richesse en vitamines (A, B1 et B2,) ainsi que des fibres et des sels minéraux.
Remarques botaniques pour ceux qui veulent en savoir plus !
Les asperges sauvages peuvent dans certaines régions de France se confondre avec les "respounchous", dont Nell nous a parlé récemment.
Les "respounchous" n'ont rien à voir avec les asperges sauvages même si les pousses se ressemblent étonnamment : la plante adulte est différente et toutes deux n'appartiennent pas à la même famille.
Ces dernières correspondent aux pousses du Tamier commun (ou "herbe aux femmes battues" car on utilisait leur racine pour soigner rapidement les contusions).
On consomme la pousse nouvelle au printemps, comme les asperges, essentiellement en brouillade, en salade ou en omelettes... et surtout dans le sud-ouest !
Le tamier commun est peu fréquent en Provence car il lui faut de l'humidité pour pousser (c'est juste l'inverse des asperges !).
Mais le bon sens populaire a fait que les recettes se ressemblent.
Attention aux baies qui sont toxiques elles-aussi.
Ne pas confondre non plus, le nom provençal de "respounchou" avec l'appellation provençale d'une autre plante : le "rapounchoun" (ou repouncho).
Je vous perds là, je sens... mais je vous rassure, moi aussi je m'y perds tant les noms provençaux se ressemblent !
Le "rapounchoun" provençal est une salade sauvage dont on consomme les feuilles et la racine bifide cuite. Il s'agit d'une campanule donc le nom latin est "campanula rapunculus". On l'appelle aussi "campanule raiponce" ou "rave sauvage"...
La voici en fleur...
Les deux dernières photos proviennent de wikipedia.