Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...
Vous aimez les crêpes : ce roman est fait pour vous !
Nous sommes le 15 février, peu avant 11 heures du matin...Mortimer Decime s'est habillé d'un costume sombre et s'est allongé sur son lit : il a 36 ans aujourd'hui et, comme tous les hommes de la famille avant lui, depuis des générations, il attend...la mort. Il a vendu sa voiture, résilié le bail de son appartement, vidé le frigo et les placards et quitté son travail.
Pour fêter l’événement, je m’étais même acheté un costume de deuil, avec chemise et chaussures assorties. Je n’avais pas lésiné sur le sombre et le noir. Pour les chaussettes, j’avais eu plus de mal à me déterminer. Imprimées de motifs, discrètement rayées ? Finalement, j’avais opté pour une fantaisie : des oursons rouge et jaune, clonés façon Andy Warhol, sur fond de neiges éternelles. Mourir, d’accord, mais du bon pied.
Oui mais voilà, rien ne se passe comme prévu !
Impossible.
Cette pendule est réglée comme du papier à musique, elle est réglée comme une horloge, elle n'avance pas, elle ne retarde pas, elle est à l'heure pile, à la seconde poil.
Je n'ose pas bouger. Si je bouge il va certainement se passer quelque chose. Je suis coincé dans une fracture du temps, je viens de planter ma mort, mais ça va redémarrer, ça va se réparer dans les secondes qui viennent. Je ne bronche pas, je ne respire même plus. Respirer ? Pourquoi faire ?
Alors, Mortimer qui pensait son avenir tout tracé d'avance et qui avait refusé de faire le moindre projet amoureux pour ne pas transmettre à sa progéniture la terrible malédiction familiale, se retrouve un peu perdu.
Que va-t-il faire de sa vie maintenant qu'il est libre d'en faire ce qu'il veut ?
Il y a des jours, comme ça, qui changent en jour d’avant tous ceux qui ont précédé, et font des jours d’après de tous ceux qui suivront.
Heureusement ses amis Nassardine et Paquita vont lui permettre d'y voir clair et d'affronter à la fois son passé et son avenir...
Tourner la page ne sert pas à grand-chose, quand c'est le livre entier que l'on voudrait changer.
Tout d'abord il va chercher à comprendre pourquoi il a échappé à la malédiction familiale et pour cela il va rendre visite à sa vieille tante qui l'a élevé à la mort de son père, sa mère les ayant abandonné lorsque Mortimer n'avait que 2 ans.
Il lui faudra bien affronter la vérité sur sa famille et ses origines et...apprendre à vivre.
Les secrets de famille sont de noires araignées qui tissent autour de nous une toile collante. Plus le temps passe, plus on est ligoté, bâillonné, serré dans une gangue. Incapable de bouger, de parler.
D’exister.
Je connais Marie-Sabine Roger depuis longtemps, grâce à ses écrits pour la jeunesse, bourrés de tendresse et d'amour...comme "La saison des singes" (la mort_abandon des deux parents) par exemple, ou "La moitié gauche de la lune" (le droit de s'aimer et de vivre ensemble, même pour deux ados mineurs) et bien d'autres comme "Le quatrième soupirail" ( emprisonnement et torture du père, accusé d'écrire des poésies subversives sous un régime totalitaire...).
Je n'ai lu pour l'instant qu'un seul de ses romans pour adulte, c'est "Vivement l'avenir" que j'avais d'ailleurs chroniqué sur ce blog. Je n'ai par exemple jamais lu "La tête en friche" dont tout le monde parle beaucoup depuis sa sortie (et le film je crois ?!).
On retrouve dans celui-ci la tendresse entre les êtres et la générosité qui sont présentes dans tous ses écrits. Les personnages secondaires sont pétillants et singulièrement attachants.
Nassardine, sa sagesse, ses propos philosophiques et son fameux khawa imbuvable, Paquita et ses délicieuses crêpes...sont tous deux pétris de bons sentiments.
Tu vois, fils, la médecine a beau faire des progrès tous les jours, on n’a encore rien trouvé contre la connerie. A voir le nombre de gens atteints, ça mériterait pourtant qu’on vote des crédits.
L'histoire de Mortimer est quelque peu invraisemblable...mais qu'importe !
Il n'y a que Marie-Sabine Roger pour pouvoir nous parler de la mort avec autant d'humour et de légèreté !
C'est une lecture pétrie d'humanité, mais non moins susceptible de vous toucher...par la gravité du sujet.
Vous allez forcément vous interroger sur votre vie et vous demander comment vous allez utiliser au mieux le temps qui vous reste à vivre.
J'ai lu ce roman avec plaisir même si je continue à préférer l'auteur dans ses écrits pour la jeunesse !
PROPILOGUE (variété d'épilogue en forme de prologue, et réciproquement)
Lorsqu'on vit dans le désert, on finit par aimer le premier cactus qui pousse.